Burkina : Élie Justin Ouédraogo, un homme qui parle d’or

Le code minier a été révisé en 2015. Reste à définir ses modalités d’application. Élie Justin Ouédraogo, président du principal syndicat professionnel du secteur, mène les négociations.

Dans son bureau à la Chambre des mines du Burkina, à Ouagadougou, le 9 mai. © Sophie Garcia/Hanslucas.com / J.A.

Dans son bureau à la Chambre des mines du Burkina, à Ouagadougou, le 9 mai. © Sophie Garcia/Hanslucas.com / J.A.

Publié le 8 juin 2016 Lecture : 4 minutes.

Laure Nadine est membre de SOS/Jeunesse et défis, une association basée à Ouagadougou, au Burkina Faso © Jeff Attaway / Flickr Creative Commons
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Il ne pense plus qu’à ça, ou presque. À l’approche de la fin de son mandat de président de la Chambre des mines du Burkina (CMB), le principal syndicat professionnel du secteur, Élie Justin Ouédraogo, par ailleurs directeur national et président du conseil d’administration de Semafo-Burkina, conduit les ultimes négociations avec le gouvernement en vue de l’adoption des textes d’application du code minier, révisé l’an dernier. Des discussions aussi essentielles que délicates, dans un contexte de baisse des cours mondiaux.

Un secteur en perte de vitesse

Engagée en 2010 sous l’effet haussier des cours de l’once d’or, qui frôlaient alors les 1 900 dollars, la réforme du code minier a abouti sous le régime de transition, dans une conjoncture bien différente. Les cours se sont effondrés (en moyenne à 1 200 dollars l’once au premier trimestre 2016, avec des prévisions à la baisse pour le deuxième trimestre), ce qui remet en question des projets aurifères au Burkina Faso.

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Les revenus du secteur sont passés de 191 milliards à un peu moins de 168,5 milliards de F CFA (de 291,2 à 256,9 millions d’euros) entre 2013 et 2015, et les investissements de certains projets ont été revus à la baisse. « Il est très difficile de légiférer dans un secteur aussi volatil, explique Élie Justin Ouédraogo. Pourtant, nous devons parvenir, en toute transparence, à trouver un équilibre entre les intérêts du gouvernement, ceux des populations riveraines et ceux des sociétés minières, de sorte qu’aucun acteur de ce triptyque n’ait l’impression d’avoir été floué. »

Prospère

Né en août 1952 à Boromo, dans la Boucle du Mouhoun (Ouest), Élie Justin Ouédraogo obtient son doctorat en sciences économiques à l’université de Picardie – Jules-Verne d’Amiens (nord de la France) en 1982. Son thème : « L’investissement minier et les problématiques de l’industrialisation en Afrique de l’Ouest. » Passionné par ce secteur, il y fera toute sa carrière.

D’abord en tant que directeur national de la Société de recherche et d’exploitation minière du Burkina (Soremib), qui exploitait le gisement aurifère de Poura jusqu’à sa fermeture à la suite de l’effondrement des cours de l’or, en 1999. Ministre de l’Énergie et des Mines de 1995 à 2000, il prend la direction d’un nouvel établissement public burkinabè, le Centre d’analyse des politiques économiques et sociales (Capes), de 2001 à 2005.

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Il est ensuite nommé administrateur exécutif de l’Institut de formation et de recherches démographiques (Iford), un organisme international basé à Yaoundé, au Cameroun, poste qu’il occupera jusqu’en janvier 2007.

À la faveur du renouveau minier, Élie Justin Ouédraogo revient à son secteur de prédilection, et à Ouagadougou, en tant qu’administrateur et directeur pour le Burkina du groupe canadien Société d’exploitation minière en Afrique de l’Ouest (Semafo). En 2009, il prend les commandes du Groupement professionnel des miniers du Burkina, devenu Chambre des mines du Burkina en 2011.

Je ne dirais pas que j’ai fait fortune dans l’or, mais plutôt que j’ai vendu mes compétences en matière de gestion d’une société minière

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À sa réputation d’expert du secteur minier s’ajoute celle du chef coutumier qu’il est devenu, en 2011, sous le nom de Naaba Baoogo de Gourcy, dans la province à fort potentiel aurifère du Zandoma (Nord). Si Élie Justin Ouédraogo a toujours été discret sur ses affaires, il est considéré comme un patron prospère. « Je ne dirais pas que j’ai fait fortune dans l’or, mais plutôt que j’ai vendu mes compétences en matière de gestion d’une société minière », relativise-t-il.

Propriétaire de quelques biens immobiliers, il est directeur général de Windiga SA, un développeur de solutions solaires créé en 2011, qui travaille à un projet de centrale solaire de 20 MW. Un investissement estimé à 25 milliards de F CFA, dont Élie Justin Ouédraogo espère boucler le financement d’ici peu. « C’est là que je veux aller désormais, confie-t-il. Le solaire est plus gratifiant [que l’or], et le secteur de l’énergie est essentiel pour le développement de nos pays. »

ENDEAVOUR SE RECENTRE

Le canadien Endeavour Mining, dont l’actionnaire majoritaire est le magnat égyptien Naguib Sawiris et qui, depuis le 9 mai, est dirigé par le Français Sébastien de Montessus (ancien directeur général de la division mines d’Areva), croit au potentiel du sous-sol burkinabè.

Fin avril, le groupe a lancé les travaux de développement de la mine d’or de Houndé (à 250 km au sud-ouest de Ouagadougou), une concession de 23 km2 pour laquelle le gouvernement de transition lui a octroyé un permis début 2015. Un investissement estimé à 200 milliards de F CFA (304,9 millions d’euros), pour une mise en exploitation prévue à la fin de 2017.

En mars, Endeavour a par ailleurs pris le contrôle de son compatriote True Gold Mining, qui détient 90 % de la mine de Karma, dans le nord du pays (les 10 % restant appartenant à l’État), et cédé ses parts dans le gisement de Youga (Sud-Est), pour 25,3 millions de dollars (plus de 22,3 millions d’euros), au groupe turc MNG Gold, déjà détenteur d’un projet aurifère dans le site voisin de Balogo.

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