Maroc : Loubna Abidar, exilée mais célébrée

Pour avoir incarné une prostituée, l’actrice marocaine est vilipendée dans son propre pays. Le monde du cinéma, lui, salue sa performance.

La comédienne était membre du jury du 30e festival de Cabourg, en juin. © Stephane Cardinale/Corbis via Getty Images

La comédienne était membre du jury du 30e festival de Cabourg, en juin. © Stephane Cardinale/Corbis via Getty Images

fahhd iraqi

Publié le 14 décembre 2016 Lecture : 1 minute.

Samedi 3 décembre, Casino du Liban, à Beyrouth. Une standing-ovation salue Loubna Abidar, 31 ans, lauréate du prix d’interprétation féminine aux 4e Trophées francophones du cinéma. Depuis son podium, elle lance à l’adresse des médias marocains : « S’il vous plaît, je ne suis pas une prostituée, je suis une actrice. » La voix tremblante et les sanglots de la jeune comédienne en disent long sur sa souffrance.

Le rôle de sa vie dans Much Loved, de Nabil Ayouch, s’est transformé en véritable cauchemar. Interdit en salle au Maroc, la comédie dramatique qui dépeint le quotidien d’une bande de prostituées à Marrakech avait suscité des réactions haineuses de la part de puritains, qui l’ont jugé comme « un outrage grave aux valeurs morales et à la femme marocaine ».

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Cible d’attaques

Depuis, Abidar est une paria dans son pays : elle doit faire face à un torrent d’insultes sur les réseaux sociaux et a même subi des agressions verbales et physiques dans la rue, « dans l’indifférence des autorités », assure-t-elle. Un calvaire qui l’a poussée à s’exiler en France, où elle passe désormais le plus clair de son temps. Dans le monde du cinéma, en revanche, la comédienne est adulée. Elle écume les festivals et collectionne les prix : Bayard d’or au Festival de Namur et Valois de la meilleure actrice à Angoulême en 2015, et nomination aux Césars en 2016…

Sa cause a aussi donné du grain à moudre aux organisations féministes qui ont trouvé en elle un symbole inespéré pour mettre en lumière les violences faites aux femmes au Maroc. Dans sa biographie, La Dangereuse, coécrite avec Marion Van Renterghem, grand reporter au quotidien français Le Monde, Abidar s’est confiée sans retenue, évoquant son viol par son père pour dénoncer « ce que les hommes peuvent faire à leur fille, à leur nièce ».

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