Maroc : la mise au point d’Ilyas El Omari

Répercussion d’un mauvais bilan ? du discours du Trône ? de la crise du Rif ? Face aux rumeurs entourant sa démission de la direction du PAM, le président de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima s’explique.

Ilyas El Omari, ancien secrétaire général du Parti authenticité et modernité (PAM). © Alexandre DUPEYRON / JA

Ilyas El Omari, ancien secrétaire général du Parti authenticité et modernité (PAM). © Alexandre DUPEYRON / JA

fahhd iraqi

Publié le 17 août 2017 Lecture : 3 minutes.

Costard noir, cravate noire, lunettes noires… C’est aussi d’une humeur noire qu’Ilyas El Omari, 50 ans, s’est présenté à la presse le 8 août à Rabat au siège du Parti Authenticité et Modernité (PAM), première formation de l’opposition et deuxième force politique du pays.

Face au crépitement des flashs, il serre nerveusement les boutons de sa veste, se force à esquisser un sourire, puis fait signe des deux mains aux photographes de baisser leurs objectifs.

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À la tribune, le fauteuil encore mal ajusté à l’aune de la forêt de micros qui l’entoure est rapidement rehaussé. Le désormais ex-secrétaire général du PAM s’y installe et, solennel, prononce ses premiers mots : « Vous avez certainement suivi, pendant la nuit, le communiqué du bureau politique du PAM, et vous devez vous demander pourquoi j’ai démissionné et pourquoi je l’ai fait aujourd’hui. »

El Omari s’en va à contre-cœur

Tard dans la soirée du 7 août, l’annonce était en effet venue secouer le microcosme politico-médiatique.

Pourquoi El Omari jetait-il l’éponge ?

« La décision s’est imposée à moi lorsque j’ai entendu les intervenants au cours de [la] réunion du bureau politique et au vu du bilan dressé par la commission qui a travaillé sur les neuf ans d’existence du PAM, poursuit El Omari. Ce bilan justifie des sanctions contre un certain nombre d’élus. Nos parlementaires s’absentent des sessions et des travaux de commission de façon délibérée. Nos élus dans les assemblées territoriales ne respectent pas les engagements pris envers les électeurs. Je me suis dit qu’ils ne devaient pas être les seuls à rendre des comptes. En tant que secrétaire général, j’étais responsable de les avoir choisis ou d’avoir validé leurs candidatures. »

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Ilyas El omari, pointé du doigt

Même s’il n’a assumé que pendant un an et demi la responsabilité du parti, à la tête duquel il avait été élu à l’unanimité, Ilyas El Omari s’est senti concerné, dit-il, par le discours du Trône de Mohammed VI le 29 juillet, très sévère à l’égard de la classe politique.

Certains sont d’ailleurs allés jusqu’à penser que sa démission était « orchestrée » par le Palais pour mettre dans l’embarras d’autres zaïms de la politique qui ne veulent lâcher ni leur poste ni leurs prérogatives.

On m’impute tout et n’importe quoi, même les erreurs de gestion du gouvernement

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Une lecture qu’El Omari balaie d’un revers de la main. « Ma décision est indépendante, individuelle. Personne ne me l’a dictée. Personne ne m’a d’ailleurs jamais dicté une décision. Le Maroc a changé et le temps des ordres venus d’en haut est révolu. Quelles que soient les erreurs commises par le PAM, c’est Ilyas El Omari qui les assume », a-t-il tranché, en ajoutant qu’il ne quittait pas le parti.

Il restera à la tête de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima

D’autres observateurs voient dans sa démission un lien direct avec la tension sociale qui agite le Rif depuis octobre 2016. Le président de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima a tenu à préciser qu’il n’en était rien.

« Il n’y a aucune relation avec ce qui se passe à Al Hoceima. Même si certains ne se gênent pas pour m’insulter et me tenir pour responsable de la situation dans le Rif, je n’ai qu’amour pour cette région et pour mon pays. On m’impute tout et n’importe quoi, même les erreurs de gestion du gouvernement, qui est le vrai responsable de la crise née à Al Hoceima. » Et de préciser qu’il ne compte en rien renoncer à son mandat à la tête de sa région natale, qu’il « ne [peut] pas trahir la population »…

Le départ d’Ilyas El Omari devrait être entériné par une réunion du conseil national du PAM, dont la date n’a pas encore été fixée.

En attendant la tenue d’un congrès extraordinaire fin septembre-début octobre au cours duquel sera désigné un nouveau chef, c’est Habib Belkouch, membre du bureau politique, qui a été chargé par ses pairs d’assurer l’intérim.

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