Donald Trump et le déclin de l’empire américain

Les Américains sont capables de tout ! De porter un Noir à la Maison Blanche et peut-être une femme, demain, si Hillary Clinton l’emporte. Mais aussi, hélas, d’élire Donald Trump…

Donald Trump lors d’un discours à San Jose (Californie, États-Unis), le 2 juin 2016. © Jae C. Hong/AP/Sipa

Donald Trump lors d’un discours à San Jose (Californie, États-Unis), le 2 juin 2016. © Jae C. Hong/AP/Sipa

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Publié le 25 juillet 2016 Lecture : 3 minutes.

Donald Trump au soir de son élection, serrant la main de son futur vice-président Mike Pence , le 9 novembre 2016. © Evan Vucci/AP/SIPA
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Trump, 45e président des États-Unis

Donald Trump a remporté mercredi 9 novembre l’élection présidentielle américaine, coiffant au poteau sa concurrente démocrate Hillary Clinton et succédant ainsi à Barack Obama à la Maison Blanche.

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C’est désormais officiel : il a été désigné, ce 19 juillet, candidat des républicains à la présidentielle de novembre prochain. Largement, faut-il préciser, puisqu’il a obtenu le vote de 1 725 délégués sur un total de 2 472, malgré l’opposition d’une partie de l’establishment du parti conservateur.

Que de chemin parcouru, depuis juin 2015, pour ce magnat de l’immobilier devenu le symbole d’un populisme qui a décidément le vent en poupe. À l’époque, lorsqu’il a annoncé qu’il se lançait dans la course aux primaires, tout le monde se gaussait : le natif de Brooklyn n’était crédité que de 1 % seulement des intentions de vote. Un an plus tard, il est au coude à coude avec Hillary dans les sondages après avoir terrassé ses seize concurrents républicains.

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Ovni politique

Longtemps sous-estimé ou moqué, à tort, Trump est un ovni politique, y compris pour son propre camp, plutôt habitué aux candidats lisses et bien coiffés. Sa recette est simple : culte de l’identité nationale et xénophobie, mise au pilori des élites dirigeantes jugées responsables du déclin de la nation, repli sur soi et art consommé de la transgression, voire de la provocation.

Trump est le symptôme de la peur qui étreint l’Amérique. Plus surprenant, le milliardaire à la mèche filasse et au teint d’orange californienne s’est attaqué, avec succès, à un nombre incroyable de barrières psychologiques réputées intouchables aux États-Unis, comme le libre-échange ou l’accueil des immigrés.

C’est un candidat hors système, jamais élu, self-made-man politique qui est allé beaucoup plus loin dans ses discours que des Reagan ou des Bush (père et fils), pourtant réputés très « à droite ». Il attaque la mondialisation, cause de la désindustrialisation de son pays selon lui, et s’adresse ainsi aux millions de « petits Blancs » des classes populaires ou moyennes victimes de la crise, urbains comme ruraux.

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Il promet le plus pur protectionnisme, lie immigration et terrorisme en mettant à l’index les musulmans, stigmatise les clandestins mexicains, crie haro sur les importations chinoises et propose de sortir de l’Otan. Il est aussi l’antithèse de ce qui a jusqu’ici toujours séduit les électeurs américains, cet optimisme quasi béat vantant la toute-puissance de l’empire américain, seriné par des générations entières de dirigeants.

Il y a du Le Pen en Trump, qui apporte une petite touche d’Europe dans la vie politique nationale

Le titre de son livre-programme dit tout : L’Amérique paralysée. Bref, tout fout le camp, c’était mieux avant (entre bons petits WASP), mais je vous promets de restaurer la grandeur de l’Amérique… Il y a du Le Pen en Trump, qui apporte une petite touche d’Europe dans la vie politique nationale. Impensable il y a quelques années seulement.

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Peut-il gagner ? Le simple fait de poser la question fait froid dans le dos, mais rien ne peut plus être exclu aujourd’hui. A fortiori dans un pays où l’abstention a toujours été forte, alors qu’il semble que Trump mobilise des gens qui, jusqu’ici, ne se donnaient pas la peine de voter.

Et parce que son adversaire, pas franchement nouvelle dans le Landerneau, incarne tout ce qu’il dénonce et qui exaspère bon nombre de leurs concitoyens : les dynasties politiques, les candidats du système qui vivent dans leur tour d’ivoire, mais aussi ceux des lobbies.

Le décalage entre une partie de la population et ses politiciens est de plus en plus profond. Il est en tout cas ressenti comme tel, même si ce n’est pas l’apanage des États-Unis. Le climat économique, social et politique est particulièrement délétère, le malaise réel.

Autant de paramètres en sa faveur. Et s’il ne faut jamais sous-estimer la formidable capacité de ce pays à se régénérer et à nous surprendre, la vague Trump, qui a ébranlé tant de certitudes, laissera des traces, qu’il soit élu ou non. Le populisme, qui se nourrit de la crise et de la défiance grandissante des électeurs pour leurs élites, a de beaux jours devant lui…

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