Investissement : Casablanca Finance City, premier hub africain
Cinq ans après son démarrage, la place marocaine s’est imposée comme premier hub africain. Mais elle est encore loin d’avoir atteint son plein potentiel. Bilan d’étape.
Lloyd’s, Allianz, Thomson Reuters, M2M Group… autant de groupes de premier plan qui, dans le courant de 2017, ont décroché le label Casablanca Finance City (CFC). En cinq ans d’activité, la place marocaine, calquée sur des hubs financiers comme la City de Londres ou Dubai International Financial Centre (DIFC), a fait ses preuves. Elle rassemble désormais une communauté de plus de 130 groupes issus d’une vingtaine de pays situés sur quatre continents. C’est que CFC séduit par sa batterie d’incitations fiscales et par le positionnement stratégique du Maroc comme nouveau tremplin pour les marchés africains. Ayant intégré le Global Financial Centres Index, en 2014, la place n’a cessé d’avancer dans le classement et est devenue le premier hub financier du continent : CFC est 35e dans la dernière mise à jour, alors que Johannesburg est relégué au 48e rang ou que Maurice traîne à la 69e position.
Mais CFC ne se repose pas pour autant sur ses lauriers. « Notre ambition est d’atteindre, à l’horizon 2025, une communauté d’affaires de 500 membres », promet Saïd Ibrahimi, président de Casablanca Finance City Authority (CFCA). Pour ce faire, l’instance gestionnaire n’a de cesse d’innover afin de faciliter le business aux investisseurs potentiels. Dernier service offert : la mise en place, à la fin du mois de septembre 2017, du dispositif Taechir, qui permet de simplifier et d’accélérer le traitement des demandes d’autorisation de travail des expatriés des entreprises labellisées CFC. « Ce nouveau guichet d’accueil, premier maillon du guichet unique CFC, vient compléter la panoplie d’incitations et de mesures d’accompagnement proposées, explique Saïd Ibrahimi. À ce jour, plus de 90 personnes ont bénéficié de ce guichet où le délai de traitement est de vingt-quatre heures seulement. »
Concurrence à l’intérieur du pays
Mais CFC est également conscient de ses limites actuelles et s’active déjà pour les dépasser. La place casablancaise souffre par exemple d’une concurrence à l’intérieur même du pays, notamment de la part de la place financière offshore de Tanger. La coexistence de ces deux places engendre, en effet, une dispersion de l’offre financière préjudiciable aux objectifs du royaume, rapporte-t-on à Casablanca. « Cela est de nature à nuire à la lisibilité de la proposition marocaine en tant que place financière régionale et internationale », estime le patron de CFCA.
Les doléances ont, semble-t-il, été entendues puisqu’un projet de loi visant à rationaliser l’offre nationale vient d’être introduit dans le circuit législatif. Selon une source au département des Finances, le futur texte entend unifier les règlements de ces deux places financières tout en mettant Tanger offshore sous la coupe de CFC. « Un délai sera accordé aux entreprises installées dans la zone offshore de Tanger pour se conformer au règlement de CFC », nous confie notre source.
Casablanca a le potentiel pour devenir un lieu d’arbitrage de premier plan en Afrique, souligne Saïd Ibrahimi
Ce réaménagement réglementaire est une nouvelle démonstration du rôle de CFC comme catalyseur de réformes dans le secteur financier. Les équipes de CFC font d’ailleurs partie de tous les groupes de travail qui se penchent sur le réexamen des textes liés aux banques ou aux marchés de capitaux. CFCA est également impliqué dans la réforme de la loi sur l’arbitrage promulguée en 2007.
« Casablanca a le potentiel pour devenir un lieu d’arbitrage de premier plan en Afrique, faisant la promotion d’un environnement juridique favorable à l’arbitrage national et international sur le continent. Dans les prochaines années, le Centre international de médiation et d’arbitrage de Casablanca (Cimac) contribuera de manière décisive à renforcer l’environnement des affaires en accueillant en son sein des opérateurs économiques pour trouver des solutions à leurs problèmes », souligne Saïd Ibrahimi.
Bientôt un hub financier incontournable ?
Il n’empêche que CFC souffre de certains éléments exogènes qui limitent son développement. Cela a même été soulevé par le dernier rapport annuel de Bank Al-Maghrib, qui souligne que CFC « reste pénalisé par certains facteurs structurels liés à son environnement économique et institutionnel ». L’étroitesse des marchés de capitaux marocains est, par exemple, l’un des handicaps pour CFC. La Bourse de Casablanca est encore loin de constituer une extension de cette place financière pour canaliser au mieux l’épargne internationale vers le financement du développement du Maroc et du continent. La cotation des entreprises africaines en dirham et en devises, la cotation des project bonds ou encore celle des fonds africains à la corbeille casablancaise sont autant de chantiers qui restent en suspens.
Autre enjeu majeur pour CFC : la mobilisation de plus de capitaux pour financer le développement du continent. À cet effet, 3 milliards de dollars sont déjà investis ou gérés en Afrique (hors Maroc évidemment) à partir de CFC, et environ 13 milliards de dollars additionnels sont dans les tuyaux, assure-t-on à Casablanca, qui semble assez satisfait des temps de passage. Il y a bien de quoi : les entreprises labellisées CFC réalisent désormais 75 % des investissements du Maroc en Afrique. Ce qui confirme la dimension prise par la place casablancaise, en passe de devenir un hub financier incontournable.
La tour CFC attendue cette année
«Nous comptons nous installer dans la première tour CFC au cours du quatrième trimestre 2018 », promet Saïd Ibrahimi, ravi de voir la composante immobilière de la City marocaine enfin sortir de terre. Les bureaux logés dans ce bijou immobilier, conçu par l’architecte américain Thom Mayne (titulaire du prestigieux prix Pritzker), s’arrachent : 80 % des 20 000 m² disponibles – aux normes Leed (haute qualité environnementale) – sont déjà réservés.
Située au cœur du projet Casa-Anfa, la zone dévolue à CFC s’étend sur 100 hectares, dont la moitié est un immense jardin urbain. Il s’agit d’une aire de 1,4 million de m² construits, constituée de bureaux, de logements, de commerces et d’équipements scolaires. Cet espace de vie au cœur d’une nouvelle zone urbaine, doté d’équipements de haut niveau, proche de l’aéroport et de la gare TGV et desservie par deux stations de tramway, constitue l’un des atouts du positionnement dans le monde de CFC en tant que place connectée.
Sa filière immobilière, Foncière CFC, développe deux autres bâtiments dans ce même secteur qui comprendra aussi une tour pour la BCP et une autre pour le groupe Attijariwafa, attendues pour 2020.
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