Les Néerlandais, plus démocrates que les Marocains ?

Examinons, si vous le voulez bien – et un peu de silence, là-bas, au fond, ou je vous envoie chez le proviseur –, examinons deux situations politiques dans deux pays différents et voyons si nous pouvons en tirer une leçon.

Manifestation en faveur du Parti Justice et Développement, lors de la campagne pour les législatives, à Casablanca, le 1 octobre 2016 © Abdeljalil Bounhar/AP/SIPA

Manifestation en faveur du Parti Justice et Développement, lors de la campagne pour les législatives, à Casablanca, le 1 octobre 2016 © Abdeljalil Bounhar/AP/SIPA

Fouad Laroui © DR

Publié le 3 février 2017 Lecture : 2 minutes.

Au Maroc, le Premier ministre désigné peine à former son gouvernement. Pourquoi ? Il avait eu l’outrecuidance de vouloir se passer des partis proches du Palais pour mettre en place une coalition (il ne dispose pas de la majorité absolue). Haro sur le baudet ! La situation est tellement bloquée qu’à l’heure où nous mettons sous presse des juristes évoquent des articles ambigus de la Constitution qui pourraient permettre d’exclure le PJD, pourtant arrivé en tête du vote, de l’exercice du pouvoir. Assoyons-nous gaiement sur la légitimité conférée par les urnes !

Aux Pays-Bas, le parti que tous les sondages désignent comme le futur grand vainqueur des prochaines élections législatives, le PVV, n’a aucune chance de former une coalition : toutes les autres formations ont juré qu’elles ne s’allieraient jamais avec lui. Le plus grand parti du pays sera donc exclu de l’exercice du pouvoir. Assoyons-nous gaiement sur la légitimité conférée par les urnes !

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Vous remarquerez, chers étudiants, que les deux derniers paragraphes se closent sur la même phrase, plus précisément la même exclamation. Maintenant, vous vous attendez peut-être à ce que que je disserte longuement sur chaque cas. Que nenni ! Je fais un demi-tour et je braque ma longue-vue non sur ces deux casus (ou casi, comme disent les puristes), mais sur la réaction des observateurs.

Et je remarque avec un léger étonnement la chose suivante : les marocanologues néerlandais crient à l’autoritarisme, au déni de démocratie, au coup de force dans le cas du Maroc. Mais ils n’ont aucun problème avec le casus de leur propre pays.

Boycott du parti de Geert Wilders

On peut les comprendre. Le PVV est le parti populiste du détestable Geert Wilders, qui manie la xénophobie et le mensonge avec une virtuosité inquiétante. (Sa dernière invention : il a affirmé très sérieusement, lors d’un speech quelque part en Europe, que les blondes, aux Pays-Bas, étaient obligées de cacher leurs cheveux ou de les teindre pour ne pas se faire violer par les immigrants…) Le boycott unanime du PVV, même s’il arrive en tête des législatives, se justifie donc pleinement.

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Certes. Mais, dans la forme, ne s’agit-il pas de la même chose ? Dans les deux cas, on met des bâtons dans les roues du premier parti. Les Néerlandais auraient raison de le faire, pas les Marocains. C’est curieux. Les Pays-Bas sont une démocratie, personne n’en doute. Mais alors, c’est un peu comme si on demandait au Maroc d’être plus démocrate que démocrate, de la même façon que Tide ou Dash ou je ne sais quelle lessive qui lave « plus blanc que blanc ». Beau slogan, mais vous avez déjà vu ça quelque part, « plus blanc que blanc » ?

Allez, on arrête ici le cours. Méditez longuement ce que nous avons appris aujourd’hui.

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