Architecture : Francis Kéré, la simplicité faite star

Le Burkinabè est une référence dans le monde entier. Sa marque de fabrique : prouesses techniques, design épuré et gros supplément d’âme.

Diébédo Francis Kéré, devant le pavillon 2017 de la Serpentine Gallery, à Londres. © Geoff Pugh/Shutterstock/SIPA

Clarisse

Publié le 16 août 2017 Lecture : 3 minutes.

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Si Diébédo Francis Kéré partage une grande partie de son temps et de ses projets entre sa terre natale du Burkina Faso et son pays d’adoption, l’Allemagne, sa dernière réalisation peut être admirée et visitée (depuis le 23 juin et jusqu’au 8 octobre) au parc de Kensington Gardens, au cœur de Londres. L’air y circule librement. On y est à l’abri de la chaleur de l’été comme de la pluie londonienne. Immense structure circulaire et épurée de bois et d’acier, le pavillon 2017 de la Serpentine Gallery reproduit à la fois la canopée et l’arbre à palabres des villages africains. Un design innovant, à la fois sobre et très technique, à l’image de son créateur.

L’architecte récompensé

À 51 ans, Francis Kéré est le premier Africain choisi par la direction du célèbre musée d’art contemporain londonien pour concevoir son pavillon éphémère – dont la construction est confiée chaque année depuis 2000 à « l’un des plus éminents architectes du monde ».

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Cet été, le Germano-Burkinabè brille également à Berlin grâce à une scène de théâtre démontable installée dans l’ancien aéroport de Tempelhof, où il dit avoir « voulu ouvrir un espace de vie et de rencontres ».

Fin mars, il a reçu le prestigieux Arnold W. Brunner Memorial Prize 2017 de l’American Academy of Arts and Letters, aux États-Unis, et, en début d’année, la pinacothèque d’Art moderne, à Munich, lui a consacré une rétrospective intitulée « Radically Simple » : un hommage au « high-tech rural » et à la modestie de l’apprenti charpentier devenu architecte.

Avec lui, la construction s’avère à la fois élémentaire et essentielle, locale et globale, d’une apparente simplicité et d’une grande profondeur. Il ramène l’architecture à son essence et lui insuffle l’âme, la technique et l’art africains.

Il construit même en Chine

Son cabinet, Kéré Architecture, est installé à Berlin, où il a obtenu son diplôme d’architecte en 2004, et compte désormais une dizaine de collaborateurs.

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Ses maquettes et photos sont exposées dans les centres d’art contemporain du monde entier, il captive les auditoires aux États-Unis, enseigne en Suisse où il a conçu la scénographie du musée de la Croix-Rouge en coordination avec d’autres architectes.

Il construit même en Chine, où il a agrémenté le grand port de Zhou Shan d’un jardin de « créativité culturelle ». Mais c’est la réalisation de l’école de Gando, son village natal du Burkina, achevée en 2001 alors qu’il était encore étudiant, qui l’a révélé au monde entier et lui a valu le Prix Aga Khan d’architecture en 2004.

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Le bâtiment est simple mais parfaitement adapté à la chaleur de cette région sahélienne, où la sécheresse succède aux violentes pluies tropicales. Il offre une ventilation et une régulation naturelle de la température, utilise des matériaux locaux consolidés, notamment des briques de terre séchée mêlée à du ciment…

Des techniques traditionnelles réinventées, une haute technologie, une approche bioclimatique, mais aussi une élégance qui font la renommée de l’architecte dans le monde entier.

Bientôt un nouveau parlement à Ouaga

Depuis plus de quinze ans, Francis Kéré s’est investi dans de nombreux projets en Afrique, où il s’appuie sur une équipe d’une soixantaine de salariés burkinabè, et peut en toute légitimité disserter sur le concept d’architecture africaine.

Celui qui rêvait juste de « devenir un bon maçon pour [son] village » a réalisé des centres de santé et des écoles à travers le continent, plusieurs bâtiments du parc national de Bamako, au Mali, des écoles et des logements au Mozambique, un musée d’argile au Kenya, ou encore le « village Opéra » de Laongo, près de Ouagadougou (une salle de spectacle entourée de centres de formation dans les arts et l’artisanat), qu’il a imaginé avec le cinéaste allemand Christoph Schlingensief, décédé en août 2010.

Son prochain projet : un nouveau siège pour le Parlement burkinabè, à Ouaga – l’ancien bâtiment a été détruit lors du soulèvement populaire d’octobre 2014 –, où la démocratie sera symbolisée par une pyramide à étages semi-transparente, au sommet de laquelle les citoyens pourront s’asseoir pour observer l’horizon.

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