Algérie : Tom Gutjahr doit faire de Djezzy un leader du digital
La mission du nouveau DG d’Optimum Telecom Algérie (OTA) : remettre l’opérateur mobile algérien en pole position. A-t-il toutes les cartes en main ?
Le poste était vacant depuis deux mois. Puis, par un beau soleil de mai, le nom est tombé : Tom Gutjahr est devenu le nouveau directeur général de l’opérateur algérien de téléphonie mobile Optimum Telecom Algérie (OTA), commercialisé sous la marque Djezzy. Le quinquagénaire au regard clair, qui doit s’installer au siège d’Alger le 1er juillet, succède ainsi à Ghada Gebara, restée neuf petits mois.
Le choix du meilleur candidat a pris du temps, mais il était nécessaire pour trouver quelqu’un capable « de mener le processus de transformation de Djezzy en un leader numérique, tout en renforçant la position de l’opérateur sur le marché local », annonçait le 12 mai le communiqué de la maison mère russo-norvégienne VimpelCom.
Une excellente connaissance du marché
Et avec le lancement imminent de la 4G en Algérie – l’attribution des licences était annoncée pour le 23 mai -, il fallait pour la filiale, détenue à 51 % par l’État algérien à travers le Fonds national d’investissement (FNI), un directeur général opérationnel immédiatement. « Il était important d’avoir quelqu’un qui connaisse l’Algérie, y a déjà travaillé et n’a donc pas besoin d’une courbe d’apprentissage », soulignait Vincenzo Nesci, président exécutif de Djezzy depuis quatre ans, lors d’une interview à Jeune Afrique le 18 mai.
Avec trois années algériennes à son compteur sur les dix-huit passées dans les télécoms, Tom Gutjahr est familier à la fois de la capitale et de l’entreprise. Entre 2005 et 2008, ce cadre d’origine autrichienne, diplômé en économie, en marketing et en management des universités de Vienne (Autriche) et de Strasbourg (France) ainsi que des prestigieuses écoles de commerce IMD, de Lausanne (Suisse), et GSB, de Stanford (États-Unis), a eu à la fois la charge du département produits et services marketing et du segment entreprises et business.
Tom Gutjahr a œuvré à augmenter le nombre d’utilisateurs mobile de la plateforme monétaire d’Airtel ainsi qu’à étendre la couverture du réseau 3G
Mais cette fois, Tom Gutjahr se voit confier l’ensemble de Djezzy. Ce polyglotte, maîtrisant parfaitement l’anglais, le français, l’espagnol et l’allemand – possédant aussi des notions d’arabe -, a en effet acquis une solide connaissance des marchés émergents, africains en particulier. Or, à présent que Djezzy a retrouvé son souffle financier et opérationnel (grâce à l’acquisition, en avril 2014, d’OTA par le FNI, ce qui a mis fin à cinq années de paralysie), ce second atout se révèle précieux pour transformer Djezzy en un leader du digital.
En Ouganda, où, depuis août 2014, il occupait le poste de directeur général d’Airtel, Tom Gutjahr a œuvré à augmenter le nombre d’utilisateurs mobile de la plateforme monétaire d’Airtel ainsi qu’à étendre la couverture du réseau 3G. Au moment de son départ, le directeur mettait en avant, dans les colonnes du journal ougandais anglophone Daily Monitor, ses bons résultats : « Airtel Ouganda contrôle un tiers du réseau monétaire mobile du pays ».
Parcours brillant
Avant de rejoindre le géant indien, Tom Gutjahr, qui a débuté sa carrière dans les télécoms en Autriche au sein de l’ex-Mobilkom, devenu A1 Telekom Austria, a travaillé pendant six ans pour Tigo, filiale de la société luxembourgeoise de télécommunications Millicom, au Tchad puis au Rwanda et enfin au Paraguay.
Fort de ces expériences, Tom Gutjahr arrive à Alger pour remplir un cahier des charges techniques bien fourni, comprenant de « nouveaux services digitaux pour le marché algérien, la poursuite du déploiement de la 3G et de la 4G, les services financiers mobiles, le soutien aux start-up et au B2B, ainsi que la digitalisation du pays ».
Autant de chantiers que Tom Gutjahr mènera en tandem avec Vincenzo Nesci. Doté d’une longue expérience dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, il a effectué deux fois plus d’années dans les télécoms que son directeur général. Prévue dans les accords, cette double gouvernance revient toujours à deux personnes de VimpelCom.
Ainsi, pendant que Tom Gutjahr s’occupera de l’opérationnel, Vincenzo Nesci retrouvera son rôle premier d’intermédiaire avec le gouvernement, le FNI, les politiques, les institutions, etc.
Pendant que le nouveau gérera le déploiement de la 4G, l’ancien veillera à ce que Djezzy l’implante en priorité dans les wilayas les plus stratégiques. Car, comme l’a bien rappelé Vincenzo Nesci lors de son entretien avec J.A., « le lancement de la 4G en Algérie représente un moment important pour Djezzy », qui compte sur cette nouvelle technologie pour « rattraper le retard pris par le lancement tardif de la 3G ».
Le nombre d’abonnés GSM et 3G de l’opérateur a reculé de 11 % entre 2014 et 2015 pour atteindre aujourd’hui 16,6 millions de personnes. La technologie mobile de quatrième génération s’ouvre toute une série de services digitaux possibles. À commencer par les paiements mobiles (m-payment).
Un domaine bien connu de Tom Gutjahr, à qui il incombe de préparer les 3 500 salariés de Djezzy. Pendant ce temps, le président exécutif agira pour que le cadre réglementaire du m-payment soit le plus rapide et avantageux possible pour les opérateurs téléphoniques. Car Houda-Imane Faraoun, ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, l’a affirmé : « Le m-payment est une priorité du gouvernement. » Mais, en l’absence de décision politique, tous les atouts du nouveau directeur de Djezzy demeureront sous-exploités.
Algérie Télécom attend un nouveau patron
Alors que Djezzy retrouve enfin un directeur général, Algérie Télécom, l’opérateur national, dont la branche mobile (Mobilis), numéro deux du marché local, voit son nombre d’abonnés chuter (- 15,53 % en un an), c’est le branle-bas de combat. Le PDG, Azouaou Mehmel, a été remercié fin avril pour « insuffler une nouvelle dynamique managériale au groupe », selon un communiqué du gouvernement.
D’après Houda-Imane Faraoun, ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, l’opérateur public devrait aussi être restructuré et introduit en Bourse.
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