Libye : les hommes du maréchal Haftar

Le maréchal a-t-il confiance en un autre qu’en lui-même ? Trahi par le colonel Kadhafi alors qu’il est dans une geôle tchadienne en 1987, puis poursuivi par les sicaires du « Guide », peut-être vendu par l’un des siens lors de sa tentative de coup d’État de 1993, aujourd’hui bête noire des chefs de milices ennemies ciblée par plusieurs attentats ou tentatives d’attentats, il a su changer de camp quand la nécessité le lui imposait.

Le maréchal Khalifa Haftar. © Saad pour JA

Le maréchal Khalifa Haftar. © Saad pour JA

ProfilAuteur_MichaelPauron

Publié le 5 février 2018 Lecture : 2 minutes.

À Benghazi, il semble se défier de tout et de tous. Piliers de son organisation : ses propres fils. Saddam et Khaled, officiers, ont été placés à la tête de deux de ses plus importantes brigades de l’Est. Le businessman Okba Haftar assiste, lui, son père en matière économique et diplomatique, comme son frère Sadiq. « Sa confiance ne dépasse pas les liens du sang, ceux de sa famille d’abord, de son clan, les Ferjani ensuite », confirme Jalel Harchaoui, universitaire spécialiste de la Libye.

Comme son nom l’indique, le général Aoun al-Ferjani appartient à la même tribu que Haftar, originaire de Syrte, dans le centre du pays. Chef de sa sécurité militaire, sérieusement blessé dans l’attentat qui a visé son chef en 2014, il est présenté comme un successeur potentiel en cas de coup dur. Du même clan, Salim Mahmoud al-Ferjani tient la Sûreté de l’État, Balgassem al-Ferjani la Sécurité intérieure, Ayoub al-Ferjani les investissements de l’armée.

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Fadel el-Deeb, « cerveau politique du maréchal »

Fadel el-Deeb n’est pas un Ferjani mais, très impliqué dans la première rencontre entre le militaire et le Premier ministre Sarraj en France, en juillet 2017, il est qualifié de « cerveau politique du maréchal » par une source informée. Dans l’imbroglio tribalo-milicien où se débat la Libye, Khalifa Haftar a su se faire des alliés importants et loyaux, comme son officier toubou Ali Sida ou le cheikh salafiste Ashraf el-Mayyar, fondateur des brigades du 17-Février et rallié à l’Armée nationale libyenne dès juin 2014. « Mais sa dynamique des relations avec les groupes libyens est encore frêle, sans stratégie globale et sans structure. Elle se fait par approches lentes, secrètes, au cas par cas », explique Harchaoui.

Même schéma pour les relations internationales du maréchal. Le contrat signé le 1er novembre 2017 par son fils Khaled avec la société de lobbying américaine Grassroots Political Consulting afin de lui « assurer une promotion stratégique et politique au Congrès américain » est le premier du genre. Khalifa Haftar doit aujourd’hui compter davantage sur ceux qu’il a séduits de loin plus que sur des réseaux qu’il aurait approchés ou employés.

L’ancien député européen et consultant français Michel Scarbonchi, qui a favorisé cette interview, explique avoir cru en lui dès le début et ne pas s’être ménagé pour faire connaître le personnage dans l’Hexagone – sans rien cacher des bénéfices que pourraient dégager ses activités de conseil d’un tel investissement.

Au Royaume-Uni, son chantre est le député conservateur d’origine ghanéenne Kwasi Kwarteng, qui a l’oreille du ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson. À Moscou, c’est un Libyen, Abdelbasset al-Badri, qui officie en sa faveur, mais, souligne Harchaoui, « cet ex-ambassadeur de Libye en Arabie saoudite joue dans le camp du maréchal bien plus pour Riyad que par enthousiasme pro-Haftar ».

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