Internet : Liquid Telecom toujours plus solide

La filiale de l’opérateur zimbabwéen Econet est en passe de racheter le sud-africain Neotel pour 460 millions d’euros. Cette transaction lui permettra de conforter son leadership sur le continent en matière de gestion de la fibre optique.

Les géants des télécoms sont en pleine tourmente sur le continent. © Vincent Fournier pour JA

Les géants des télécoms sont en pleine tourmente sur le continent. © Vincent Fournier pour JA

Julien_Clemencot

Publié le 29 décembre 2016 Lecture : 4 minutes.

Fin novembre, Liquid Telecom a obtenu un prêt de 300 millions de dollars (282 millions d’euros) pour financer l’achat de son concurrent sud-africain Neotel, filiale de l’indien Tata. Ni le ralentissement brutal de la croissance de la nation Arc-en-Ciel ni les déboires actuels de MTN, numéro un de la téléphonie mobile sur le continent, n’ont dissuadé cette filiale de l’opérateur zimbabwéen Econet Wireless de mener la plus grosse transaction de son histoire (6,55 milliards de rands, soit 460 millions d’euros).

C’est donc avec une certaine impatience que Nic Rudnick, son directeur général, a attendu l’approbation de l’Icasa, le régulateur sud-africain, finalement donnée le 15 décembre, près de six mois après l’annonce de l’acquisition. Une opération remarquée au niveau international, puisqu’elle a été récompensée à Londres, en novembre, lors de l’événement organisé par le média spécialisé TMT Finance.

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15 000 km de réseaux terrestres en plus

Avec l’apport de Neotel, Liquid Telecom, né en 2004 à l’occasion du rebranding d’Econet Satellite Services, va consolider sa place de premier gestionnaire panafricain de fibre optique. L’entreprise ajoutera environ 15 000 km de réseaux terrestres aux plus de 24 000 km qu’elle exploite déjà dans 12 pays, principalement en Afrique de l’Est. à la clé, de nombreuses synergies et un chiffre d’affaires (de 350 millions de dollars actuellement) qui devrait considérablement augmenter.

Le rachat de Neotel, qui totalise environ 4 milliards de rands de revenus, permettra notamment à Liquid Telecom d’attaquer de manière plus agressive le marché des grandes entreprises, qu’elles soient minières, pétrolières ou bancaires. Et de viser tout particulièrement les multinationales dont les sièges sont en Afrique du Sud, pour leur offrir des services sur tout le reste du continent. « C’était déjà notre argument commercial, maintenant ce sera encore plus facile de les convaincre », s’enthousiasme David Eurin, responsable de la stratégie.

Des rapports renforcés avec d’autres opérateurs

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Sur ce créneau, le cadre dirigeant n’exclut pas une confrontation directe avec les opérateurs de télécommunications, qui restent pourtant les premiers clients de Liquid Telecom. « Nous ne voulons pas nous limiter ou négocier des chasses gardées. Quand nous avons signé un partenariat avec Airtel en 2015, pour connecter leurs tours de télécoms, il n’y avait pas de clause d’exclusivité. Ce n’est pas dans notre modèle économique. Il est possible que nous soyons en compétition avec les opérateurs sur quelques prospects », ­assure-t-il.

Mais l’entreprise aura aussi à cœur de renforcer sa relation avec MTN et Vodacom, qui utilisent ses infrastructures pour transporter les données de leurs réseaux 3G et 4G. « Même si nous sommes parfois concurrents, nous avons aussi vocation à les aider à développer les services qu’ils offrent aux entreprises », affirme David Eurin. À la mi-2015, Liquid Telecom et MTN avaient d’ailleurs signé un accord réciproque pour partager leurs infrastructures sous certaines conditions.

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Pour Neotel, l’accord avec Liquid Telecom arrive aussi à point nommé. En vente depuis plus de deux ans, l’entreprise a été sevrée d’investissements, et sa dette considérable (4,815 milliards de rands à la fin du mois de mars 2014) avait besoin d’être restructurée. Longtemps promise à Vodacom, la cession de Neotel avait échoué au début de 2016 pour des raisons réglementaires. Afin de satisfaire les autorités sud-africaines, garantes du Black Economic Empowerment, Nic Rudnick s’est engagé à laisser la société d’investissement Royal Bafokeng Holdings acquérir 30 % du capital.

Politique d’expansion

Une partie des 300 millions de dollars empruntés permettra également à Liquid Telecom de poursuivre son expansion panafricaine, notamment en Tanzanie, où il vient d’acquérir le fournisseur d’accès internet Raha, et au Botswana. En octobre, son directeur général a signé un accord créant une coentreprise avec la compagnie nationale d’électricité Botswana Power Corporation pour exploiter la fibre optique posée le long du réseau électrique.

« Nous nous sommes focalisés ces derniers mois sur Neotel, mais nous n’oublions pas le reste du continent, y compris les pays francophones. C’est une question d’opportunités », précise David Eurin. Au Gabon, Liquid Telecom a tenté d’obtenir la gestion d’un réseau en fibre optique, mais l’appel d’offres a finalement été emporté par Axione, une filiale de Bouygues. Pour l’heure, sa présence en Afrique francophone, en dehors du partenariat avec MTN, se limite à la RD Congo. En 2017, Liquid Telecom pourra d’ailleurs offrir le premier tronçon de fibre traversant le continent d’ouest en est, de Muanda à Mombasa.

Un rapprochement stratégique avec MTN

En attendant d’être physiquement présent en Afrique francophone (en dehors de la RD Congo), Liquid Telecom peut recourir au réseau de MTN. En août 2015, la filiale d’Econet et l’opérateur de télécoms sud-africain ont en effet signé un accord en vertu duquel chacun des deux groupes offre un accès à ses infrastructures dans les pays où l’autre n’est pas présent. Ce partenariat concerne la vente de capacité en gros, le transport haut débit, les services aux entreprises et l’internet fixe. Liquid Telecom peut ainsi servir ses clients au Bénin, au Cameroun, au Congo, en Guinée, en Côte d’Ivoire, mais aussi au Ghana, en Guinée-Bissau, au Liberia, au Nigeria et au Soudan. Les deux groupes ont poursuivi leur rapprochement quand MTN s’est associé à la construction d’un axe en fibre optique entre Polokwane (dans le nord de l’Afrique du Sud) et Centurion (au sud de Pretoria), qui a été prolongé en 2016 vers Ladysmith (à 100 km au nord-ouest de Durban).

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