Nadine, expatriée chinoise en Algérie : « Soit tu changes, soit tu retournes au pays »

Employée d’une entreprise publique chinoise, Nadine Zhong a construit sa vie et sa famille à Alger. Pas question pour elle de faire ses valises, comme le font de nombreux expatriés autour d’elle.

La jeune femme est fière de son intégration et de celle de sa petite fille. © CHLOÉ RONDELEUX

La jeune femme est fière de son intégration et de celle de sa petite fille. © CHLOÉ RONDELEUX

Publié le 8 juillet 2016 Lecture : 3 minutes.

Avec son français parfait et ses exclamations algériennes, Nadine Zhong a tout l’air d’une Méditerranéenne. L’exubérance en moins, la modération en plus. Un tempérament à l’image de son parcours, à la croisée des chemins. Originaire de la Chine du Sud, cette trentenaire au visage de poupée a atterri en Algérie un matin de l’année 2005.

À peine sortie de l’université avec son diplôme d’interprète en français, elle venait travailler pour une entreprise publique chinoise spécialisée dans le bâtiment, les travaux publics et l’hydraulique. Son premier poste se trouve à Relizane, à 300 km à l’ouest d’Alger, où son entreprise est chargée de construire un système d’irrigation.

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Processus d’intégration

Dix ans plus tard, Nadine Zhong se souvient encore de son arrivée : « Quand je suis descendue du bus, il faisait très chaud, il y avait de la poussière partout et je n’arrivais pas à ouvrir les yeux. C’était la première fois que je voyais un chantier. Ça m’a fait plutôt l’impression d’un cauchemar et j’ai même pensé que j’étais dans un autre monde. » Malgré ces rudes conditions, la jeune femme s’accroche à son poste. « Il fallait que je fasse mes preuves et que je réussisse à tenir jusqu’à la fin du contrat, même si c’était difficile », justifie-t-elle.

L’épreuve des deux ans réussie, son employeur lui offre une promotion : il lui propose de rejoindre la direction générale à Alger, où elle occupe aujourd’hui le poste de sous-directrice du service marketing. C’est là qu’elle rencontre son mari, lui aussi salarié chinois de l’entreprise, arrivé avant elle dans le pays. Ensemble, ils ont une petite fille, qui naît à Alger. Mais aucun d’eux n’est naturalisé, contrairement à 2 000 de leurs compatriotes. La procédure est « très compliquée », selon elle. Pour l’instant, ils renouvellent leurs cartes de séjour tous les deux ans grâce à leurs permis de travail.

Ce qui plaît le plus à Nadine Zhong en Algérie, c’est le climat. « Il y a toujours ce ciel bleu », s’exclame en souriant la jeune femme, vêtue en ce premier jour de l’été d’une marinière à manches courtes. L’autre avantage, ajoute-t-elle après une courte pause, est la proximité avec l’Europe. Dès que des vacances se présentent, la petite famille s’échappe vers la rive nord de la Méditerranée.

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« En Algérie, on mène une vie extrêmement simple et tranquille, entre le travail, la famille et les amis », résume Nadine Zhong. Si le couple vit dans un lotissement partagé avec la communauté chinoise, leur cercle de connaissances comprend également beaucoup d’amis originaires de l’Hexagone depuis que leur fille de 4 ans va à l’école française.

Le mélange des cultures

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« Elle se débrouille très bien avec les trois cultures – chinoise, française et algérienne -, contrairement aux adultes pour qui l’adaptation est plus dure, relève fièrement sa maman. Mieux vaut s’intégrer rapidement et ne pas trop se plaindre. Je dis toujours que le pays et sa société ne vont pas changer, alors soit tu changes toi-même, soit tu retournes en Chine. »

Pour des voyages touristiques, l’Algérie demeure trop fermée

De nature optimiste – « la vie n’en est que plus facile », elle dit ne pas avoir été trop touchée par les affrontements qui ont éclaté en 2009 entre les Algériens et les commerçants chinois dans un quartier de la capitale. Mais pour ces derniers, avec qui elle reconnaît d’ailleurs ne pas avoir beaucoup de liens, « la vie est beaucoup plus dure que pour les salariés des entreprises privées ou publiques », précise la jeune femme.

Avec les années, le lien de Nadine Zhong avec son pays d’origine s’est distendu. « Maintenant que nous sommes une famille, c’est plus difficile d’y retourner régulièrement, souligne-telle. Si j’ai moins d’un mois de congés, je ne rentre pas, c’est trop fatigant. » Parmi son entourage en Chine, seuls ses parents sont venus lui rendre visite en Algérie. « Mais ils n’ont pas réussi à rester longtemps à cause de la différence de culture et des problèmes de communication. » Pour des voyages touristiques, l’Algérie demeure trop fermée, remarque-t-elle, en pointant que depuis le 1er juin les Chinois n’ont plus besoin de visa pour se rendre au Maroc.

Combien de temps encore va-t-elle rester en Algérie ? Elle est incapable de répondre à cette question. Mais elle sait que, depuis la récession économique liée à la chute des prix du pétrole, la situation s’est compliquée. Beaucoup de ses amis expatriés, chinois, français ou italiens, ont d’ailleurs fait leurs valises. C’est dommage, ponctue-t-elle, toujours avec modération.

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