L’essor des zones commerciales dans les aéroports africains

Pour attirer plus de passagers et réduire les taxes des compagnies, de plus en plus d’aéroports africains misent sur la création de zones commerciales et d’espaces de détente.

Le nouveau terminal de Marrakech-Menara dispose d’une galerie marchande importante. © calflier001 by Wikimédia Commons

Le nouveau terminal de Marrakech-Menara dispose d’une galerie marchande importante. © calflier001 by Wikimédia Commons

Rémy Darras © Francois Grivelet pour JA

Publié le 23 juin 2017 Lecture : 3 minutes.

Au sein du nouveau terminal de Marrakech-Menara, inauguré en décembre 2016, comme dans les aéroports internationaux du Golfe ou d’Asie, rejoindre sa porte d’embarquement s’apparente à faire du lèche-vitrines. Comme si prendre l’avion était devenu une activité annexe tant sont nombreux ces magasins duty free, parfumeries, boutiques de mode, de spiritueux, restaurants et autres zones de détente. Alors que l’on s’attend à une croissance annuelle de 5,7 % du trafic aérien en Afrique dans les vingt prochaines années, de plus en plus d’aéroports regardent avec intérêt cette nouvelle manne « non aéronautique » générée aussi par les recettes de parkings, la location d’emplacements publicitaires ou de salons VIP, qui représentent en moyenne 40,4 % des ressources aéroportuaires dans le mondprès les chiffres établis en 2015 par le Conseil international des aéroports (ACI), et jusqu’à 60 % en Europe…

Arrivée des gros groupes

Pourtant, si les aéroports de Lomé et d’Abidjan ont récemment développé leur zone marchande, aujourd’hui encore les redevances payées par les compagnies aériennes (taxes d’atterrissage, de décollage, correspondance, stationnement des avions…) génèrent près de 70 % des revenus des hubs africains. Encore trop insuffisant pour faire face aux coûts d’entretien grandissants des terminaux et des pistes, et pour répondre aux investissements nécessaires à leur agrandissement.

Le fait que de plus en plus de groupes connus souhaitent s’implanter là où il n’y avait auparavant que des marques locales est un changement notable

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Pour aménager des surfaces commerciales et faire venir des marques internationales, les sociétés aéroportuaires s’appuient sur des opérateurs spécialisés à travers des concessions comme le sud-africain Big Five ou le leader mondial suisse Dufry (présent en Algérie, au Ghana, en Côte d’Ivoire, au Nigeria et au Kenya), qui gère le duty free de Marrakech-Menara. « L’opérateur paiera une redevance domaniale à la société aéroportuaire ainsi qu’une redevance commerciale fondée sur un pourcentage du chiffre d’affaires réalisé dans l’aéroport », indique Claude Deorestis, directeur général adjoint chez Servair, qui travaille actuellement dans les aéroports de Conakry, de Dakar et de Nouakchott au développement des boutiques de duty free.

« Le fait que de plus en plus de groupes connus souhaitent s’implanter là où il n’y avait auparavant que des marques locales est un changement notable », remarque-t‑il. Servair propose désormais aux aéroports une offre multimarque comprenant le fast-food Burger King, dont il possède la franchise pour l’Afrique subsaharienne, ainsi que des enseignes détenues en propre : Air Lounge Café ou Café Paradiso. Du coup, « sans bourse délier pour l’aéroport, l’opérateur réalise des investissements qui participent à l’amélioration de la qualité de services et à l’embellissement de l’aérogare », ajoute le responsable de Servair.

Revenus publicitaires et baisse du prix du billet

JCDecaux propose l’installation d’équipements comme des fumoirs, des bornes de recharge de téléphone, des zones wifi en échange de la publicité de grandes marques

Se défendant d’être une société de panneaux publicitaires, se voyant plutôt comme un fournisseur de services, JCDecaux Airport Africa, présent notamment en Afrique du Sud, en Angola et à Madagascar, propose l’installation d’équipements comme des fumoirs, des bornes de recharge de téléphone, des zones wifi en échange de la publicité de grandes marques. Mais « les revenus pourraient encore augmenter et être optimisés », pointe Alexandre Spezzotto-Simacourbe, directeur Afrique subsaharienne de JCDecaux Airport, qui regrette « la prolifération de panneaux publicitaires et des sociétés qui les commercialisent [22 à Johannesburg], une concurrence qui tire vers le bas les revenus publicitaires et les recettes touchées par l’aéroport ».

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En détenant l’exclusivité des espaces, JCDecaux reverse ainsi 50 % de ses revenus à l’aéroport. « Une solution rentable pour des sites à plus d’un million de passagers et qui devient très profitable à partir de 5 millions de voyageurs », calcule Ali Tounsi, secrétaire général d’ACI Afrique. Car ce partenariat entre opérateurs et aéroports, qui permet de réduire d’autant le niveau des taxes appliquées aux compagnies aériennes, a tout du cercle vertueux. « Cela entraîne une baisse du prix du billet d’avion, donc cela attire plus de compagnies et amène alors plus de passagers », explique Ali Tounsi. Pour lui, il est indispensable de construire aussi des cités aéroportuaires comprenant hôtels, centres de conférences, centres industriels, malls, comme le projet Aérocité à Abidjan prévu sur 3 700 hectares mais dont attend encore le démarrage des travaux.

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