Sihem Reguieg, blogueuse XXL

Née à Marseille de parents algériens, cette secrétaire médicale est aussi une blogueuse suivie défendant la générosité des formes.

« Il n’existe pas qu’une seule beauté. Il y a de la place pour tous les gabarits. » © Camille Millerand /J.A.

« Il n’existe pas qu’une seule beauté. Il y a de la place pour tous les gabarits. » © Camille Millerand /J.A.

Publié le 13 mai 2016 Lecture : 4 minutes.

Sihem Reguieg est une belle histoire à elle seule, une histoire XXL. Rayonnante, avec ses beaux yeux qui s’accordent parfaitement avec ses longs cheveux noirs, elle est également très rigolote. Avec elle, c’est une blague toutes les trois minutes. Toujours le mot pour relativiser. « Je suis grosse, c’est vrai, mais j’ai un toit sur la tête, un boulot, une famille que j’aime. Je ne suis pas la plus malheureuse », rappelle-t-elle fréquemment.

Alors que la plupart des filles font des pieds et des mains pour tenter de camoufler leurs rondeurs, Sihem Reguieg, 34 ans, assume ses kilos supplémentaires et affiche fièrement ses formes. Son physique : 1,69 m pour 95 kg. « Et encore, j’ai perdu beaucoup de poids », affirme sans aucun complexe cette jeune maman, habitante de La Courneuve (banlieue parisienne) qui travaille comme secrétaire médicale dans un hôpital de la ville voisine, Saint-Denis.

la suite après cette publicité

S’accepter telle quelle

Il y a quelques années, la trentenaire pesait 130 kg… Née à Marseille, Sihem Reguieg débarque bébé à Paris, dans le 18e arrondissement, quartier de La Goutte-d’Or, où elle passe son enfance. « Les plus belles années de ma vie », précise-t-elle, un brin nostalgique. Puis elle atterrit à La Courneuve, au début des années 1990, et s’y sent tellement bien qu’elle y reste.

En surpoids « depuis toujours », elle devient obèse en 2005, avec 135 kg sur la balance. Sa santé est en jeu. « J’ai dû aller voir un spécialiste : j’avais des problèmes de tension artérielle, du diabète », explique-t-elle. Elle suit alors de nombreux régimes, sans succès. L’année d’après, elle doit passer par la chirurgie bariatrique. On lui pose un anneau entre l’œsophage et l’estomac.

Elle se sent mieux à l’extérieur et commence à poster des photos sur Facebook

« J’ai perdu d’un coup 30 kg, mais je ne m’acceptais pas avec mon nouveau corps », se souvient-elle. Avec le temps et malgré quelques cochonneries, « surtout des chips, du Coca et des barres chocolatées », elle finit par comprendre qu’il va falloir faire avec ce corps auquel elle a du mal à s’habituer.

la suite après cette publicité

Quelques mois plus tard, elle finit par s’accepter telle quelle. Elle se sent mieux à l’extérieur et va mieux à l’intérieur. Elle commence à poster des photos sur Facebook, habillée « de vêtements que seules les minces osent porter ». La mayonnaise prend, si l’on peut dire. Boostée par cette confiance retrouvée, Sihem Reguieg crée son blog, où elle raconte sa « vie de grosse ». En réponse, elle reçoit des tombereaux de messages la félicitant et l’encourageant.

Le vent en poupe

la suite après cette publicité

Elle est bientôt suivie sur les réseaux sociaux par des milliers d’autres filles, grosses, fines, grandes, petites, avec ou sans bourrelets, qui voient en elle une source de volonté et de dépassement. En ligne, elle promeut des produits qu’elle juge novateurs, efficaces ou originaux. Son aisance et son élégance naturelle lui valent des partenariats avec des marques américaines. Sihem Reguieg enfile parfois la tenue de modèle pour Oriental Wedding, une boutique de robes de mariées haut de gamme parisienne, créée par la Franco-Marocaine Hanane Lamgharraze.

Il n’y a pas une beauté. Il y en a des milliers et il en faut pour tous les goûts.

Depuis deux ou trois ans, des défilés de mode dédiés aux formes plus généreuses ont lieu un peu partout dans le monde, notamment aux États-Unis, où une femme sur deux est en surpoids. Les marques ont bien compris qu’il y avait là une clientèle à satisfaire… Récemment, Sihem Reguieg a signé des partenariats avec Asos et Kiabi. « Les marques françaises ont mis du temps à comprendre que la beauté ne se résumait pas à une silhouette longiligne », dit-elle.

« Il n’y a pas une beauté. Il y en a des milliers et il en faut pour tous les goûts. Il y a suffisamment de place pour tous les gabarits », ajoute avec le sourire celle qui vient d’être désignée par le très sérieux site américain de mode bustle.com comme « une des neuf blogueuses à suivre cette année dans le monde pour se réconcilier avec vos formes ».

À l’aise dans la vie virtuelle, il lui restait à l’être un peu plus dans la vraie vie. Première étape : les salles de sport, ces endroits interdits où les grosses ont peur de se rendre. « La première fois que j’y suis allée, il n’y avait que des nanas et des mecs bien foutus. Je croyais qu’on allait me dévisager, mais je me suis aperçue que personne ne se souciait de moi. Tout était dans ma tête donc… », concède Reguieg.

Quelques jours plus tard, elle prend son courage à deux bras et se rend à la piscine. « J’étais avec mon fils. J’étais stressée. J’avais une serviette autour de la taille, je l’ai posée et j’ai marché rapidement jusqu’au bassin, raconte-t-elle encore toute fière. Au final, c’était pas la mer à boire. »

Aujourd’hui, à l’aise dans sa peau et dans son corps, Sihem Reguieg a quelques idées en tête, bien décidée à passer à la vitesse supérieure. D’abord, améliorer son blog pour les femmes rondes qui s’assument et pour celles qui le feront dans un avenir proche. Mais au-delà, elle voudrait s’adresser à toutes, sans critères de poids.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image