Maroc – Abdelali Hamidine : « Benkirane va rempiler. Nous n’avons aucun doute là-dessus »

Abdelali Hamidine, 45 ans, vice-président du conseil national du PJD, qui compte 107 députés. Objectif : plus de 115 sièges, « arriver premier » et diriger à nouveau le gouvernement.

Abdelali Hamidine, vice-président du PJD. © Alexandre Dupeyron pour JA

Abdelali Hamidine, vice-président du PJD. © Alexandre Dupeyron pour JA

fahhd iraqi

Publié le 5 octobre 2016 Lecture : 5 minutes.

PAM El Aouni dans son QG de campagne quartier Al Manal – rabat © Alexandre Dupeyron pour JA
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Élections législatives au Maroc : la lutte est féroce

Le 7 octobre, les Marocains éliront le parti qui dirigera le prochain gouvernement pour une durée de cinq ans. Entre les deux favoris, les islamistes du PJD et les libéraux du PAM, la lutte est féroce.

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Jeune Afrique : Comment avez-vous réagi à la marche « contre l’islamisation de la société », le 18 septembre à Casablanca, au cours de laquelle le Premier ministre Benkirane et le PJD ont été vilipendés ?

Abdelali Hamidine : Ce fut une marche bâtarde dont tout le monde a nié la paternité. Même le ministre de l’Intérieur a déclaré ne pas connaître l’identité des « instigateurs » avec leurs slogans importés du contexte égyptien et totalement étrangers aux Marocains. Les témoignages de plusieurs participants, relayés par les sites d’information, nomment parfois des auxiliaires de l’État et des candidats de certains partis de l’opposition, notamment le PAM et l’USFP.

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Ces témoins ont affirmé que lesdites personnes ont assuré la logistique et les moyens de transport. Certains participants croyaient être dans cette marche pour dénoncer le terrorisme, défendre la marocanité du Sahara, voire soutenir une jeune fille marocaine maltraitée en Arabie saoudite… D’ailleurs, des participants se sont retirés de la marche dès qu’ils ont compris la supercherie.

La popularité de votre parti n’est-elle pas menacée ?

Au contraire ! Nous pensons que les intentions de vote ont augmenté de façon très perceptible en faveur du PJD. Il n’y a qu’à voir les 20 000 personnes venues de tout le Maroc avec un grand enthousiasme pour participer au meeting d’ouverture de la campagne. Finalement, cette marche a été un échec retentissant pour ses instigateurs. C’est une énième preuve que certains apprentis sorciers ne saisissent pas la profonde mutation que connaît notre société : ils croient toujours que l’on peut abrutir le Marocain, de manière à perpétuer la corruption et le totalitarisme.

Êtes-vous toujours confiant quant à une nouvelle victoire du PJD aux législatives ?

Nous n’avons aucun doute là-dessus. Le PJD sera en tête lors des prochaines élections, avec plus de 115 sièges à la Chambre des représentants. Notre confiance est fondée sur des indicateurs objectifs: le PJD dirige plusieurs grandes villes du royaume depuis les dernières élections communales tenues l’année dernière, à l’issue desquelles notre parti a récolté 1,8 million de voix, et, d’après ce que nous savons, tous les sondages d’opinion nous donnent déjà vainqueurs. Cela dit, il y a des indices qui laissent supposer que les mêmes apprentis sorciers essaieront d’user de moyens antidémocratiques afin d’empêcher l’évolution politique en cours dans notre pays.

Vous faites référence au Parti Authenticité et Modernité (PAM), votre principal challenger pour ces élections?

Le PAM est un parti qui souffre d’une malformation politique grave depuis sa naissance. Il a été constitué par un ancien secrétaire d’État qui a été rejoint plus tard par un mélange d’individus issus de tous horizons, de l’extrême droite à l’extrême gauche, dont une bonne partie ne cherche qu’à défendre ses intérêts personnels et à avoir une proximité avec les cercles du pouvoir.

Le bilan du gouvernement est très satisfaisant au regard du contexte politique et économique

Le tahakoum, cette « force de l’ombre », est un terme qui revient de plus en plus souvent dans le discours électoral du PJD et de ses alliés. Par qui est-il mené précisément ? Et comment se matérialise-t-il concrètement ?

Le tahakoum n’est pas un concept nouveau. Il a toujours été utilisé pour signifier des poches d’influence puissantes et proches des cercles du pouvoir. Cette puissance intermédiaire peut souvent être instrumentalisée pour servir d’autres intérêts. Aujourd’hui, c’est le PAM qui symbolise le tahakoum.

Cela est dangereux à la fois pour les intérêts de l’État et pour la société. Il faut en prendre conscience et y faire face. À la veille des élections, plusieurs candidats aux prochaines législatives ont subi des pressions pour se présenter sous la bannière du PAM, au détriment de leur appartenance politique d’origine, ou pour retirer leur candidature afin de ne pas concurrencer le candidat boiteux du PAM.

Vos adversaires politiques critiquent souvent le bilan du gouvernement Abdelilah Benkirane. Qu’en pensez-vous ?

Au contraire, nos adversaires évitent le débat sur ce sujet. Ils cherchent à le placer sur le champ de la vie privée, à défaut d’avoir de solides arguments pour critiquer la performance du gouvernement sous la direction de Benkirane. Et pour cause ! Le bilan du gouvernement est très satisfaisant au regard du contexte politique et économique.

Ses réalisations sont nombreuses : on peut citer entre autres le retour du fonctionnement normal du service public, ponctué auparavant par des grèves à répétition ; la mise en place du principe d’égalité des chances et l’obligation de rendre des comptes; l’amorce de la réforme des retraites ; la décompensation des produits pétroliers ; le retour aux équilibres macroéconomiques… Et bien d’autres défis que nous avons relevés grâce à la concertation, car ça n’est pas le bilan d’un seul parti, mais celui d’une alliance gouvernementale qui réunit quatre formations.

Avec l’exercice du pouvoir, le PJD n’est-il pas devenu un parti comme les autres ?

Nous sommes un parti qui s’est renforcé au fil du temps grâce à son militantisme et à ses sacrifices. Nous sommes intransigeants sur notre indépendance dans l’action partisane. Mais, en même temps, nous croyons au travail d’équipe et évitons autant que possible la confrontation et la surenchère. Nous aurions pu, par exemple, conditionner notre participation aux prochaines élections à la nécessité de révéler les noms des partis à l’initiative de la marche organisée contre nous. Mais cela aurait pu aboutir à une crise qui n’aurait pas servi les intérêts supérieurs de notre pays.

Le processus de sélection des candidats PJD aux législatives a suscité des critiques de la part de militants…

C’est quelque chose de tout à fait normal dans un parti démocratique. La procédure d’accréditation adoptée n’entraîne pas toujours des résultats à même de satisfaire tout le monde. Mais c’est bien parce que nous sommes démocratiques en interne que les bases ont pu émettre des critiques. Celles-ci restent très limitées, et ne remettent pas en cause la réussite de l’ensemble du processus.

En cas de victoire du PJD, avec qui pour- rait-il s’allier pour former une majorité gouvernementale ?

Il y a unanimité au sein du parti : notre seul candidat pour diriger le gouverne- ment est Abdelilah Benkirane. Quant aux alliances possibles, la porte reste ouverte à tous les partis, à l’exception du PAM. C’est une décision qui a été adoptée à l’unanimité par le secrétariat général du PJD.

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