Karim Ouellet : « Je croise les doigts pour donner un spectacle à Dakar »

Chouchou du public québécois qui a fait la première partie de Stromae, l’artiste sort un troisième album. Paroles sombres sur mélodies pop accrocheuses.

Un rêve	: que sa tournée l’entraîne sur les routes de l’Afrique francophone. © Francois Nadeau pour JA

Un rêve : que sa tournée l’entraîne sur les routes de l’Afrique francophone. © Francois Nadeau pour JA

Publié le 28 juillet 2016 Lecture : 4 minutes.

Mêlant pop, reggae, soul et rock, Karim Ouellet s’est forgé une signature musicale à son image : éclectique et maîtrisée. Chouchou du public québécois, il a fait les premières parties de Stromae et de Matthieu Chedid et il est devenu en quelques années la carte gagnante de bien des festivals d’été, dans la Belle Province comme en France. Malgré son jeune âge et un parcours qui semble fulgurant, Ouellet tient à préciser qu’il récolte là le fruit de plusieurs années de labeur. « Le succès ne me tombe pas dessus, dit-il. Il y a tout un travail derrière. Mes parents comme ma famille sont fiers et contents, mais ils ne sont pas surpris. »

Casquette vissée sur le crâne, large sourire et regard volontaire, ce tout juste trentenaire paraît à peine entré dans la vingtaine. Invoquant un emploi du temps serré, le jeune auteur-­compositeur-interprète précise poliment que l’entretien ne pourra dépasser les vingt-six minutes. Pour la bonne raison qu’il participe aux Francofolies de Montréal et doit filer au Metropolis pour ses tests son. Il compte interpréter pour la première fois son troisième et nouvel album, Trente.

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« Perfectionniste »

« Je suis confiant, ça fait six mois que je travaille là-dessus. » Que ce soit pour ses arrangements, ses mélodies, ses textes, et même ses interprétations, ce touche-à-tout se dit volontiers « perfectionniste ». « Je suis plus à l’aise quand tout est réglé au millimètre, quand on sait ce qu’il va se passer. Mais seulement dans la musique. Ça ne me dérange pas si le ménage n’est pas fait chez moi… », plaisante-t-il.

J’ai reporté la sortie du nouvel album deux fois, parce que je voulais un produit qui me plaise à 100 %

Sur scène, l’artiste tient à faire partager son univers à ses fans. « J’ai une metteuse en scène, Émilie Laforest, qui concrétise mes idées, mais je participe beaucoup à l’élaboration du show. » Karim Ouellet puise son inspiration dans les « aléas de sa vie personnelle et de [ses] relations ». Ses influences musicales varient largement du hip-hop américain au reggae jamaïcain, en passant par le blues, la musique québécoise et la chanson française.

Sa recherche de la perfection vaut pour la scène comme pour la réalisation de Trente, conçu avec son ami et partenaire musical Claude Bégin, qui l’accompagne depuis le début. « Après Fox, l’album précédent, j’ai fait trois ans de tournée, mais je n’écris pas sur la route. Quand j’ai commencé à composer, j’ai pris mon temps. J’ai reporté la sortie du nouvel album deux fois, parce que je voulais un produit qui me plaise à 100 %. »

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Le résultat est plus que satisfaisant : des paroles parfois sombres qui évoquent le doute, l’avenir, la mort, l’angoisse et qui contrastent avec des mélodies rythmées, pop, accrocheuses, « funky ». Son single Karim et le loup exprime cet univers propre qui le distingue clairement des autres artistes francophones de sa génération, où le rêve, la réalité, le monde enfantin et les inquiétudes d’adulte se télescopent dans une création artistique originale et imagée. Le dessin qui habille sa pochette, où l’on voit un Karim Ouellet enfant dans un costume de monstre tenant un ballon rouge au milieu de la forêt, illustre d’ailleurs ce monde fantasmagorique.

Débuts modestes 

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Né à Dakar en 1984, Karim a quitté le Sénégal à l’âge de 5 ans. Il a grandi dans une famille de diplomates québécois et, très tôt, les voyages ont fait partie de sa vie : Tunisie, Rwanda, France. De 13 à 16 ans, il retournait régulièrement à Dakar.

En 2002, ses parents adoptifs rentrent au Québec. L’adolescent se perfectionne alors à la guitare, son instrument de prédilection, et, dès 2007, il participe aux Francofolies de La Rochelle puis à la Francoville de Bordeaux l’année d’après. Au Québec, le jeune chanteur collabore au groupe de hip-hop CEA et au collectif Movezèrbe, tout en enchaînant les concours : finaliste au Festival de la chanson de Granby 2009 et finaliste aux Francouvertes en 2011, il lance la même année son premier album, Plume, avec un succès mitigé.

C’est son deuxième opus, Fox, sorti l’année suivante, qui le propulsera sur le devant de la scène musicale francophone avec près de 35 000 exem­plaires vendus. Cinq de ses singles tourneront régulièrement sur les radios, dont le populaire L’Amour. Il enchaîne alors succès, prix et rencontres musicales majeures. Il est la Révélation de Radio-Canada 2012-2013, remporte le prix Félix-Leclerc 2013 et le Juno de l’album francophone de l’année 2014. Il sera nominé sept fois au gala de l’Adisq, l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo.

Bientôt en Afrique

En 2017, le chanteur prévoit de se produire à travers le Québec, tout en regardant vers l’Europe et l’Afrique francophone. « Pour l’Afrique, les opportunités ne se présentent pas vraiment, regrette-t-il. Mais ça m’intéresserait énormément de faire une tournée là-bas, d’aller jusqu’en Tunisie, au Maroc, en Algérie. Peut-être qu’il faut attendre la percée européenne avant qu’on pense à moi… On verra bien. »

Même si l’artiste avoue ne plus avoir aucune attache personnelle sur le continent, son rêve demeure de partir y chanter. « Je croise les doigts pour donner un spectacle à Dakar, confie-t-il. Je vais voir si c’est possible. C’est un objectif que je veux absolument réaliser. »

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