Franc CFA : pour Carlos Lopes il faut aborder la question « sans idéologie »

Carlos Lopes est l’ancien secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique des Nations unies

Carlos Lopes, ancien Secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique. © Bruno Levy / Jeune Afrique

Carlos Lopes, ancien Secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique. © Bruno Levy / Jeune Afrique

ProfilAuteur_FredMaury

Publié le 9 novembre 2016 Lecture : 2 minutes.

Issu du dossier

Franc CFA : le grand débat

La Cemac et l’Uemoa doivent-elles en finir avec l’ex-franc des colonies d’Afrique ? Économistes, responsables politiques, banquiers… il semble de plus en plus difficile de trouver des voix pour défendre cette monnaie commune. Enquête sur un tabou africain.

Sommaire

Jeune Afrique : Vous avez récemment parlé d’un « mécanisme désuet » au sujet du franc CFA. Que vouliez-vous dire ?

Carlos Lopes : Le mécanisme a beau être désuet, je ne suis pas contre le franc CFA. L’objectif d’une monnaie commune est de faire croître le marché intérieur, de développer les échanges commerciaux et de mettre en place un partage des risques entre pays, et ce afin de mieux absorber un choc externe. La politique monétaire doit être de nature à générer de la croissance. Or, tant dans l’Uemoa que dans la Cemac, j’observe surtout une politique statique et non dynamique. On s’est attaché uniquement à la question du taux de change fixe, sans porter attention aux autres éléments.

la suite après cette publicité

Vous n’êtes donc pas opposé au principe des monnaies communes ?

Non, elles ont beaucoup d’avantages. Mais, dans l’espace CFA, les zones monétaires sont très anciennes et leur création s’explique plus par des raisons politiques qu’économiques. Or les économies concernées et la structure de leurs échanges ont changé. De manière générale, il faut pouvoir aborder sans idéologie les questions du dynamisme de la gestion des réserves, de la participation de la politique monétaire à l’industrialisation, d’un taux de change fluctuant ou de l’arrimage à un panier de devises, incluant le yuan chinois.

Opteriez-vous pour un régime de change fixe ou flexible ?

On ne peut pas avoir une approche idéologique. Qu’ils aient opté pour l’un ou pour l’autre, certains pays s’en sortent bien, d’autres non. Il ne faut pas s’en remettre à un seul critère.

la suite après cette publicité

Les défenseurs du statu quo mettent en avant la stabilité de la monnaie et la maîtrise de l’inflation. Qu’en pensez-vous ?

Au Nigeria, en Zambie, au Ghana ou en Afrique du Sud, la chute des monnaies est surtout liée à la gestion macroéconomique interne, pas au régime monétaire. D’ailleurs, d’autres pays africains ont un régime de change flottant et ne souffrent pas, comme le Kenya ou l’Éthiopie. Quant à l’inflation, les gouverneurs des banques centrales ont comme objectif de la maintenir sous contrôle. À ce titre, ce qui se passe en zone franc CFA fait partie des acquis à préserver.

la suite après cette publicité

Quelles propositions faites-vous ?

Il faut avoir une gestion plus efficace des réserves. Et la fixité du taux de change ne doit plus être le critère le plus important de la politique monétaire, car ce qui est essentiel c’est de stimuler la croissance bien au-delà de 7 % par an.

Enfin, les banques centrales devraient tenir compte de l’ensemble des indicateurs d’intégration régionale – le dynamisme des échanges commerciaux, la mobilité des personnes et du capital, le crédit – et jouer un rôle dans la transformation économique.

L'éco du jour.

Chaque jour, recevez par e-mail l'essentiel de l'actualité économique.

Image