Tunisie : l’Arabie saoudite en opération séduction

Après un grand froid diplomatique, c’est la coopération qui semble désormais l’emporter. Depuis les élections de 2014, l’engagement saoudien va s’accentuant. À tous les niveaux…

Riyad va financer la restauration de la mosquée Oqba Ibn Nefaa, à Kairouan. © Amine Landoulsi/Anadolu Agency/AFP

Riyad va financer la restauration de la mosquée Oqba Ibn Nefaa, à Kairouan. © Amine Landoulsi/Anadolu Agency/AFP

Publié le 1 février 2017 Lecture : 2 minutes.

Le roi Saoudien, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, avec le Premier ministre des Émirats arabes unis, Mohammed ben Rachid Al Maktoum, à Abu Dhabi, le 4 décembre 2016. © AP/SIPA
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Arabie Saoudite : jusqu’ici tout va bien…

Entre la chute de l’économie due à la crise pétrolière, son enlisement militaire au Yémen et la défaite des rebelles Syriens à Alep soutenus par Riyad, la monarchie des Saoud semble en perte de vitesse. Ce qui ne l’empêche pas de voir ses relations diplomatiques avec le Maghreb progresser.

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Entre Tunis et Riyad, les relations sont aujourd’hui au beau fixe, ce qui n’a pas toujours été le cas. À l’indépendance, le royaume des Saoud voyait d’un mauvais œil l’action de Habib Bourguiba, qui avait destitué une famille régnante pour fonder une république et dont l’orientation laïque lui vaudra, en 1974, d’être accusé d’apostasie par le mufti de la monarchie wahhabite. Après la révolution de 2011, le rapprochement avec le rival qatari, opéré par la troïka au pouvoir conduite par les islamistes d’Ennahdha, et l’asile offert par Riyad à Zine el-Abidine Ben Ali, dont les demandes d’extradition sont restées à ce jour lettre morte, ont jeté un froid entre les deux capitales.

Investissement en masse

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Mais la chute de la troïka a changé la donne. Aussi bien Mehdi Jomâa, chef du gouvernement de transition en 2014, que Béji Caïd Essebsi, actuel président de la République, ont renoué les liens avec Riyad, grâce en partie à l’entregent de Mohammed VI. Les dirigeants tunisiens ont ainsi multiplié les visites à Riyad, allant jusqu’à soutenir l’Arabie saoudite dans sa guerre au Yémen et rejoignant la coalition islamique contre le terrorisme emmenée par Riyad.

Preuve de ce net réchauffement, la pétromonarchie a promis, lors de la conférence Tunisia 2020 de décembre 2016, une enveloppe de 800 millions de dollars en dons et en crédits pour soutenir le plan de développement. Dans les années 1990 déjà, le célèbre homme d’affaires saoudien Salah Abdallah Kamel, fondateur du groupe Dallah Albaraka, avait activement contribué à l’émergence économique de la Tunisie, avant de prendre ses distances à la suite d’une brouille avec le président Ben Ali.

Chacun sa religion

L’opération séduction se poursuit, au point que Selma Elloumi, ministre tunisienne du Tourisme, a pu déclarer : « J’aime bien les Saoudiens. La Tunisie est leur deuxième pays. » Non sans avoir souligné que « les investissements saoudiens dans le pays [étaient] estimés à environ 277 millions de dollars et [avaient] permis la création de plus de 6 100 emplois ».

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Cette embellie diplomatique et économique n’empêche pas certains Tunisiens d’être circonspects à l’égard des Saoud, auxquels ils reprochent, en tant que gardiens des lieux saints, de ne pas leur attribuer un quota de pèlerins plus important et de vouloir apposer une empreinte wahhabite à la tradition d’islam sunnite pratiquée en Tunisie, sans cependant s’émouvoir outre mesure du rigorisme religieux du royaume et de ses entorses régulières aux droits de l’homme. Des broutilles au regard du soutien financier apporté par un « pays frère et ami » dans un contexte de crise économique.

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