Max Kougère, le basketteur qui joue aussi pour aider la Centrafrique
Ailier professionnel en première division française, le discret Centrafricain joue aussi pour aider son pays à se relever.
L’histoire de Max, c’est celle d’un enfant dont le père est décédé quand il avait 12 ans et dont la mère vit en France. D’un cadet poussé par ses aînés. D’un jeune homme qui se construit avec des pères de substitution. D’un homme, enfin, qui finance la scolarité d’orphelins. À 29 ans, Max Kouguère est ailier à l’Élan béarnais (ex-Pau-Lacq-Orthez) en Pro A, la première division de basketball français.
Les pères. « Il a été comme un père pour moi », susurre Max plusieurs fois à propos des hommes qui l’ont pris sous leur aile. Le colonel René Ganango, d’abord, directeur technique de l’Inter Club à Brazzaville. « Je ne saurai jamais comment le remercier d’avoir payé les frais pour que je passe le bac », souffle Max, le visage illuminé par un grand sourire.
Christophe Millois, aussi, directeur du centre de formation de Gravelines, dans le nord de la France, a épaulé le jeune joueur de 18 ans qui venait de débarquer en France. Des figures paternelles pour relayer Maurice Kouguère, le père fier de son garçon brillant à l’école, l’ingénieur agronome dans la société ivoirienne Caistab, décédé d’une cirrhose à Bangui.
Les soeurs. Les sauveuses de 2002. Il y a Béatrice, qui vit aux États-Unis et qui prévient la famille à Bangui de l’imminence du coup d’État de François Bozizé. Les Kouguère sont menacés car ils sont yakomas, comme l’ancien président André Kolingba. « On a dû fuir avec mes frères en passant des journées en barque sur le fleuve Oubangui. » Angèle prend le relais à Brazzaville, dans ce Congo dont leur mère, Micheline, a aussi la nationalité. « Elle a tout fait pour nous, admire Max. Elle nous a mis un peu dans la religion pour nous soulager et elle m’a acheté un ballon de basket. »
Les frères. Ceux du sang, ceux du cœur… et ceux du basket. « Un jour, tu joueras en équipe nationale de Centrafrique ! » le défie Anicet, son aîné, sur le terrain Sainte-Agathe, au Plateau, à Bangui, où il entraîne le gamin à la dure. Ghislain Elenga, joueur à l’Inter Club de Brazza, se souvient : « Beaucoup de gens ont parlé de lui dès qu’il a eu sa première licence, avec le club Anges-Noirs. Il me disait : »Un jour, tu porteras un maillot avec mon nom écrit dans le dos ! » »
Et, là-bas, il y a enfin Maik Prime, un Franco-Congolais qui se prend d’affection pour Max. « C’était le frère de mon meilleur ami, Fiacre, donc c’était mon frère ! raconte, gouailleur, son manager depuis dix ans. Au basket, il massacrait tout le monde. On l’a filmé et on a envoyé les vidéos à des clubs. » L’accord de Gravelines en poche, Maik parvient au bout de plusieurs mois à obtenir un visa pour Max auprès du consulat de France. Entre-temps, l’invitation d’un club américain tombe à l’eau : Max se fait voler argent et passeport sur le chemin de l’ambassade américaine à Kinshasa…
La fiancée. Depuis 2014, une bague de fiançailles pend au cou de Kouguère. Manuella Rossi, Miss Université Afrique 2011, est Centrafricaine et partage avec lui l’impératif d’agir au profit des gamins de Bangui. « Je suis orpheline de mère et Max, de père, ça nous a rapprochés, explique l’étudiante infirmière. On inscrit des enfants à l’école, on envoie des dons. Il ne parle pas beaucoup, mais il est très à l’écoute. Il sait être un frère, ou un père… »
La famille. Depuis un an, Kouguère est le capitaine de l’équipe nationale centrafricaine, où il joue depuis 2009. « C’est une famille. Elle me manque dès que je rentre », insiste celui qui a pleuré lors de son retour à Bangui, après sept ans d’absence. Son rêve, c’est de gagner l’AfroBasket pour la Centrafrique, qui l’a remporté en 1974 et en 1987.
En 2012, il organise un match de gala pour honorer les vingt meilleurs joueurs nationaux, qui ne vivent pas de leur sport. Et en 2013, en plein conflit civil, il n’hésite pas à y retourner. « Je joue pour amener un peu de joie dans le cœur des Centrafricains. Je voudrais leur montrer que, comme dans notre sélection, chrétiens et musulmans doivent être unis. »
lui-même. Max Kouguère aime Koffi Olomidé, les maths, les documentaires animaliers, l’actualité politique en Afrique et, surtout, le basket-ball. À Pau, au pied des montagnes des Pyrénées, son entraîneur, Éric Bartecheky, qui l’a fait venir d’Orléans, est « content de ce qu’il fait cette saison ». Max a connu huit clubs en dix ans. A-t-il la carrière qu’il aurait pu faire ?
« Non, tranche Ghislain Elenga. Il a montré son talent en France, mais il méritait la NBA… » « Tout reste possible à son âge, nuance Maik Prime. Il est épanoui et me demande de l’aider à préparer l’après-basket. Je le vois bien ministre de la Jeunesse et des Sports dans quinze ans ! »
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