Au marché aux fétiches de Lomé, on traite avec les esprits

Témoin de la tradition vaudoue, le marché aux fétiches de Lomé reste unique pour trouver les remèdes prescrits par les guérisseurs. Même s’il est devenu touristique.

Crânes de chat pour ne pas perdre la mémoire, 
os de hibou pour conjurer le mauvais sort& © Aprésent pour JA

Crânes de chat pour ne pas perdre la mémoire, os de hibou pour conjurer le mauvais sort& © Aprésent pour JA

Publié le 20 octobre 2016 Lecture : 2 minutes.

Vue de la ville de Lomé. © Jacques Torregano pour Jeune Afrique
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=Sur les étals de ce marché pas comme les autres, on ne trouve ni tomates ni oignons, mais des carcasses d’oiseaux, des cornes de bœuf et de la poudre de peau de serpent. Situé à Akodésséwa, quartier Est de la ville, le marché aux fétiches de Lomé – surnommé « marché aux têtes » pour la grande variété de crânes d’animaux que l’on peut s’y procurer – est célèbre dans toute la sous-région.

« Ici, nous sommes tous béninois. Le marché s’est installé au Togo en 1946 et s’est progressivement développé, explique l’un des guides-commerçants. Les clients viennent ici après avoir consulté un féticheur. Les restes d’animaux qu’ils achètent sont ensuite réduits en poudre, mélangés à des herbes médicinales, puis ingérés ou inoculés.

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Provenance douteuse

On est censé trouver ici un remède à tous types de maux : crânes de chat contre la perte de mémoire, os de chauve-­souris pour guérir de la rage, de hibou pour conjurer un mauvais sort… Les vendeurs assurent que ces carcasses ont été acquises en toute légalité et que les restes provenant d’espèces protégées, comme les défenses d’éléphants ou les peaux de lions – particulièrement onéreuses – ont été prélevées sur des animaux « morts de mort naturelle ».

Pourtant, certains murmurent que l’on peut encore se procurer certains « médicaments » dont le commerce est interdit depuis des années, comme des restes d’animaux protégés ou des ossements humains.

Des solutions à bas prix

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Derrière les stands, dans de petits cabanons, les guérisseurs proposent des consultations pour 2 000 F CFA (3 euros). C’est là, à l’abri des regards indiscrets, qu’ils dialoguent avec les esprits et « chargent » les fétiches, ceux qui protègent la maison familiale, ceux qui veillent sur le voyageur, ou encore les « dis-moi oui », qui ont le pouvoir de rendre amoureux. Le fils du féticheur Thomas Zonnotin, le chef du marché, précise que son père reçoit environ dix personnes par jour. La plupart viennent le trouver pour résoudre des problèmes de terrains, de travail ou d’amour.

N’importe quel souhait semble pouvoir être exaucé – à condition que les esprits le veuillent. Qu’ils soient préventifs ou curatifs, les remèdes ont en tout cas un coût bien plus élevé que la consultation. Koblan, qui s’est résolu à venir voir un féticheur à la suite de malaises à répétition, s’en est rendu compte.

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Comme lui, beaucoup de Togolais allient encore médecine moderne et médecine traditionnelle pour « soigner l’esprit autant que le corps », explique-t-il. Perplexe, il relit sa feuille de prescription, qui s’élève à plus de 26 000 F CFA, soit le montant d’un mois de salaire moyen.

Attraction touristique

À la fois centre de consultations et pharmacie traditionnelle en plein air, le marché d’Akodésséwa est l’occasion pour les touristes de toucher du doigt les mystérieuses et fascinantes pratiques vaudoues.

Une fascination qui n’a pas échappé au syndicat des vendeurs et guérisseurs du marché : depuis quelques années, ce dernier demande aux touristes de s’acquitter d’un droit d’entrée de 3 500 F CFA par personne (auxquels ils devront ajouter 1 500 à 2 000 F CFA pour prendre des photos), lequel donne tout de même droit à une visite guidée.

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