Gabon : Bruno Ben Moubamba, un Macron noir, vraiment ?

Écarté du gouvernement, l’ancien vice-Premier ministre se dit toujours l’allié du président Ali Bongo Ondimba. Tout en proposant une troisième voie aux Gabonais pour les législatives de 2018.

Le leader de l’Alliance pour le changement et le renouveau, Bruno Ben Moubamba. © Jérôme Senyarich-Edot

Le leader de l’Alliance pour le changement et le renouveau, Bruno Ben Moubamba. © Jérôme Senyarich-Edot

MATHIEU-OLIVIER_2024

Publié le 25 septembre 2017 Lecture : 3 minutes.

«Je suis serein. » En entendant les premiers mots que Bruno Ben Moubamba (BBM) adresse à Jeune Afrique, on a du mal à imaginer que l’homme vient de se faire limoger. Mais l’ancien journaliste, docteur en philosophie et en sciences politiques, a de la ressource : ce n’est pas la première fois que son ambition et, sans doute, son ego l’aident à surmonter une déception.

Nommé vice-Premier ministre et ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat social et du Logement en octobre 2016, après un scrutin présidentiel dans lequel il avait récolté un peu plus de 0,5 % des voix, il avait déjà été rétrogradé au rang de « simple » ministre d’État lors du remaniement du 21 août.

Il a commis l’erreur de s’attaquer au Parti démocratique gabonais au pouvoir et au Mogabo, proche d’Ali Bongo

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Le 6 septembre, lorsqu’il prend connaissance d’une circulaire de la primature le privant d’une partie de ses prérogatives dans le logement, son sang ne fait qu’un tour. Il interpelle Emmanuel Issoze Ngondet, le chef du gouvernement, avec lequel il entretient de fraîches relations. « Vous voulez me faire partir et m’humilier ? N’utilisez pas des moyens déloyaux. Je ne suis pas venu au gouvernement pour vous servir de punching-ball », écrit-il sur Facebook.

Réponse immédiate du Premier ministre : le limogeage, pour avoir trahi « la solidarité, le devoir de réserve et le respect de la hiérarchie ». Il le remplace par Josué Mbadinga Mbadinga. « J’ai choisi de pousser le Premier ministre à assumer mon départ », assure Ben Moubamba, qui estime être « sorti par la grande porte ».

Double jeu

« Cela faisait des mois qu’il jouait un double jeu : chef d’un parti d’opposition et ministre. Ça ne pouvait pas continuer », confie un proche du gouvernement. « Il a commis l’erreur de s’attaquer au Parti démocratique gabonais [PDG, au pouvoir] et au Mogabo [Mouvement gabonais des amis d’Ali Bongo Ondimba] », souligne un autre observateur.

Fier des projets lancés en faveur du logement, « BBM » reste persuadé qu’Ali Bongo Ondimba le soutient toujours. « Mon alliance avec le chef de l’État est intacte », clame-t-il, entendant désormais incarner une troisième voie entre le PDG et Jean Ping. « Je suis en contact avec tout le monde. Finalement, je n’ai jamais été aussi populaire », glisse encore le représentant de l’une des trois branches rivales de l’Union du peuple gabonais (UPG, créée par feu Pierre Mamboundou).

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Comparaison avec Macron

Se comparant au président français Emmanuel Macron par sa volonté de « rassembler tous les camps », il a les yeux fixés sur les législatives, censées se tenir avant avril 2018, lors desquelles il espère fédérer autour du « Gabon d’après », un programme de renouvellement politique.

Candidat à Moabi, à quelques kilomètres du village d’origine de sa mère, dans le Sud-Ouest, ce « centriste » de 50 ans, « pas forcément opposant mais réformateur », compte mener campagne pour son parti, l’Alliance pour le changement et le renouveau, qui devrait compter des prétendants dans les 120 circonscriptions. Mais la troisième voie est-elle la bonne pour l’inconnu révélé en 2008 par un pamphlet étrillant la gouvernance d’Omar Bongo Ondimba ?

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Certes, une partie de la presse d’opposition salue sa sortie du gouvernement. Mais beaucoup le critiquent encore. « C’est un opportuniste qui ne représente pas grand-chose », lâche un opposant. « Il aura du mal à rassembler l’opposition radicale. Son parti va être affaibli, et les législatives ne vont pas être simples », pronostique quant à lui Mike Jocktane, ancien vice-président de l’Union nationale (UN).

« Je crie pour le moment dans le désert, mais, souvent, ceux qui le traversent finissent par se faire entendre », rétorque l’intéressé. Adepte des grèves de la faim comme méthode de protestation, Bruno Ben Moubamba a en tout cas déjà pour lui l’expérience du vide.

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