Côte d’Ivoire : la Fondation Donwahi, un havre d’art et de paix à Abidjan
Crée en 2008, dans une capitale en pleine crise, la Fondation Donwahi fait mentir les Cassandre et s’installe durablement dans le paysage artistique d’Abdijan. Avec un leitmotiv : le refus de se cantonner à un art, et une programmation qui revendique sa subjectivité.
Au milieu du vacarme abidjanais, l’imposante bâtisse ocre semble avoir le pouvoir de suspendre le temps. Le bruit entêtant des klaxons et la chaleur collante si présents de l’autre côté du mur s’évaporent dès que le visiteur pénètre dans le coquet jardin de la Fondation Donwahi. Voilà maintenant dix ans qu’Illa Ginette Donwahi a décidé de transformer les 1 500 m2 de sa maison familiale en espace dédié à l’art contemporain.
Cette collectionneuse passionnée s’associe alors avec Simon Njami, écrivain et commissaire d’exposition, figure incontournable du milieu de l’art contemporain, et Marème Samb, chef d’entreprise sénégalaise, déjà à la tête de la galerie camerounaise Mam, à Douala, pour le faire naître.
Nous sommes en 2008, la Côte d’Ivoire est en pleine crise, et les galeries ont presque toutes fermé leurs portes. « Beaucoup nous disaient que ce projet n’était pas raisonnable. En cette période de tension, l’art semblait être une affaire futile. Nous pensions au contraire qu’il était au cœur de la société », explique Illa Ginette Donwahi.
Nous ne nous sentons pas obligés de ne travailler qu’avec des Africains
Puissante chef d’entreprise dans l’agroalimentaire, cette fille d’une grande famille ivoirienne – son père, Charles, était ministre de l’Agriculture et de la Coopération de Félix Houphouët-Boigny, son frère, Alain-Richard, est l’actuel ministre des Eaux et Forêts – fait alors jouer ses réseaux pour lever des fonds. Le financement, exclusivement via des mécènes, a toujours été le principal défi de la fondation, qui est une galerie mais aussi une résidence d’artiste.
Un espace ouvert à tous
Depuis l’origine, le lieu refuse de se cantonner à un art, et la programmation revendique sa subjectivité. En ce début d’année 2018, ce sont les imposantes sculptures du plasticien ivoirien Jems Koko Bi qui accueillent le visiteur. Auparavant, c’était les peintures et les graffitis du camerounais Boris Nzebo qui interrogeaient les coiffures des femmes. Puis les photographes Aida Muluneh et Ananias Léki Dago, qui comptent parmi les artistes fétiches de la galerie, seront convoqués pour rythmer cette dixième année.
Ici, on ne s’interdit rien et l’on refuse toute étiquette. « Nous ne sommes pas une galerie africaine. Nous ne nous sentons pas obligés de ne travailler qu’avec des Africains. Qui imaginerait qu’une galerie française ne doit montrer que des Français ? » s’agace Illa Ginette Donwahi.
Ouverte à tous les genres, la Fondation Donwahi tente de l’être à tous les publics. Installée en plein cœur de la capitale économique, elle propose des projections cinématographiques et a installé au premier étage un espace gratuit doté du wifi pour attirer les lycéens et étudiants.
On peut aussi y boire un verre et y manger une nourriture inventive – le jeune chef Julien Coulibaly vient d’être recruté – qui reste accessible. « On espère que les différents publics se mêleront autour d’un verre, du passionné d’art à la mère de famille qui vient se détendre. » Et que tous finiront par descendre l’escalier qui mène aux expositions.
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