Cinéma – Gabriel et la montagne : touriste ou voyageur ?

Une nuit de 2009, un corps est retrouvé sous un gros rocher sur les flancs du mont Mulanje, au Malawi. C’est celui du jeune Gabriel Buchmann, mort de froid deux semaines auparavant. Ainsi s’est tragiquement terminé dans un magnifique site africain, après un séjour au Kenya puis en Zambie, le périple autour du monde de cet étudiant brésilien de famille aisée qui voulait vivre une année sabbatique riche en rencontres et en émotions avant de poursuivre ses brillantes études à Harvard, aux États-Unis.

Gabriel et la montagne, de Fellipe Barbosa, est à la limite du documentaire et de la fiction, car le « héros » du film, tourné par celui qui fut son meilleur ami, a vraiment existé, et la plupart des personnages jouent leur propre rôle. Ce long-métrage qui a bouleversé tous ceux qui l’ont vu à la Semaine de la critique au dernier Festival de Cannes traite une question essentielle : quelle est la différence fondamentale entre un touriste et un voyageur ? Ou plutôt : comment réussir à ne pas être un touriste quand on voyage, en particulier dans les pays pauvres ?

Gabriel, qui se voulait « pur » voyageur, a payé de sa vie son échec à trouver la réponse. Car il croyait qu’il suffisait d’imiter autant que possible le mode de vie des autochtones et de tenter à tout prix de s’en faire des amis pour échapper à la condition exécrable du visiteur sûr de lui et dominateur, parcourant en voyeur des régions sous-développées. Il l’a appris à ses dépens : un étranger de passage reste toujours un étranger et il ne gagne rien à vouloir l’ignorer.