Hillary Clinton, une alliée de poids pour la Tunisie

À la différence de ses voisins marocain et algérien, très représentés sur la colline du Capitole, qui abrite le Congrès des États-Unis, la Tunisie ne dispose pas de lobbyistes attitrés à Washington.

Hillary Clinton, lors des commémorations du 11 Septembre, à New York. © Andrew Harnik/AP/SIPA

Hillary Clinton, lors des commémorations du 11 Septembre, à New York. © Andrew Harnik/AP/SIPA

ProfilAuteur_SamyGhorbal

Publié le 7 octobre 2016 Lecture : 3 minutes.

Le réseau informel le plus actif est Tunisian American Young Professionals (TAYP), présidé par Mohamed Malouche, consultant chez Deloitte. Il a entrepris de sensibiliser les décideurs américains à la cause tunisienne. En l’espace de cinq ans, TAYP a réussi à s’imposer comme un interlocuteur incontournable et a tissé des liens privilégiés avec l’entourage de Hillary Clinton.

Deux membres du board de TAYP, Shelly Porges et Kris Balderston, sont d’anciens collaborateurs de la candidate démocrate. Porges a été conseillère principale du Global Entrepreneurship Program du département d’État américain et a conduit des levées de fonds au profit de la candidature Clinton. Balderston a travaillé aux côtés de Hillary en qualité de chef de cabinet adjoint quand cette dernière était sénatrice de l’État de New York et l’a suivie au département d’État, entre 2009 et 2013.

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Clinton et la sortie de la crise tunisienne

À en croire Mohamed Malouche, cette proximité est d’abord le fruit de circonstances exceptionnelles : « Hillary Clinton a immédiatement saisi l’ampleur de ce qui se jouait en Tunisie pendant la révolution, elle a réagi immédiatement en envoyant son sous-secrétaire d’État Jeffrey Feltman, qui a été le premier responsable occidental à nouer des contacts directs avec les autorités de la transition, dès le 25 janvier 2011, alors que les Français, par exemple, étaient encore englués dans l’affaire Alliot-Marie. »

Même si la coopération s’est intensifiée au cours du second mandat de Barack Obama – 140 millions de dollars d’aide ont été budgétés pour 2017, dont une moitié consacrée à l’aide militaire et à la lutte antiterroriste –, c’est Hillary qui a inscrit la Tunisie sur l’agenda du département d’État. Elle a donné l’impulsion aux programmes du Tunisian American Enterprise Fund (doté de 100 millions de dollars) et des bourses universitaires d’échange Thomas Jefferson.

Le tropisme tunisien de la candidate démocrate remonte à la fin des années 1990. Celle qui était encore First Lady s’était rendue en visite privée en Tunisie avec sa fille, Chelsea, pour « oublier » les tourments de l’affaire Monica Lewinsky et fuir les paparazzis. « Ce voyage l’a marquée et reste pour elle un excellent souvenir, raconte Mohamed Malouche. Il lui a permis de découvrir à la fois la richesse de la civilisation du pays, la vitalité de sa société civile et le rôle joué par les femmes. »

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Si les décideurs tunisiens ont bien conscience de disposer d’une alliée de poids en la personne de Hillary Clinton, celle-ci souffre néanmoins d’un déficit d’image auprès de l’opinion publique. Son amitié affichée pour Israël et une orientation diplomatique jugée à l’époque « trop compréhensive » envers les Frères musulmans nourrissent les préventions de la mouvance nationaliste.

Le plan imprécis de Trump

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Paradoxalement, Donald Trump, le trublion islamophobe, suscite davantage de curiosité que de rejet. Son indépendance supposée vis‑à-vis des lobbys et la tonalité isolationniste qu’il entend donner à la diplomatie américaine plaident en sa faveur aux yeux d’une population fatiguée des ingérences de l’Oncle Sam dans le monde arabe. Rien ne garantit cependant qu’il restera sur cette ligne s’il est élu.

L’issue du scrutin du 8 novembre demeure très indécise. Que se passerait-il si le candidat républicain venait à l’emporter ? C’est la grande inconnue. Trump est moins à l’aise que Clinton sur les questions étrangères, qui ne se prêtent pas aux simplifications qu’il affectionne. Il n’a en réalité ni vision ni doctrine bien arrêtées.

« Il ne faut préjuger de rien, estime Mohamed Malouche, mais le plus probable est qu’il ne s’impliquera pas beaucoup. Si la Maison Blanche est en retrait, alors, mécaniquement, le rôle du Congrès pourrait devenir central dans la fabrication de la politique étrangère. » Le sénateur républicain John McCain est l’un des plus au fait du dossier tunisien. Il entretient un dialogue régulier à la fois avec les autorités et avec les dirigeants du parti islamiste Ennahdha. Mais ses relations avec Trump sont compliquées.

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