Venezuela : Tareck El Aissami, un baasiste à Caracas
Homme fort du régime, le vice-président Tareck El Aissami, qui est d’origine syro-libanaise, deviendrait en cas de destitution de Nicolás Maduro son successeur constitutionnel.
La nomination à la vice-présidence du Venezuela, le 4 janvier, de Tareck El Aissami (42 ans) a suscité de vives inquiétudes sur la scène internationale. Et pas seulement parce que l’intéressé est un dur de dur du régime chaviste. Non, depuis 2015, il est aussi dans le collimateur de la justice américaine, qui l’accuse froidement de corruption et de trafic de cocaïne.
A-t‑il vraiment facilité, supervisé et organisé des livraisons massives aux États-Unis et au Mexique de stupéfiants en provenance du Venezuela ? Est-il lié au cartel mexicain de Los Zetas ? A-t‑il travaillé avec Walid Makled García, l’un des barons de la drogue vénézuéliens ? A-t‑il assuré la protection de trafiquants colombiens ? Cela fait beaucoup de questions pour l’instant sans réponse.
Dans le collimateur de la justice américaine
Quoi qu’il en soit, les États-Unis ont, un mois après sa nomination par le président Nicolás Maduro, gelé ses avoirs et fermé ses entreprises sur leur territoire. Toute transaction commerciale transitant par le système financier américain lui est désormais interdite. Sur son compte Twitter, l’intéressé a dénoncé une « agression impérialiste infâme » et des « provocations minables ».
Selon plusieurs observateurs étrangers, Tareck El Aissami entretiendrait par ailleurs des liens avec diverses organisations islamistes radicales au Moyen-Orient, au premier rang desquelles le Hezbollah libanais. Né à Mérida, dans l’ouest du Venezuela, il est en effet le fils d’un immigrant druze de Soueïda, dans le sud de la Syrie, et d’une Libanaise.
À l’époque de ses études de droit et de criminologie à l’université des Andes, il était même membre de la section vénézuélienne du parti Baas syrien. En 2014, le think tank Center for a Secure Free Society, dont le siège est à Washington, l’a accusé d’avoir joué « un rôle clé dans la tentative d’extrémistes musulmans de créer un réseau en Amérique latine afin de financer le terrorisme à travers le monde ».
Partisan de la révolution bolivarienne
À Caracas, ces nouvelles accusations visant le successeur constitutionnel du chef de l’État suscitent l’exaspération. Quand Maduro l’a appelé auprès de lui, El Aissami était un dirigeant influent du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV, au pouvoir) et, depuis 2012, le gouverneur de l’État d’Aragua, l’un des plus violents du pays.
Confronté à une crise économique, sociale et politique gravissime, le président avait besoin d’un homme sûr. Il n’aurait pas pu trouver mieux. Condisciple d’Adán Chávez, le frère aîné de Hugo, à l’université, El Aissami a toujours été un partisan enthousiaste de la révolution bolivarienne. Et un compagnon de la première heure du fondateur du Mouvement Ve République.
En 1992, lors du coup d’État manqué contre le président social-démocrate Carlos Andrés Pérez, il était déjà à ses côtés. Il l’était toujours quand, en 1998, Chávez a été élu à la présidence. Lui-même est devenu député en 2005, puis vice-ministre de la Sécurité civile (2007-2008), ministre des Relations intérieures et de la Justice, et, pour finir, gouverneur de l’Aragua.
Allié de confiance de Nicolas Maduro
Son point faible ? Contrairement à un autre dauphin potentiel, le ministre de la Défense Vladimir Padrino López (voir JA no 2955), il n’est pas militaire.
Son principal atout : Maduro lui fait une totale confiance. De toute façon, la Constitution prévoit que, en cas de destitution du président, le vice-président lui succède automatiquement. Le mandat présidentiel ne s’achèvera qu’en janvier 2019, mais l’opposition de droite, majoritaire au Parlement depuis les législatives de 2015, ne ménage pas ses efforts pour hâter le départ de Maduro, qu’elle juge responsable du désastre économique en cours.
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