Sénégal – Malick Gakou : « Nous attendons toujours des réponses claires à nos questions »

Véritable patchwork composé de dizaines de partis, de syndicats et de personnalités indépendantes, la coalition Manko Wattu Sénégal fait désormais figure de principale force d’opposition au régime de Macky Sall.

Malick Gakou. © YOURI LENQUETTE POUR JA

Malick Gakou. © YOURI LENQUETTE POUR JA

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Publié le 19 décembre 2016 Lecture : 3 minutes.

La ville de Dakar, en mars 2008. © REBECCA BLACKWELL/AP/SIPA
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Sénégal : objectif 2017

Place sur l’échiquier africain, résultats économiques, dynamique sociale… Où en est le pays depuis le début du septennat de Macky Sall, en 2012 ? Pour l’exécutif comme pour l’opposition, les législatives de juin prochain auront valeur de premier grand test.

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À quelques mois des législatives, ce vaste front du refus – qui n’a pas encore adopté de stratégie électorale commune – reproche au président sénégalais des pratiques qu’il estime antidémocratiques. Son coordinateur, Malick Gakou, président du Grand Parti, s’en explique.

Jeune Afrique : L’opposition multiplie les coalitions. Les Sénégalais ne risquent-ils pas de s’y perdre ?

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Malick Gakou : Manko Wattu Sénégal est aujourd’hui la coalition de référence. Elle englobe une centaine d’organisations politiques ou syndicales, dont des coalitions préexistantes comme le Front patriotique pour la défense de la République [FPDR], qui rassemble le Parti démocratique sénégalais [PDS] et ses alliés. Le Grand Parti, l’ACT [Abdoul Mbaye], le Rewmi [Idrissa Seck], l’UCS [Abdoulaye Baldé], Yessal [Modou Diagne Fada], Tekki [Mamadou Lamine Diallo] et d’autres en font également partie.

Qu’est-ce qui unit cette nébuleuse, en apparence hétéroclite ?

Une préoccupation commune concernant les menaces qui pèsent sur les libertés publiques, la démocratie et la gestion des ressources naturelles. Nous avons donc décidé de rassembler nos forces et de mutualiser nos énergies. À travers le monde, le Sénégal est loué comme une terre de démocratie. Pourtant, depuis 2012, nous avons constaté plusieurs ruptures majeures qui contredisent ce constat.

L’exploitation gazière et pétrolière constitue un socle essentiel au développement du pays

Quelles sont ces ruptures ?

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D’abord, la rupture du consensus qui prévalait depuis 1992 entre la majorité et l’opposition sur le processus électoral. Aujourd’hui, c’est en solitaire que la majorité organise la refonte du fichier électoral.

Concernant la restriction des libertés, le droit de manifester est piétiné, des opposants ont été incarcérés pour avoir critiqué le gouvernement. Et on a vu récemment deux hauts fonctionnaires remerciés pour avoir pris position sur des enjeux d’intérêt national. Enfin, il y a la gestion des ressources naturelles, en particulier du pétrole et du gaz. Nous avons interpellé le gouvernement au sujet de l’implication d’Aliou Sall, le frère du président, dans une société chargée de deux blocs gaziers, et nous attendons toujours des réponses claires à nos questions.

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Depuis plusieurs mois, le discours de l’opposition semble exclusivement focalisé sur le cas d’Aliou Sall. Que lui reprochez-vous au juste ?

Nous considérons que l’exploitation gazière et pétrolière constitue un socle essentiel au développement du pays. Donc les permis d’exploration et d’exploitation doivent être accordés à des sociétés qui possèdent à la fois l’expertise et les capacités financières suffisantes. Le fait d’avoir eu affaire successivement à Petro-Tim, PetroAsia, Timis Corp et Kosmos Energy ne nous rassure pas.

Et la présence du frère du président dans ce dossier rend l’exigence de transparence d’autant plus impérieuse. Pourquoi avoir accordé des concessions d’exploration à une société, Petro-Tim, qui n’avait manifestement ni l’expertise ni l’envergure financière pour le faire ?

Au-delà de cette affaire, quels sont les autres griefs de l’opposition, notamment en matière économique ?

Nous sommes également mobilisés contre le PSE [Plan Sénégal émergent], qui, en réalité, appauvrit le peuple sénégalais. Ce plan est censé promouvoir le secteur privé national, alors que 90 % de notre économie sont aujourd’hui détenus par des entreprises étrangères. Le cycle d’endettement du pays s’accélère et, dans tous les secteurs importants – agriculture, santé, emploi des jeunes, éducation, tourisme, pêche… –, c’est la crise. Le PSE infléchit la courbe du développement et ne conduira le Sénégal nulle part.

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