Documentaire : « Makala », une vie au charbon

Makala, le documentaire d’Emmanuel Gras, a obtenu à Cannes le grand prix de la Semaine de la critique.

Kabwita Kasongo, ou le réel filmé à fleur de peau. © Les films du losange

Kabwita Kasongo, ou le réel filmé à fleur de peau. © Les films du losange

Renaud de Rochebrune

Publié le 9 juin 2017 Lecture : 2 minutes.

Un homme marche, deux haches à l’épaule, se dirige vers un arbre imposant et entreprend petit à petit de l’abattre, au prix d’un incroyable effort. Le tronc et les branches les plus massives sont ensuite débités en bûches qui sont transportées plus loin pour former dans une clairière un immense tas de bois. Celui-ci est recouvert de terre et, bientôt, le feu est allumé à l’intérieur de ce four traditionnel afin de transformer tout ce qu’il contient en charbon.

Kabwita Kasongo, l’homme dont on observe en silence le labeur, a entrepris cette tâche afin de gagner de quoi acheter des tôles. Seul moyen pour lui, qui vit dans un extrême dénuement, de disposer enfin d’une maison avec un toit étanche pour abriter sa famille – sa femme, Lydie, et ses trois enfants – dans son village du Katanga.

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Mais ce n’est là que le début d’une véritable épopée. Car, une fois les grands sacs de charbon remplis et chargés ensemble sur un vélo, il faut encore que le jeune Congolais emprunte d’improbables pistes, sans cesse frôlé par des camions, pendant les trois jours et deux nuits qu’il lui faut pour atteindre les faubourgs de Kolwezi. Où il aura bien du mal à négocier un prix convenable pour son combustible auprès d’acheteurs qui font jouer la concurrence entre vendeurs.

Au plus près du corps

Ce beau film sans commentaires, volontairement minimaliste mais jamais misérabiliste, est le second du jeune chef opérateur français Emmanuel Gras. Il a été reçu comme un choc par tous ceux qui l’ont vu au Festival de Cannes, où il a fort justement obtenu – une première pour un documentaire – le grand prix de la Semaine de la critique.

Car, en se faisant lui-même totalement oublier et en filmant au plus près du corps de Kabwita Kasongo ce parcours qui rappelle les travaux d’Hercule, le réalisateur permet de ressentir ce que vit et éprouve son héros, sans jamais se plaindre. Reste à espérer que les producteurs de Makala – « charbon », en swahili – ont fourni à leur formidable « acteur » ces tôles tant convoitées…

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