Unita : Isaías Samakuva, le baroud d’honneur

Candidat à l’élection présidentielle angolaise du 23 août, Isaías Samakuva président de l’Unita espère bénéficier de la contestation sociale et de la crise économique qui secouent le pays depuis deux ans.

Le 3 juin à Luanda, le leader de l’opposition a pris la tête d’une manifestation demandant la transparence pour les prochains scrutins. © ampe rogerio/AFP

Le 3 juin à Luanda, le leader de l’opposition a pris la tête d’une manifestation demandant la transparence pour les prochains scrutins. © ampe rogerio/AFP

ProfilAuteur_MichaelPauron

Publié le 11 août 2017 Lecture : 3 minutes.

Depuis le lancement de sa campagne, à Luanda le 22 juillet, le « président Samakuva » arpente l’Angola sans relâche. À quinze jours des élections générales du 23 août (législatives, puis présidentielle via le vote du Parlement), le candidat de l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita) joue son va-tout dans un scrutin historique à plusieurs titres.

D’abord, il marquera le départ de José Eduardo dos Santos, au pouvoir depuis presque trente-huit ans. Ensuite, le pays, deuxième producteur de brut en Afrique, vit une crise économique sans précédent provoquée par la chute des cours du pétrole. Inflation et pénuries alimentaires ont poussé les Angolais dans la rue, soutenus par des personnalités comme le rappeur Luaty Beirão, emprisonné durant plus d’un an entre 2015 et 2016. Dans ce contexte, Isaías Henriques Ngola Samakuva, 71 ans, espère mobiliser ses compatriotes contre le parti présidentiel, le Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), et son candidat, le ministre de la Défense João Lourenço.

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Très proche de Jonas Savimbi, le fondateur de l’Unita tué en 2002, Samakuva est l’artisan de la transformation politique de l’ex-mouvement rebelle. « Sa ligne tempérée, en opposition à celle, plus belliciste, du général Paulo « Gato », a permis la survie de l’Unita, même si en réalité le parti la doit surtout au bon vouloir du président dos Santos », relève un ancien diplomate européen qui fut en poste à Luanda. Les relations avec le chef de l’État n’en demeurent pas moins quasi inexistantes : Isaías Samakuva ne l’a rencontré que trois fois en quinze ans.

Il rejoint l’Unita en 1974

« Nos sympathisants nous poussent à être plus virulents, mais le président Samakuva a toujours joué la carte de la réconciliation nationale », estime Alcides Sakala, député et porte-parole de l’Unita.

Né en 1946 à Kunje, dans la province de Bié, Isaías Samakuva rejoint l’Unita en 1974. Un an plus tard, à la suite des accords d’Alvor, qui marquent l’indépendance de l’Angola, il entre au ministère du Travail dans le gouvernement de transition. Mais, dès février 1976, alors que la guerre civile s’installe, il rejoint Savimbi dans le maquis. Au fil des années 1980, il gravit les échelons, accompagne le chef rebelle dans la plupart de ses déplacements.

Libéral convaincu, il est l’un des vice-présidents de l’Internationale démocrate centriste, qui rassemble notamment Ali Bongo, Alassane Ouattara ou Angela Merkel

Dans les années 1990, il se rend plusieurs fois en Afrique du Sud, où il rencontre notamment Nelson Mandela, pourtant opposé à toute ingérence, contrairement au régime de l’apartheid, allié de la première heure de l’Unita. En 1998, quatre ans après le protocole de Lusaka, la situation se dégrade à nouveau. Il cherche alors à rejoindre Londres, où sont installés son épouse, Albertina, et ses cinq enfants. Faute de visa, il atterrit finalement à Paris, où il fait office de ministre des Affaires étrangères de l’Unita. Il ne rentre qu’après le décès de Savimbi et remporte en 2003 la présidence du parti face à Paulo Gato.

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Ce libéral convaincu est l’un des vice-présidents de l’Internationale démocrate centriste, qui rassemble notamment le Parti démocratique gabonais, d’Ali Bongo, le Rassemblement des républicains, d’Alassane Ouattara et l’Union chrétienne-démocrate, d’Angela Merkel. « Sérieux, courtois, correct, sans plus », selon un Premier ministre de la région, Samakuva ne fait pas l’unanimité, y compris au sein de l’Unita, qui a connu quelques défections de cadres ces dernières années. Le départ en 2011 de son ancien chef de campagne, Abel Chivukuvuku, qui a créé son propre parti, le Casa Ce, en 2012, a été perçu comme un sérieux revers. « L’Unita n’a pas su se renouveler.

Et l’habileté avec laquelle dos Santos a conduit la réconciliation l’a aseptisée et privée d’incarner une alternative », analyse le chef de gouvernement d’un pays voisin. Pour beaucoup, si l’Unita peut faire mieux qu’en 2012 (elle avait recueilli moins de 19 % des voix), il s’agira surtout d’un vote contestataire. Alors, est-ce la dernière bataille d’Isaías Samakuva ? « Pour l’instant, nous sommes concentrés sur la campagne », répond-on simplement au sein de son état-major.

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