Mohamed Tozy : « Au Maroc, Trump est une sorte d’ogre inconnu »

À l’extrême occident du monde arabe, le royaume chérifien cultive depuis son indépendance sa proximité avec Washington. L’issue de la présidentielle américaine est-elle attendue avec anxiété à Rabat ? Réponse et explications du politologue et sociologue marocain Mohamed Tozy.

Le couple Clinton recevant le roi Mohammed VI et la princesse Lalla Meriem, le 20 juin 2000, à la Maison Blanche. © Ron Sachs/cnp/sipa/rea

Le couple Clinton recevant le roi Mohammed VI et la princesse Lalla Meriem, le 20 juin 2000, à la Maison Blanche. © Ron Sachs/cnp/sipa/rea

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 9 octobre 2016 Lecture : 2 minutes.

Donald Trump au soir de son élection, serrant la main de son futur vice-président Mike Pence , le 9 novembre 2016. © Evan Vucci/AP/SIPA
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Trump, 45e président des États-Unis

Donald Trump a remporté mercredi 9 novembre l’élection présidentielle américaine, coiffant au poteau sa concurrente démocrate Hillary Clinton et succédant ainsi à Barack Obama à la Maison Blanche.

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Jeune Afrique : Qui de Trump ou de Clinton a la préférence du pouvoir, que l’on dit généralement bien disposé à l’égard des républicains ?

Mohamed Tozy : Le royaume a construit une relation forte avec les congressistes des deux bords, qui est en effet un peu plus forte avec les républicains. Mais pour cette élection, Hillary Clinton est un cas particulier : elle a fait plusieurs visites au Maroc en tant que première dame puis comme secrétaire d’État, c’est une habituée.

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Il y a donc une certaine appétence pour sa personne, et l’on compte sur sa connaissance du pays et en particulier du dossier du Sahara. Par contre, Trump est un inconnu. Mais les relations bilatérales étant très institutionnalisées au niveau du Congrès, de son groupe d’amitié, des relations d’affaires, etc., les responsables s’en accommoderaient sans problème.

Le Sahara, un dossier crucial pour les relations bilatérales ?

En effet, et c’est pourquoi le Maroc essaie de cultiver une certaine influence auprès du Congrès.

L’élection de l’un ou de l’autre aura-t‑elle une incidence différente sur les relations entre les deux pays ?

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Les orientations ne changeront pas énormément, les politiques engagées sur le terrain se poursuivront, et je ne pense pas que les grands domaines de coopération seront impactés, notamment sur les plans militaire et sécuritaire. À la marge, il se peut que Trump ne veuille plus financer le programme de planning familial ou que Hillary Clinton soutienne davantage l’éducation des femmes par exemple, mais l’aide américaine au Maroc a une importance relativement marginale comparée à ce qu’elle peut être pour l’Égypte ou pour Israël.

Trump n’a-t‑il pas outré les Marocains avec ses déclarations islamophobes ?

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La campagne américaine ne s’invite pas trop dans le débat national. Pour ceux qui suivent de loin les affaires américaines, Trump est une sorte d’ogre inconnu dont les déclarations islamophobes et anti-immigration ont en effet sonné négativement. Reste que le principal sujet de méfiance est le département d’État, qu’il soit démocrate ou républicain, dont un rapprochement avec le conservatisme musulman, y compris le salafisme, pourrait se traduire en pressions pour leur intégration politique.

Mais les États-Unis n’ont pas la capacité au Maghreb d’agir sur les rapports de forces locaux, ils peuvent les suivre et les accompagner, mais ils ne peuvent pas les fabriquer comme au Moyen-Orient. Les niveaux d’intervention ne sont pas les mêmes.

Enfin, ce que considèrent avant tout les Marocains, c’est la position internationale des États-Unis. Ils sont conscients que la révision à la baisse du statut impérial américain dans la région par Obama sera maintenue par Trump et ne se font pas d’illusions sur l’acceptation du poids de plus en plus important pris par la Russie au Moyen-Orient et sur la renonciation à un rôle plus actif pour le règlement du dossier palestinien.

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