Industries extractives : à quand la fin du torchage du gaz ?

Brûler le gaz dégagé par l’exploitation de l’or noir pollue et représente un énorme manque à gagner. Si États et compagnies le reconnaissent, ils ne semblent pas prêts à agir dans l’immédiat.

Publié le 6 juillet 2016 Lecture : 3 minutes.

Un enfant joue près de la mine de cuivre de la Ruashi, au Katanga. 40 000 enfants travaillaient dans les mines de la région, en 2014. © Gwenn Dubourthoumieu pour Jeune Afrique
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Chaque année dans le monde, 140 milliards de mètres cubes de gaz naturel rejetés durant l’exploitation du pétrole sont brûlés, et donc gaspillés. Le torchage du gaz envoie plus de 300 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère, soit l’équivalent des émissions de 77 millions de voitures. Or on pourrait produire 750 milliards de kWh avec ce gaz, un chiffre supérieur à la consommation actuelle de l’ensemble du continent.

Pour remédier à ces problèmes, les dirigeants de grandes compagnies pétrolières et les hauts responsables de pays producteurs d’or noir se sont engagés en 2015 à mettre fin au torchage systématique du gaz d’ici à 2030 au plus tard, à travers l’initiative Zero Routine Flaring by 2030 portée par la Banque mondiale. Mais, un an après cette décision, l’industrie se préoccupe d’enjeux davantage économiques qu’écologiques. La faute à la chute des cours.

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Initiatives encourageantes

« Aujourd’hui, 52 gouvernements, compagnies pétrolières et institutions de développement soutiennent cette initiative. Mais la conjoncture est difficile pour les entreprises, même si beaucoup reconnaissent l’importance d’une direction environnementale forte et d’une gestion des ressources efficace », souligne Bjorn Hamso, directeur de programme du Partenariat mondial pour la réduction des gaz torchés (GGFR).

Les entités qui soutiennent l’initiative représentent plus de 40 % du volume mondial de gaz torchés. « Notre objectif est d’en faire un standard global dans l’industrie pétrolière. Mais pour que le gaz soit réutilisé ou conservé, un temps et des ressources considérables sont nécessaires », ajoute le responsable. Le gaz est encore largement brûlé à la torche pour des raisons techniques, réglementaires, économiques, ou parce que son utilisation n’est pas jugée prioritaire.

L’Angola, le Cameroun, la RD Congo et le Gabon participent au mouvement. En dépit du soutien de Niger Delta Petroleum Resources et de Seven Energy, le Nigeria en reste en revanche le grand absent. Selon le GGFR, il est le deuxième pays au monde en matière de torchage de gaz lors de l’extraction d’hydrocarbures (15 milliards de mètres cubes environ), derrière la Russie (45 milliards de mètres cubes). Et cela bien que cette pratique soit officiellement interdite depuis 1984 dans le pays et qu’elle ait été déclarée « inconstitutionnelle » par la Cour suprême en 2005.

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Hélas, l’État nigérian et les autorités fédérales ont été incapables de faire appliquer les lois. Selon la Banque mondiale, le Nigeria perdrait ainsi chaque année l’équivalent de 2,5 milliards de dollars (2,22 milliards d’euros).

Pourtant, des solutions existent. Au Nigeria, Shell a commencé en 2000 à installer des équipements destinés à capturer 90 % du gaz associé à son exploitation pétrolière. Aujourd’hui, 37 sites en sont pourvus, mais le programme a pris du retard en raison des problèmes de sécurité dans le delta du Niger et du manque de financements. Royal Dutch Shell estime à plus de 6 milliards de dollars le coût global d’un tel projet.

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En Égypte, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) est aux avant-postes pour financer des projets de réduction de torchage du gaz. Quatre compagnies – Merlon, Pico, IPR et Kuwait Energy – ont ainsi reçu des financements pour un total de 200 millions de dollars.

Les solutions retenues ? La construction de centrales d’électricité au gaz, la connexion d’usines de transformation aux pipelines et la création d’unités de gaz de pétrole liquéfié. Sur sa concession d’Abu Sennan, Kuwait Energy s’est ainsi lancé dans la capture du gaz naturel pour alimenter le réseau électrique national.

En Égypte, 2,5 milliards de mètres cubes de gaz sont brûlés chaque année. Éliminer le torchage pourrait permettre d’économiser 300 millions de dollars par an, selon la Berd.

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