« Coca-Cola veut vendre des boissons laitières et énergétiques, du thé, du jus », Matrona Filippou – Directrice générale Afrique de l’activité liquides non gazeux
Le groupe américain ambitionne de s’imposer dans le marché des produits non gazeux via des acquisitions.
Focus sur l’agro industrie en Afrique de l’Ouest
Huile de palme, Coca-cola, Gomme arabique : tous sont en pleine expansion sur le marché de l’Agro-industrie en Afrique de l’Ouest. Les pays s’intéressent de plus en plus à l’agro-industrie tout comme les groupes industriels étrangers qui y voient un marché en or.
The Coca-Cola Company (TCCC pour les initiés et les employés), ce n’est pas qu’un soda très sucré à l’étiquette rouge. Au-delà de la star des produits du groupe américain et de ses petites sœurs allégées en sucre, le leader mondial des boissons, établi à Atlanta, en Géorgie, détient plus de 500 marques différentes. Des jus (Minute Maid) à l’eau minérale (Dasani) en passant par le thé et le lait, TCCC entend couvrir l’offre la plus large possible. Une question de satisfaction client, selon le groupe, et d’intelligence stratégique face aux risques de santé liés aux sodas, pour les autres.
En Afrique aussi, le groupe pousse ses pions dans le domaine des boissons non gazeuses. Au Nigeria, il a investi depuis 2016 dans la société Chi, leader des jus et des boissons à base de lait. À Maurice et en RD Congo, il vient tout juste d’inaugurer des sites de production de jus, d’eaux minérales et sans doute demain de lait. La Sud-Africaine Matrona Filippou mène l’offensive de TCCC dans ce domaine sur une grande partie du continent.
Jeune Afrique : Quelle est la stratégie de Coca-Cola en matière de boissons non gazeuses ?
Matrona Filippou : À l’échelle mondiale, ce type de produits représente plus de 50 % des volumes vendus par l’industrie des boissons. Nous pensons que la croissance dans ce domaine sera forte. Notre volonté stratégique est d’être une entreprise de boissons complète, centrée sur le consommateur et capable d’offrir une grande variété de produits couvrant toutes les catégories pour répondre à l’ensemble des besoins et des goûts. Cela inclut les jus, les produits laitiers, les thés prêts à boire et les boissons énergétiques. L’Afrique est une priorité pour Coca-Cola, et nous souhaitons saisir toutes les occasions favorables, y compris en matière d’innovation, à travers notre portefeuille de produits et de marques, et également des acquisitions ciblées qui nous permettront d’accroître notre activité.
Si Coca-Cola se renforce en dehors des sodas, est-ce parce qu’il existe une inquiétude concernant les questions de santé liées au sucre ?
Nos boissons gazeuses et sucrées constituent une part importante de notre portefeuille global et le resteront. En élargissant notre gamme de produits non gazeux, notre objectif est de fournir au consommateur un large éventail de boissons et en même temps de contribuer à la croissance de notre business.
Produisez-vous des boissons non gazeuses partout en Afrique ?
Nos partenaires d’embouteillage au Nigeria, au Ghana, en RD Congo, au Sénégal et à Maurice, par exemple, ont réalisé d’énormes investissements dans des structures de fabrication avec des capacités variées de production de l’eau embouteillée, du jus et du thé. Nous continuons d’explorer les possibilités sur les 31 autres marchés dont j’ai la charge. En outre, il existe de nombreux autres débouchés en dehors de cette zone, comme l’Afrique du Sud, le Kenya, l’Égypte, etc., où nous produisons également des boissons non gazeuses. L’aventure n’en est qu’à ses débuts en Afrique !
Quels seront les prochains pays ?
Nous avons des marchés clés que nous voulons spécifiquement cibler, à l’exemple de la Côte d’Ivoire et du Cameroun, qui recèlent des capacités de croissance extraordinaires.
Quels types de produits et de marques votre stratégie couvre-t‑elle ?
Notre stratégie consiste à nous focaliser sur les produits laitiers à valeur ajoutée, les jus, le thé prêt‑à-boire et l’eau. Coca-Cola a par exemple misé sur Chi, qui est le plus grand producteur de boissons laitières et de jus au Nigeria. De même, la compagnie a récemment réalisé plusieurs investissements stratégiques importants à travers le monde pour les produits laitiers.
Chi a été votre plus importante acquisition dans le domaine des boissons non gazeuses. Elle s’est faite au Nigeria, en pleine crise économique. Avec le recul, était-ce un bon choix ?
Oui, la décision de réaliser cette acquisition était très bonne et le demeure en raison de la qualité de l’entreprise et de ses produits. La croissance des volumes reste solide, et Chi continue de figurer parmi les compagnies nigérianes de boissons affichant les meilleurs taux de croissance. Malgré le contexte économique difficile, nous croyons beaucoup au potentiel du Nigeria.
Comment une compagnie mondiale comme Coca-Cola, surtout connue pour ses grandes marques, arrive-t‑elle à faire une place à des marques locales ?
Ce que nous faisons, c’est prendre les pépites locales, étendre leur développement et les amener à croître au niveau régional ou même à l’échelle continentale. Nous avons réussi cela avec un grand succès, par exemple avec la marque Del Valle en Amérique latine. Nous entendons renouveler la même expérience en Afrique.
Envisagez-vous d’autres acquisitions sur le continent ?
Soutenir la croissance d’opérateurs régionaux, ou même plus petits, à travers des investissements et des acquisitions stratégiques, est l’un des leviers de notre stratégie de croissance.
Dans plusieurs marchés africains, particulièrement en Afrique francophone, vous avez décidé de ne pas travailler avec vos embouteilleurs classiques et d’en trouver de nouveaux pour les boissons non gazeuses. Pourquoi ?
Nous étudions toutes les partenariats possibles avec les embouteilleurs qui démontrent un intérêt et une soif d’investissement. L’objectif est d’être un acteur clé sur le marché des boissons non gazeuses.
Comment choisissez-vous ces nouveaux partenaires ?
Ils doivent être alignés en matière de stratégie à long terme avec TCCC et également être prêts à prendre des risques et à investir avec nous.
L’industrie des boissons accueille depuis quelques années beaucoup de petits investisseurs locaux qui offrent des produits moins chers que les vôtres. Comment vous adaptez-vous ?
Nous restons concentrés sur nos marques et sur la qualité de nos produits. Concernant la question des prix, afin de rester compétitifs, nous travaillons activement sur la gestion de nos coûts tout au long du cycle de production et de distribution.
Un nouveau partenaire en RD Congo
En RD Congo, où Coca-Cola travaille avec le brasseur Heineken (qui embouteille la partie soda), le groupe américain a décidé de s’associer avec un nouveau partenaire pour la partie non gazeuse de son activité : la famille Psaromatis et son groupe Hyper Psaro, spécialisé dans le commerce de gros, la distribution de carburant, l’agroalimentaire et la logistique.
Les deux partenaires ont inauguré, en mars à Lubumbashi, une nouvelle usine dotée d’une capacité de production de 17 000 bouteilles PET et de 12 000 cartons aseptiques par heure
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