La Mauritanie manque de moyens pour accueillir les réfugiés maliens
En raison de la baisse des contributions des donateurs, les conditions de vie des quelque 45 000 personnes entassées dans le camp de Mbera se sont sérieusement dégradées.
Situé dans l’Est mauritanien, à une cinquantaine de kilomètres de la frontière avec le Mali, le camp de réfugiés de Mbera est plein comme un œuf. Environ 45 000 Maliens s’y entassent, et le flux d’arrivées se poursuit, puisque le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en Mauritanie estime que 4869 personnes supplémentaires ont franchi la frontière au cours des onze premiers mois de 2016, malgré l’accord de paix de 2015. Malheureusement, l’argent se fait rare pour continuer à les accueillir convenablement.
Fuyant depuis 2012 les combats et le banditisme, les Maliens de Mbera sont maures, peuls, bambaras, songhaïs et, surtout, à 70%, touaregs. La plus grande partie d’entre eux viennent de la région de Tombouctou et plus précisément des cercles de Goundam, Ténenkou, Niono et Youwarou.
« Nous avons profité d’un contexte mauritanien exceptionnellement favorable qui a permis aux humanitaires de faire du bon travail, explique Mohamed Ag Malha, président de la Coordination des réfugiés maliens en Mauritanie. Nous bénéficions d’un système scolaire et sanitaire efficace. L’armée et la gendarmerie mauritaniennes assurent notre sécurité, sans que nous soyons enfermés dans le camp. »
Des denrées alimentaires en quantité insuffisante
Des puits ont été forés à 35 m de profondeur, et des jardins irrigués avec le concours d’ONG. Un marché se tient chaque semaine. Maliens et Mauritaniens se partagent les pacages. « Même si la cohabitation avec la population locale est bonne – car nous sommes majoritairement des éleveurs, comme elle –, une commission de prévention et de gestion des conflits avec les locaux a été mise en place, poursuit Ag Malha. Le vrai problème, c’est la distribution générale des vivres [DGV]. Le panier alimentaire qu’elle comporte prévoit chaque mois 12 kg de riz, 0,75 l d’huile, 1,5 kg de légumineuses, 0,15 g de sel et 1 500 ouguiyas [4 euros]… à condition que la cagnotte des bailleurs de fonds soit là. La régularité de la DGV n’est pas toujours assurée. »
En 2016, le Japon (qui a décaissé 53,3 millions de dollars [50,1 millions d’euros] au cours des quatre dernières années, selon son ambassadeur à Nouakchott, Hisatsugu Shimizu), l’UE, la Finlande et la société Uniqlo ont versé quelque 4 millions de dollars, auxquels s’ajoute l’apport d’ONG espagnoles et italiennes, de MSF Belgique, du Croissant rouge mauritanien, de l’OMS ou de l’Unicef. Insuffisant pour maintenir la DGV et satisfaire les besoins de base des réfugiés, notamment l’extension des latrines, qui parviendront au maximum de leur capacité à la fin de l’année.
Patrie menaçante
Jean-Noël Gentile, représentant du Programme alimentaire mondial (PAM) en Mauritanie, constatait, fin novembre, « une diminution des rations distribuées dans le camp à cause de la baisse des contributions des donateurs ». Il estimait que ceux-ci devaient débloquer au plus vite 17 millions de dollars supplémentaires pour maintenir les services de base et faire reculer la malnutrition durant le premier semestre de 2017, par exemple grâce à un repas chaud par jour pour chaque enfant scolarisé dans le camp. Cet argent servira aussi à soutenir les quelque 20 000 Mauritaniens qui vivent très pauvrement aux alentours, dans la région de Mbera.
Le gouvernement malien presse les réfugiés de revenir au pays et de participer aux élections nationales et locales. « On nous a répété que « l’amour de la patrie est une dimension de la foi », mais nous n’avons pas répondu à cet appel, car nous connaissons notre pays et les menaces politiques, militaires et économiques qui s’y multiplient, explique Mohamed Ag Malha. Certains d’entre nous sont repartis au Mali, mais beaucoup sont revenus ou parlent de revenir. Même si nous manquons ici d’activités génératrices de revenus, la Mauritanie est hospitalière, alors qu’il y a vraiment trop de clans et trop de violences chez nous. »
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