Comment les nouvelles technologies peuvent améliorer la vie des habitants de Lomé ?

Premier laboratoire de fabrication numérique du pays, le fablab Woèlab permet aux habitants d’un quartier populaire de la capitale togolaise d’améliorer la vie en ville, grâce aux technologies.

Dans la « Silicon Villa » de Klikame. © ÀPRÉSENT POUR JA

Dans la « Silicon Villa » de Klikame. © ÀPRÉSENT POUR JA

Publié le 20 octobre 2016 Lecture : 3 minutes.

Vue de la ville de Lomé. © Jacques Torregano pour Jeune Afrique
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Tout est dans son nom. Le Woèlab, c’est l’association du mot « woe », qui signifie « fais-le » en langue éwé, et de « laboratoire » : un espace de création ouvert et participatif, qui permet aux citoyens de réaliser eux-mêmes leurs projets et de transformer leur quartier. Le concept ? Le partage de compétences, la collaboration autour du monde du numérique et l’appropriation par les Loméens des technologies.

Lors du lancement de ce premier laboratoire de fabrication numérique togolais, en 2012, les premiers makers (comprenez ceux qui viennent bricoler dans le laboratoire) squattaient une salle de classe dans une école primaire. Aujourd’hui, tout a changé. Depuis un an, ils ont installé leur QG dans une imposante villa blanche de 600 m2, cachée au détour de ruelles sablonneuses du quartier populaire de Klikame, dans le nord-ouest de Lomé, à quelques centaines de mètres de la frontière avec le Ghana.

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Un espace de créativité

C’est une véritable caverne d’Ali Baba, où tout est construit avec les moyens du bord, depuis les tables et les chaises jusqu’aux ordinateurs. Dans la cour, des bidons d’essence font office de pots de fleurs. « C’est une start-up qui fait des tests pour mettre en place de la culture hors terre afin d’habiller les toits de la ville », précise Sénamé Koffi Agbodjinou, le fondateur du Woèlab.

À l’intérieur, sur de grandes planches de bois, on aperçoit les prototypes des futures inventions du labo et du matériel en tout genre : roues fixées à des boîtiers de fer, hélices de ventilateurs, réfrigérateurs, etc.

À l’étage se trouve l’invention qui a fait connaître le Lab : la première imprimante 3D 100 % africaine, construite à partir de déchets informatiques. « Les citoyens sont invités à s’approprier le lieu et à y travailler, explique Sénamé Koffi. Pendant les six premiers mois de l’année, nous organisons des événements ouverts, qui rassemblent chaque fois une cinquantaine de personnes. Les six autres mois, on essaie de transformer en business les meilleures idées qui ont émergé pendant ces rencontres. »

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Construction d’une imprimante 3D

C’est ce qui s’est passé avec l’imprimante 3D, nommée W. Afate, du nom de son concepteur. Élue meilleure invention des dix dernières années au Global Fab Award 2014, à Barcelone, elle a vu le jour en huit mois grâce à des informations en libre consultation sur internet, et a été construite à partir des pièces de vieux ordinateurs. Aujourd’hui, la petite start-up créée par Afate Nikou imprime des boîtiers pour GPS.

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Depuis 2012, onze start-up ont été incubées au Woèlab. Les dernières-nées se concentrent sur l’amélioration des conditions de vie des habitants du quartier de Klikame : Urbanatic identifie les espaces disponibles ou délaissés dans un rayon de 1 km pour les transformer en potagers ; quant à Scope, elle travaille sur un centre de récupération des déchets plastiques.

Le centre permet aussi aux habitants d’avoir accès gratuitement à des outils technologiques souvent au-dessus de leurs moyens. Grâce au projet Jerry Clan Togo, des élèves de dix écoles de Lomé reçoivent des formations à l’informatique et au montage d’ordinateurs à partir de matériaux recyclés. C’est Piou, un habitué du Lab, qui donne les cours : « La réaction des jeunes est très positive, assure-t-il. Quand ils commencent, la plupart d’entre eux ne connaissent pas ces outils, puis ils deviennent vraiment passionnés. Nous voudrions à terme doter toutes ces écoles d’une imprimante 3D. »

Rencontres citoyennes

Le soir, la grande salle du rez-de-chaussée accueille les réunions de la « communauté », composée des trente jeunes les plus impliqués. Ce sont eux qui font vivre le lieu. Ici, pas de chef d’entreprise : toutes les décisions sont prises en commun. Ousia a découvert le Woèlab il y a deux ans et, depuis, cet étudiant en énergies renouvelables âgé de 27 ans vient au minimum trois fois par semaine.

« Ici, on peut tous se retrouver autour de nos projets, dit-il. Et, avec ma passion pour le bricolage, c’est le lieu rêvé ! Il n’a pas d’équivalent à Lomé. »

Pourtant, le fonctionnement collaboratif n’est pas sans poser quelques problèmes. Étant donné que le Woèlab se veut entièrement autofinancé et que ses start-up tardent à générer des bénéfices, les coupures d’électricité et d’internet sont fréquentes. « Nous sommes dans l’un des seuls FabLab d’Afrique de l’Ouest et, la plupart du temps, nous n’avons pas accès à internet », reconnaît Sénamé Koffi.

Il ne désespère pourtant pas d’ouvrir d’autres « lieux de production de la ville » et de montrer que son projet de « hub-cité » africaine est un modèle d’urbanisation alternatif et participatif économiquement viable.

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