Burkina : une nouvelle Constitution pour en finir avec la loi du plus fort

Le projet de Constitution est en cours d’élaboration. Objectif : rééquilibrer les pouvoirs et marquer la rupture avec le régime Compaoré.

Le chef de l’État répond en direct aux citoyens, sur la RTB, le 26 avril. © Sophie Garcia/Hanslucas.com / J.A.

Le chef de l’État répond en direct aux citoyens, sur la RTB, le 26 avril. © Sophie Garcia/Hanslucas.com / J.A.

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Publié le 8 juin 2016 Lecture : 3 minutes.

Laure Nadine est membre de SOS/Jeunesse et défis, une association basée à Ouagadougou, au Burkina Faso © Jeff Attaway / Flickr Creative Commons
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Burkina Faso : changement d’ère

Près de six mois se sont écoulés depuis l’investiture de Roch Marc Christian Kaboré à la tête du Burkina Faso. Le pays a-t-il su tourner la page Blaise Compaoré, déchu par la rue en octobre 2014 ?

Sommaire

À chacun de ses meetings, le candidat Kaboré promettait d’en faire l’une de ses priorités de président. Cinq mois après son investiture, il entend tenir parole et faire aboutir ce que les Burkinabè considèrent comme « la » grande réforme politique de ce début de mandat : l’adoption d’une nouvelle Constitution et, donc, l’avènement d’une Ve République.

Le 16 mars, le gouvernement a annoncé la création d’une commission constitutionnelle composée de représentants de la majorité, de l’opposition et de la société civile. Elle sera chargée d’élaborer un avant-projet de texte qui, une fois approuvé, sera soumis aux députés, puis à référendum. « L’objectif est d’avoir une nouvelle Constitution fin 2016-début 2017 », indique Salif Diallo, le président de l’Assemblée nationale.

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Ce changement de loi fondamentale, qui figurait déjà dans la Charte de la transition, adoptée après la chute de Blaise Compaoré, est éminemment symbolique. Comme le déclarait Roch Kaboré lors de sa campagne, il vise à « tourner définitivement la page Compaoré ». Exit la Constitution de 1991, taillée sur mesure pour l’ancien homme fort de Ouaga, et bienvenue dans la Ve République, née de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Un projet qui fait débat

Certains restent toutefois circonspects et s’interrogent notamment sur la priorité accordée à ce projet alors que le pays croule sous les urgences économiques, sociales et sécuritaires. « Pour construire une belle maison, il faut des fondations solides. Cette Constitution établira la nouvelle base de travail dont nous avons besoin », rétorque un proche de Kaboré.

La nature du régime comme les valeurs à promouvoir sont les questions qui divisent

Reste à définir les contours de ces fondations. Si tout le monde s’accorde sur la nécessité de rééquilibrer les pouvoirs au sein d’un système jugé trop présidentialiste, la nature du futur régime est loin de faire l’unanimité. « Le débat sur le caractère présidentiel, semi-présidentiel ou parlementaire est un faux débat, tranche l’avocat Guy-Hervé Kam, porte-parole du Balai citoyen. La Constitution doit avant tout être le fruit d’un consensus. »

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Pour élaborer son avant-projet, la commission constitutionnelle devrait s’appuyer sur les bases jetées par la Charte de la transition. Certains militent aussi pour que le nouveau texte introduise des dispositions novatrices.

Ainsi, Luc Marius Ibriga, professeur de droit et contrôleur général de l’Autorité supérieure de contrôle d’État et de lutte contre la corruption (ASCE-LC), plaide pour que « des valeurs cardinales comme l’intégrité, la solidarité et le respect de la parole donnée soient constitutionnalisées ». Enfin, plusieurs questions importantes devront être tranchées, comme celles de la création d’une chambre haute du Parlement ou de la composition du Conseil constitutionnel.

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QUE DIT LE PRÉSIMÈTRE ?

À l’image des plateformes numériques de veille citoyenne mises en place en Afrique de l’Ouest, comme le « Mackymètre » au Sénégal ou le « Buharimètre » au Nigeria, un portail de suivi et d’évaluation des politiques publiques burkinabè a été lancé début mars : le presimetre.bf. À l’origine de cette initiative, l’ONG Diakonia et la Convention des organisations de la société civile pour une observation domestique des élections (Codel). Ce groupement d’organisations de la société civile avait déjà créé une plateforme de surveillance citoyenne pour suivre les élections présidentielle et législatives de novembre 2015.

Le dispositif, interactif, permet aux citoyens de s’exprimer ou de participer aux sondages par SMS, tweets, sur Facebook ou en direct sur la plateforme. Objectif : « Être un contre-pouvoir, pas contre le pouvoir. »

Par le biais du site ou de l’application, les Burkinabè sont invités à répondre à des questions portant sur les engagements pris par Kaboré durant sa campagne et sur sa gouvernance. Ses cent premiers jours au pouvoir ont ainsi fait l’objet début avril d’une première enquête (« le Rochmètre ») sur quinze thèmes : éducation, jeunesse, sécurité, indépendance de la magistrature, transparence, mandat d’arrêt contre Guillaume Soro, etc., dont les résultats détaillés (par région, genre et catégorie socioprofessionnelle) sont publiés sur le site.

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