Emmanuel Macron peut-il être un modèle d’opposition en Afrique ?

Depuis que le nouveau président français, Emmanuel Macron, a laminé la classe politique de son pays, les « mouvements » se multiplient en Afrique francophone pour tenter de l’imiter.

Le président français Emmanuel Macron, à Paris, le 23 mai 2017. © Michel Euler/AP/SIPA

Le président français Emmanuel Macron, à Paris, le 23 mai 2017. © Michel Euler/AP/SIPA

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 21 août 2017 Lecture : 3 minutes.

Jeudi 3 août, dans la salle de réunion d’un luxueux hôtel de la banlieue de Bruxelles, les lieutenants de l’opposant congolais Moïse Katumbi réfléchissent à une stratégie pour leur champion en vue de la prochaine élection présidentielle. Pour les aider, ces politiques madrés ont invité une jeune cadre de La République en marche (LREM, le parti du président français, Emmanuel Macron) à leur faire une présentation. « Focus group » avec les électeurs, hiérarchisation du mouvement, nouvelles technologies, conquête de l’Assemblée nationale avec des novices… Devant cet auditoire aux aguets, elle raconte, de l’intérieur, la folle épopée d’un homme qui, à 39 ans, a balayé en quelques mois la classe politique vieillissante de son pays. Un rêve pour tant et tant d’ambitieux réformateurs africains, parfois confrontés à des présidents en place depuis des décennies.

Les lieutenants de Katumbi ont invité une cadre de La République en marche pour les conseiller.

Katumbi, lui-même ancien poids lourd de la mouvance présidentielle, ne devrait pas tarder à lancer son propre mouvement. « Il existe des similitudes entre les deux hommes, assure son porte-parole, Olivier Kamitatu. Tous deux veulent changer les choses avec des gens issus de tous les horizons, de l’opposition à la majorité. »

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Quant aux préalables à cette campagne – le retour de Katumbi sur ses terres en citoyen libre et l’organisation de la présidentielle –, la jeune macroniste, en revanche, a séché. Ce n’est pas le type d’obstacle auquel elle a été confrontée.

Tous comme Macron

Il n’empêche : en Afrique francophone, on ne compte plus les « mouvements » nés autour de personnalités politiques au cours des derniers mois. Passés de mode, les partis politiques ont été laminés lors de la présidentielle française.

Et peu importe si, sur le continent, les partis étaient déjà, bien souvent, au service d’un leader charismatique. « Les Maliens en ont marre de nos politiciens : ce sont les mêmes depuis la démocratisation, en 1991 », clame Adama Diakité, vice-président de Yelema, le parti de Moussa Mara.

« Bien sûr que Macron nous a inspirés, et nous ne sommes pas les seuls !

Cet ancien Premier ministre (2014-2015) âgé de 42 ans songe à quitter la tête de cette formation pour prendre celle d’un mouvement plus large, consacré notamment à la société civile et à la jeunesse.

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« Bien sûr que Macron nous a inspirés, et nous ne sommes pas les seuls ! poursuit Diakité. Partout en Afrique, il représente un espoir. »

L’avocat camerounais Akere Muna, qui, à 64 ans, réfléchit à une candidature à l’élection présidentielle de 2018, envisage lui aussi une campagne basée sur le modèle de LREM – dont il a consulté certains membres.

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L’homme d’affaires congolais et gendre de José Eduardo dos Santos, le président angolais, a pour sa part lancé un « mouvement citoyen » le 10 août pour obtenir l’alternance en RD Congo en 2017.

Et tous au « centre »

Autre leçon macronienne étudiée sur le continent : son « ni droite ni gauche ». En Côte d’Ivoire, ce concept a éveillé l’intérêt du président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, qui ne croit plus aux formations du monde ancien.

Le 8 juillet, Soro lui-même participait à la convention de LREM à Paris, aux côtés de… Moïse Katumbi !

L’ancien rebelle tend désormais la main tous azimuts : aux partisans de feu l’ancien président Félix Houphouët-Boigny comme à ceux de son opposant de toujours, Laurent Gbagbo. Le 8 juillet, Soro lui-même participait à la convention de LREM à Paris, aux côtés de… Moïse Katumbi !

Et le 10 août, ses partisans ont annoncé la création d’un « mouvement politique » – et non d’un « parti » – baptisé l’Amicale des forces nouvelles.

Mais cette manière de s’adresser directement aux citoyens, par-delà les clivages, peut-elle fonctionner sur un continent où le vote est souvent déterminé par l’appartenance régionale, voire communautaire ? La prochaine présidentielle pourrait bien doucher quelques espoirs.

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