Maroc : « Au sein de la Chambre des conseillers, l’opposition dépasse la dimension partisane »
Le Rifain Hakim Benchamach est le président de la Chambre des conseillers et le président du conseil national du Parti authenticité et modernité (PAM). Il a répondu à nos questions sur l’opposition.
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Président de la seconde chambre du Parlement depuis octobre 2015, Hakim Benchamach est réputé pour ses joutes oratoires. Natif de Beni Bouayach, près d’Al Hoceima, ce Rifain de 53 ans est l’un des cadres fondateurs du Parti Authenticité et Modernité (PAM), qui compte de 23 sièges sur 120 au sein de la Chambre des conseillers, contre 24 pour l’Istiqlal et 12 pour le PJD.
Jeune Afrique : L’un des critères pour évaluer l’efficacité d’une opposition parlementaire est le nombre de propositions de loi déposées. Combien l’ont été à la chambre haute depuis que vous la présidez ?
Hakim Benchamach : Quoique peu nombreuses et en deçà des attentes, 27 propositions y ont été déposées depuis octobre 2015, contre 25 au cours de la précédente législature. Mais la Chambre des conseillers est également présente en matière de législation à travers l’importance, en nombre et en qualité, des amendements : pour la seule année législative 2015-2016, elle a ainsi apporté 1 469 amendements, concernant 21 textes.
Principaux partis ayant fait le choix de rester dans l’opposition, le PAM et l’Istiqlal coordonnent-ils leurs actions ?
Au niveau de la Chambre des conseillers, l’opposition dépasse la dimension strictement partisane. Outre le groupe Authenticité et Modernité et le groupe de l’Istiqlal, qui représentent deux partis de l’opposition, cette chambre compte des formations et des groupements de syndicats de travailleurs, ainsi qu’un groupe d’employeurs, qu’on ne peut considérer comme faisant partie de la majorité.
Du coup, l’ensemble de la Chambre des conseillers, de par sa composition et l’étendue de ses représentations, voit son action progresser vers une opposition évoluée : une opposition parlementaire davantage tournée vers le questionnement, l’évaluation des choix et des politiques publiques.
Que répondez-vous à ceux qui jugent l’opposition parlementaire inutile et estiment que la véritable opposition au Maroc se trouve dans la rue ?
Il est vrai que de larges franges de la société, assoiffées de justice sociale, choisissent la rue pour exprimer leur désaccord sur les politiques en vigueur. Cela témoigne d’un certain manque de confiance envers les institutions. À ces concitoyens, je dirais : oui, vos revendications sont fondées et justifiées ; oui, la justice sociale et territoriale laisse à désirer ; mais la rue est synonyme de chaos, et il n’est nullement concevable de faire marche arrière sur le plan de la démocratie, de l’État de droit et des institutions.
Par ailleurs, j’ai toujours clamé qu’un Parlement qui ne constituerait pas un espace de débat et de dialogue sociétal dans toute sa pluralité manquerait sérieusement de dignité. Pour traduire ces paroles en actes, nous avons instauré au sein de la seconde chambre un forum parlementaire annuel de la justice sociale, auquel prennent part tous les acteurs institutionnels et civils concernés.
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