États-Unis : langage guerrier

Il s’appelle Steve Bannon. Les médias ont déjà plus d’une fois cité son nom. Retenez-le car nous vous parlerons encore de lui, le plus souvent en mal.

Steve Bannon, stratège en chef de Donald Trump, lors d’une réunion sur la cybersécurité, à la Maison Blanche, le 31 janvier 2017. © Evan Vucci/AP/SIPA

Steve Bannon, stratège en chef de Donald Trump, lors d’une réunion sur la cybersécurité, à la Maison Blanche, le 31 janvier 2017. © Evan Vucci/AP/SIPA

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Publié le 16 février 2017 Lecture : 3 minutes.

C’est le stratège en chef du nouveau président américain, son plus proche collaborateur, l’homme qui a son oreille et lui inspire ses décisions les plus controversées.

Steve Bannon est à Donald Trump, depuis plusieurs semaines, ce que Henry Kissinger a été à Richard Nixon dans les années 1960 et 1970. Mais Kissinger était un universitaire et un penseur avant de se muer en stratège de la Maison-Blanche, alors que Bannon est un manipulateur qui se pique de stratégie.

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Jugez-en.

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Avant même d’être nommé par Donald Trump « conseiller principal et chef de la stratégie », de conquérir la place de grand inspirateur du nouveau président des États-Unis d’Amérique, Steve Bannon était déjà connu pour ses idées et sa pensée.

Il avait identifié « les adversaires déclarés » des États-Unis. Pour lui, ils sont au nombre de trois et forment un nouvel « axe du mal ».

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Ce sont l’Iran, l’Islam et la Chine, lesquels rassemblent près de la moitié de l’humanité.

De ces adversaires, Bannon a dit, il y a déjà un an : « Il y a une Chine expansionniste […], et il y a un Islam tout autant expansionniste, arrogant, menaçant, qui croit que l’Occident judéo-chrétien est sur le déclin. »

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Plus récemment, il a précisé sa pensée : « Il ne fait aucun doute que d’ici cinq à dix ans, il y aura une confrontation armée entre les États-Unis et la Chine. »

« L’Iran ? Il faut qu’il cesse de chercher à déstabiliser le Moyen-Orient. Sinon il se heurtera à l’Amérique. »

Les hostilités ont commencé avec ces trois « adversaires déclarés », mais je ne vous parlerai ci-dessous que du conflit qui s’annonce avec la très grande puissance qu’est devenue la Chine.

*

Ici même, j’avais évoqué, plus d’une fois mais seulement en quelques mots, la perspective, alors seulement possible, d’une guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis.

Lorsqu’elle s’engagera et deviendra réalité, elle déstabilisera l’économie mondiale et pourrait même provoquer une nouvelle crise planétaire de l’ampleur de celle de 2008, dont les effets ne sont pas encore effacés.

Mais Steve Bannon, qui a fait élire Donald Trump car il a été son directeur de campagne, en est à prédire ou à souhaiter un affrontement militaire, d’ici à cinq ans, entre les deux premières puissances nucléaires du monde !

C’est terrifiant.

Car la guerre commerciale que Trump, Bannon et consorts vont incessamment engager avec la Chine précède et annonce cet affrontement militaire.

Comme les nuées précèdent et annoncent l’orage.

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Je sais que cela ne préoccupe pour le moment ni les Africains ni les Européens. Ils ne se sentent pas concernés, pensent qu’ils n’y peuvent rien et que cela passera par-dessus leurs têtes.

Ils ont tort de ne pas s’alarmer, de ne pas prendre au sérieux les élucubrations de Steve Bannon.

Elles rappellent le langage que tenait, en 1933, un certain Adolf Hitler et qu’on a pris, à l’époque, pour les divagations d’un esprit dérangé.

On nous menace d’une guerre entre les deux premières puissances militaires – et nucléaires – de la planète. Le numéro deux de l’un des futurs pays belligérants en parle comme d’une certitude et affirme que l’on en est aux préparatifs, à la constitution d’alliances.

On nous demandera demain de nous déterminer, de choisir notre camp, et l’on nous dira que « le non-alignement », toléré lors de la guerre froide entre les États-Unis et l’URSS, n’est plus de mise.

*

Je ne suis pas le seul à tirer la sonnette d’alarme.

Je lis, en effet, sous la plume de l’Américain Paul Krugman, Prix Nobel d’économie : « Nous avons à la tête des États-Unis un nouveau président et une nouvelle administration totalement incapables de gouverner un grand pays. Je vous le dis : cela va être terrible. »

Klaus Schwab, fondateur du World Economic Forum, dont la réunion annuelle a reçu cette année Xi Jinping, le président de la Chine, a déclaré à l’issue du Davos de cette année :

« Le revenu annuel de la Chine [en parité de pouvoir d’achat] va dépasser celui des États-Unis. L’Inde, le Brésil et d’autres pays émergents donnent au monde d’aujourd’hui une nouvelle physionomie.

Les enfants ont grandi et prennent leur indépendance. Les parents doivent l’accepter. »

*

Klaus Schwab ajoute que sa plus grande préoccupation est la relation tendue entre les États-Unis et la Chine.

Le langage guerrier de Steve Bannon doit être pris au sérieux.

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