Cameroun : Nathan Wounembiana, le volley avant tout

Pilier de la sélection nationale camerounaise, capitaine de Chaumont, ce volleyeur poursuit en France une carrière qui l’a vu passer par l’Algérie, l’Égypte et la Belgique.

Pour se ressourcer et se reposer, l’athlète retourne parfois au pays, où il investira sans doute un jour. © Fred Porcu/Icon sport

Pour se ressourcer et se reposer, l’athlète retourne parfois au pays, où il investira sans doute un jour. © Fred Porcu/Icon sport

Alexis Billebault

Publié le 11 juillet 2016 Lecture : 4 minutes.

À Chaumont, quand un passant culmine à plus de 1,90 m et qu’il promène une allure encore jeune, la question ne se pose pas. Il s’agit, sauf exception, d’un joueur de l’équipe de volley-ball, membre de la Ligue A française, dont elle est devenue l’une des valeurs sûres. Nathan Wounembaina, avec son 1,98 m, sa démarche nonchalante et sa casquette noire vissée sur le crâne, ne passe pas inaperçu, comme ses deux coéquipiers serbe (Milos Terzic) et bosnien (Gojko Cuk), qu’il croise brièvement au Parisien, le bar branché du centre-ville de la préfecture de la Haute-Marne (23 000 habitants).

Un fort attrait pour les petites villes

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« Ici, c’est relativement tranquille. Les gens nous reconnaissent, car l’équipe est très suivie, mais ils sont respectueux. J’aime bien les petites villes. Il n’y a pas grand-chose à faire, et ça a l’avantage de t’obliger à te concentrer sur ton métier. Et puis si on veut bouger, il y a Dijon, Nancy, Troyes et même Paris qui ne sont pas très loin », explique le Camerounais de 31 ans, qui achève sa troisième saison au Chaumont VB 52.

L’explication rationnelle de ce net penchant pour la quiétude des petites villes de province – il a joué à Bordj Bou Arreridj, en Algérie, puis à Zellik et à Maaseik, en Belgique – n’est pas difficile à trouver. Wounembaina est né à Bourha, une commune de l’Extrême-Nord du Cameroun, à quelques kilomètres de la frontière avec le turbulent voisin nigérian.

« C’est une zone très pauvre. L’électricité est arrivée il n’y a pas si longtemps. Moi, j’ai eu la chance de grandir dans une famille certes nombreuse [neuf enfants], mais qui ne manquait de rien. Mon père était pasteur – il est désormais retraité -, ma mère ménagère. » Aujourd’hui, ses parents sont installés à Garoua, plus sécurisée et moins exposée aux attaques terroristes des illuminés de Boko Haram.

Débuts de carrière en Algérie

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À Bourha, le jeune Nathan pratique le foot, le basket, et surtout le volley. « Un de mes frères et une de mes sœurs y jouaient, se souvient-il. Mais pour mes parents, la priorité devait être donnée aux études. Pour mon père, surtout, qui était très strict sur ce point. Et puis, au Cameroun, on ne peut pas faire une carrière professionnelle. Il n’y a pas de moyens. »

Avec le Port de Douala, Wounembaina goûte au haut niveau local. Mais le réceptionneur-attaquant sait que son avenir passe par l’exil. « Avec l’un de mes coéquipiers, Valéry Tatsi, on a envoyé des vidéos de mes matchs à Bordj Bou Arreridj, un club algérien. On m’a proposé un contrat professionnel, à 15 000 euros par an. Mes parents n’étaient pas très chauds pour que j’y aille. J’ai abandonné mes études et j’ai pu jouer dans un championnat d’un niveau correct, dans des salles pleines. »

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Le séjour algérien, parfois perturbé par des retards dans le versement des salaires – « je crois même que j’ai laissé un ou deux mois là-bas… » – s’achève au bout d’une saison, le temps de s’être fait remarquer par Talae el-Geish, un club égyptien du Caire.

Un talent remarqué

« Le troisième du pays derrière Al-Ahly et Zamalek. J’ai doublé mon salaire, mais Le Caire… [Silence]. C’est une ville difficile, tentaculaire, avec pas mal de délinquance. Je sortais peu. J’allais à l’église, et je n’ai jamais senti d’hostilité par rapport à ma chrétienté. En revanche, les cris de singe dans les salles lors des matchs, ou dans la rue, c’est arrivé. Mais comme je suis fort, et comme je considérais que l’Égypte était un bon tremplin pour l’Europe, je me suis accroché pendant deux ans, entre 2007 et 2009. »

Lex Thevissen, un agent néerlandais qui a suivi le Championnat d’Afrique 2007 en Afrique du Sud, où le Cameroun a terminé troisième, lui déniche ensuite un contrat d’un an au Asse-Lennik, dans la banlieue de Bruxelles. Puis un autre de trois ans au Noliko Maaseik, en Flandre. « J’ai gagné deux fois le championnat, une fois la Coupe et la Supercoupe de Belgique. »

Chaumont a été attiré par son profil lors d’un match amical

C’est à cette période qu’il se fait remarquer par Chaumont, à l’occasion d’un tournoi estival de préparation. « On cherchait un réceptionneur-attaquant et on a été attiré par son profil lors d’un match amical. On s’est renseignés. Comme le Cameroun fait partie des meilleures sélections africaines, nous lui avons fait une proposition.

Cela fait trois ans qu’il est à Chaumont, il en est devenu le capitaine et un joueur très important, tant sur le terrain qu’en dehors », explique Bruno Soirfeck, le président chaumontais. À un moment, Wounembaina a eu besoin de partir deux longs mois à Garoua… « Parce que je voulais me reposer et me ressourcer, explique l’athlète.

Je n’envisage pas de m’installer au Cameroun après ma carrière, car je pense à l’avenir de ma fille, qui a 3 ans. Mais y investir, oui. Dans l’exportation de champagne ou en ouvrant un restaurant à Yaoundé… » Son père, fier du parcours de son fils, lui a pardonné depuis longtemps d’avoir préféré le volley aux études…

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