Côte d’Ivoire : Bamba Moriféré entend bien continuer son combat politique
Porte-parole de la coalition du non à la nouvelle Constitution, le président du Rassemblement du peuple de Côte d’Ivoire reste bien décidé à défendre sa vision de la démocratie.
Une autre Côte d’Ivoire
Alors que la Côte d’Ivoire vient de changer de Constitution et de République, la voilà qui se dote d’un nouveau gouvernement. 2017 est pour le pays l’année de tous les défis. Jeune Afrique vous en donne un aperçu.
S’il avait quelque peu disparu du devant de la scène politique ivoirienne ces dernières années, Bamba Moriféré, 72 ans, y est revenu de plus belle en 2016 à la faveur du débat sur la nouvelle Constitution, au cours duquel il a pris le leadership de la coalition du « non ». Quitte à mettre dans l’embarras sa propre fille, Affousiatta Bamba-Lamine, ministre de la Communication et porte-parole adjointe du gouvernement.
Un homme d’expérience
Le référendum passé et la Constitution adoptée, l’heure de la retraite n’a toujours pas sonné pour l’infatigable militant. « J’apporte mon expérience au combat pour la démocratie. Et j’entends bien continuer mon combat politique », prévient le président du Rassemblement du peuple de Côte d’Ivoire (RPCI), par ailleurs professeur agrégé de pharmacie. Dans sa résidence de plus de 4 000 m2 du quartier huppé des Deux-Plateaux - Vallons, dans la non moins cossue commune de Cocody, Bamba Moriféré enchaîne les audiences et les consultations.
Aujourd’hui opposé au chef de l’État ivoirien, qu’il a pourtant soutenu en 2010 lors de la présidentielle face à son (ex-)grand ami Laurent Gbagbo, Bamba Moriféré justifie ses changements de cap. « En 2010, j’ai soutenu Alassane Ouattara par défaut, parce qu’il était le moindre mal », lance-t‑il. Sa divergence profonde avec le chef de l’État résulte du « forcing » – dit-il – opéré par ce dernier pour que soit élaborée une nouvelle loi fondamentale.
« Ce n’était pas dans les prérogatives du président Ouattara d’initier une nouvelle Constitution. Il fallait créer une Assemblée constituante pour débattre du sujet, comme ce fut le cas en Tunisie et comme c’est le cas au Burkina Faso », explique l’opposant.
Ma fille, c’est ma fille ; moi, c’est moi. Chacun de nous a pris ses engagements
Longtemps contesté par l’un de ses lieutenants, Mathias Kakou, au sein du Parti pour le progrès et le socialisme (PPS) – qu’il avait fondé –, Bamba Moriféré a préféré, en 2012, lancer une nouvelle formation : le RPCI, qui est actuellement l’un des fers de lance de la contestation contre la Constitution de la IIIe République. Avant le référendum, avec vingt-cinq partis, il a créé une coalition pour le « non », le Collectif démocratique de Côte d’Ivoire (Code), dont il est le porte-parole, et qui a été rejoint par le Front du refus – mené les frondeurs du Front populaire ivoirien (FPI) d’Abdoudramane Sangaré.
Et que l’on ne vienne plus le titiller à propos de sa fille Affoussiatta Bamba-Lamine. « Ma fille, c’est ma fille ; moi, c’est moi. Chacun de nous a pris ses engagements, tranche-t‑il. Affoussiatta avait rejoint la rébellion et, à un moment donné, ils ont choisi comme méthode de lutte de prendre les armes. J’ai respecté cet engagement. Donc, on ne peut pas prétexter sa présence au gouvernement pour exercer des pressions sur moi. Elle ne peut exercer aucune pression sur moi ! »
Combattant
Surnommé par ses amis « le dernier des Mohicans », Bamba Moriféré a été de tous les combats démocratiques en Côte d’Ivoire. En 1990, avec son compère d’alors, Laurent Gbagbo, ils avaient réussi à arracher le multipartisme à Félix Houphouët-Boigny au soir de son règne. Cet activiste de la démocratie a aidé à la création de plusieurs organisations majeures, comme le puissant syndicat des enseignants de l’université (Synares) ou encore la Fédération estudiantine de Côte d’Ivoire (Fesci). « Nous faisons partie de ceux qui ont inspiré la création du Rassemblement des républicains [RDR], en 1994, et nous avons lancé le Front républicain », confie-t‑il.
Chez les Bamba, aller au combat, c’est dans les gènes. Son neveu, Yacouba Bamba, proche de l’ex-rébellion, a été porte-parole de la Commission électorale indépendante (CEI) et s’était imposé pour donner les résultats sortis des urnes de l’élection de 2010, malgré les menaces du président sortant, Laurent Gbagbo. Son père, El Hadj Tiemoko Bamba, a fait partie des fondateurs du syndicat agricole africain, à la tête de la contestation anticolonialiste. Quant au grand-père de Bamba Moriféré, Daouda Bamba, militaire dans l’armée coloniale, il avait créé le commandement de Daloa, le fief des Bamba, dans le Centre-Ouest, avant de tomber au combat en France, lors de la Première Guerre mondiale.
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