RD Congo : le port maritime de Matadi se cherche un avenir
Malgré un potentiel considérable, ce port maritime, principale porte d’entrée du pays, peine à relancer son activité. Et la libéralisation de la manutention portuaire pourrait aggraver la situation.
RD Congo : défis majeurs
Au-delà des incertitudes politiques, une nouvelle génération arrive dans la vie publique au moment où le pays a redessiné ses frontières intérieures. Autant de challenges à relever.
L’ambiance est morose au port de Matadi, géré par la Société commerciale des transports et des ports (SCTP), détenue par l’État. Le trafic du port fluvial, principale porte d’entrée de la RD Congo, stagne depuis 2013, avec environ 2,9 millions de tonnes chaque année, dont les deux tiers sont importées. Pourtant, dans la capitale Kinshasa – à laquelle Matadi est reliée par route et par rail –, où vivent plus de 18 millions d’habitants, les besoins en produits manufacturés explosent.
Un potentiel sous-exploité
Situé dans la province du Kongo central, dont le potentiel agro-industriel est considérable mais sous-exploité, Matadi pourrait traiter des quantités importantes de marchandises agricoles. Mais, en 2015, seules quelques dizaines de milliers de tonnes de blé, de caoutchouc et de cacao, pour la plupart produits en dehors de la région, y ont transité. « Le bois, descendu de la province de l’Équateur, est le premier produit d’exportation du port fluvial, avec 112 707 tonnes de grumes », indique Lephtaly Mavinga, chargé de la communication au port de Matadi.
Derrière ces performances en demi-teinte, plusieurs soucis logistiques. D’abord, la Congolaise des voies maritimes (CVM), avec laquelle la SCTP entretient des relations difficiles, peine à réaliser les opérations de dragage du fleuve Congo. Résultat, Matadi ne peut actuellement recevoir que des navires de 6 mètres de tirant d’eau.
Autre difficulté, le goulet d’étranglement logistique : « En dépit du redémarrage du rail à la mi-2015, seulement 2 % des marchandises transitent par voie ferrée. Tout le reste emprunte encore la route. La SCTP ne dispose que de cinq locomotives très anciennes. Nous en attendons de nouvelles avec impatience », explique Lephtaly Mavinga, qui regrette le temps où le réseau ferroviaire reliait Matadi à la province minière du Katanga en passant par le Kasaï.
Ces projets qui pourraient fragiliser Matidi
Si à Matadi les équipes de la SCTP, premier employeur de la ville avec plus de 1 100 salariés, ont la mine des mauvais jours, c’est aussi parce qu’elles craignent d’être délocalisées. Un terminal mixte traitant les conteneurs, le trafic roulier ainsi que les colis lourds et volumineux sera bientôt construit par le groupe de manutention philippin ICTSI, juste en amont de Matadi, sur la rive nord du fleuve. Et il pourrait faire de l’ombre aux installations actuelles. Avec 10 % des parts, la SCTP n’en sera qu’actionnaire minoritaire.
Un autre projet est à l’étude : un port en eau profonde au large de Banana, à l’embouchure du fleuve, ainsi que la construction d’une voie ferrée qui le reliera à Kinshasa via Matadi. Un groupe chinois – dont l’identité n’a pas été divulguée – aurait été retenu pour la construction.
Les noms des sociétés chargées de la future exploitation de ces deux terminaux n’ont pas été arrêtés, mais la SCTP s’inquiète d’une éventuelle attribution de leurs concessions à un groupe international, tel Bolloré, opérateur du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville, le concurrent de Matadi. Le groupe français organise déjà depuis Pointe-Noire un important trafic de transbordement vers Matadi, via des navires de faible tirant d’eau qui parcourent aisément les 145 km de fleuve depuis l’embouchure.
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