Cameroun : « La croissance doit être plus inclusive »
L’agronome français Armel François a remplacé au pied levé André Fotso à la présidence du Groupement interpatronal du Cameroun, dont les 250 membres représentent près de 70% du PIB.
Cameroun : une économie à toute épreuve ?
Alors que les économies d’Afrique centrale tournent au ralenti depuis la chute des cours du pétrole et des matières premières, le pays semble en mesure d’éviter la crise.
Jeune Afrique : Le sommet de la Cemac, en décembre, a décidé d’ouvrir des négociations avec le FMI. Cela signifie-t-il un retour de l’austérité au Cameroun ?
Armel François : La chute brutale des cours du pétrole et les problèmes sécuritaires dans la zone du lac Tchad précipitent l’Afrique centrale dans un nouveau cycle de crises. Ils révèlent la fragilité et la vulnérabilité de nos pays, qui n’ont pas su tirer profit de ces dix ans de conjoncture favorable pour transformer structurellement leurs économies.
À défaut d’un ajustement externe qui aurait consisté à dévaluer les monnaies, les chefs d’État ont opté pour un ajustement interne, à travers 21 résolutions qui visent à relancer la production, à réduire les déficits budgétaires et extérieurs, et à maintenir un endettement viable et soutenable. Ces résolutions et mesures fiscales montrent que l’austérité est déjà engagée.
Comment appréciez-vous l’effort de diversification de l’économie en cours ?
Depuis 2010, le Cameroun affiche des résultats en nette amélioration, avec une croissance de l’ordre de 4,7 % par an. Ces résultats ne doivent cependant pas occulter les faiblesses structurelles du système productif, qui empêchent la croissance d’être plus inclusive, alors qu’elle s’accompagne d’un relèvement du niveau d’endettement public et génère d’importants déficits extérieurs.
Partagez-vous le constat officiel sur la résilience de l’économie du pays ?
Si l’on regarde sa structuration et ses performances récentes, on ne peut que conclure qu’elle présente des capacités de résilience plus importantes que celles de ses voisins. Mais il faut insister sur le caractère relatif et conjoncturel de cette résilience.
Si elle a affiché, notamment au cours des cinq dernières années, des performances au-dessus des moyennes mondiales et africaines, elle ne peut résister longtemps à un choc exogène comme la chute des cours du brut. Le constat doit donc être relativisé.
Le discours officiel fait de l’investissement public, notamment dans les infrastructures, l’un des moteurs de la croissance. Quelle est la contribution du secteur privé ?
Il tient un rôle fondamental dans la production des richesses comme des emplois. Le pays se démarque par un dynamisme entrepreneurial exceptionnel, que beaucoup lui envient. Malheureusement, les contraintes liées à la qualité de l’environnement des affaires, particulièrement sur le plan administratif, et au manque d’accompagnement, confinent la plupart des initiatives dans le secteur informel.
Que préconisez-vous ?
Des réformes structurelles. Nous devons nous appuyer sur les grands projets réalisés, développer un tissu industriel robuste, améliorer la productivité globale et mieux intégrer les chaînes de valeur mondiales. Il s’agit aussi de transformer le secteur des services en un outil efficace d’appui à l’industrialisation et à la création d’emplois. Pour cela, nous plaidons pour l’amélioration du climat des affaires et la promotion des investissements, tant locaux qu’étrangers.
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