Bénin : l’homme d’affaires Sébastien Ajavon relaxé pour « insuffisance de preuves »

L’entrepreneur Sébastien Ajavon, troisième homme de la présidentielle de mars, a été arrêté pendant une semaine dans une affaire de trafic de drogue. Dénonçant « un complot politique », il a été relaxé vendredi soir.

Le patron des patrons (à g.) lors de son interpellation, le 28 octobre, 
quelques minutes après la fin de sa conférence de presse. © Charles Placide

Le patron des patrons (à g.) lors de son interpellation, le 28 octobre, quelques minutes après la fin de sa conférence de presse. © Charles Placide

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Publié le 7 novembre 2016 Lecture : 3 minutes.

Les Béninois pensaient avoir tout vu. Jusqu’à ce nouveau scandale à la croisée des mondes politique et économique. Soupçonné de trafic de drogue, l’homme d’affaires Sébastien Ajavon, 51 ans, a été interpellé le 28 octobre. Après avoir passé sept nuits en garde à vue à la gendarmerie maritime de Xwlacodji (Cotonou), il a comparu vendredi 4 novembre devant le tribunal de première instance de Cotonou avant d’être relaxé pour « insuffisance de preuve » et « au bénéfice du doute », au terme d’une audience qui aura duré environ dix heures.

Selon le procureur de la République, 17,265 kg de cocaïne ont été retrouvés entre 2 600 cartons de gésiers de dinde congelés, dans l’un des deux conteneurs en provenance du Brésil destinés à sa société Cajaf-Comon.

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Procédures particulières

D’après un proche du chef de l’État, c’est un service de renseignements d’un pays européen, avec lequel le Bénin a récemment signé des accords de coopération en la matière, qui a transmis à la Direction des services de liaison et de la documentation (DSLD, le service de renseignements de la présidence) « une information très précise » concernant cette cargaison. Son chef, Pamphile Zomahoun, en a informé le président, Patrice Talon, le 27 octobre en début de soirée.

Une procédure inhabituelle, mais le pedigree d’Ajavon l’a obligé à demander des instructions. « Je n’ai pas à assumer ce qu’il fait, même s’il est mon partenaire politique », aurait répondu le chef de l’État depuis Paris, où il était en visite privée.

Après avoir hésité à agir en pleine nuit, Zomahoun, gendarme de profession, a alors chargé la gendarmerie du Port autonome de Cotonou, et non l’Office central de répression du trafic illicite de drogues (Ocertid), comme le veut la procédure, d’organiser la saisie le lendemain matin.

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L’enquête a depuis été confiée à une commission mixte regroupant l’Ocertid, la gendarmerie, la police et la douane. Minée par la précipitation et le manque de professionnalisme avec lequel la gendarmerie a opéré, elle avance lentement.

« Complot politique »

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Juste après la saisie et quelques minutes avant d’être interpellé, Ajavon a dénoncé un complot politique contre sa personne. Le roi du poulet n’a pas hésité à en accuser le pouvoir en place et, sans le nommer, le chef de l’État. C’est peu dire que ce dernier et ses proches ont, de leur côté, très mal pris ces attaques. « C’est une affaire de droit commun qu’Ajavon a voulu politiser », répond-on à la présidence.

À Cotonou, la nouvelle de cette arrestation a eu l’effet d’une bombe. Ajavon n’est pas seulement le principal importateur de volailles congelées d’Afrique de l’Ouest, il fut également le troisième homme de la dernière élection présidentielle et l’un des principaux soutiens de Patrice Talon au second tour.

Depuis son interpellation, pro-Talon et pro-Ajavon se regardent en chiens de faïence

Depuis, si le patron des patrons béninois estimait n’avoir pas été suffisamment récompensé, il semblait vouloir maintenir son soutien au président. « Je sais que Talon ne me fera aucun cadeau et que je devrai un jour l’affronter, mais pour le moment je vais collaborer avec lui », avait-il récemment déclaré à un visiteur du soir.

En dépit de la relaxe, l’affaire laissera des traces. « Ajavon est rancunier, il va agiter le pays comme Talon l’avait fait sous Yayi », pense un homme qui le connaît bien. Depuis cette affaire, pro-Talon et pro-Ajavon se regardent en chiens de faïence. Devant les kiosques à journaux et dans les rues commerçantes de Cotonou, les discussions sont animées et manquent souvent de tourner à l’affrontement.

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