Aïchatou Boulama Kané : au Niger, « il nous faut changer nos mentalités »

La ministre nigérienne du Plan revient pour Jeune Afrique sur les défis face auxquels le pays se trouve confronté : la démographie, le dérèglement climatique et la question de la démocratie.

La ministre nigérienne Aichatou Boulama Kané le 12 décembre 2017 à Paris © Vincent Fournier pour JA

La ministre nigérienne Aichatou Boulama Kané le 12 décembre 2017 à Paris © Vincent Fournier pour JA

ProfilAuteur_AlainFaujas

Publié le 28 février 2018 Lecture : 2 minutes.

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Niger : et pourtant, il tient bon

En première ligne contre le terrorisme, le pays parvient à maintenir son économie à flot. Difficile, en revanche, de progresser sur le front du développement social. De Niamey à Agadez, il avance, mais à petits pas.

Sommaire

À l’issue de la conférence de la Renaissance, organisée à Paris les 13 et 14 décembre 2017, bailleurs de fonds internationaux et investisseurs privés ont promis au Niger 23 milliards de dollars pour financer son Plan de développement économique et social (PDES) 2017-2021. Une manne supérieure aux 17 milliards espérés, dont la ministre du Plan, Aïchatou Kané, explique comment elle sera utilisée.

Jeune Afrique : Quels sont les défis que vous entendez relever ?

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Aïchatou Boulama Kané : D’abord celui de la sécurité, que nous avons intégré dans notre PDES. Nous nous sommes adaptés à cette guerre asymétrique et la menons avec le concours de la société civile, en particulier de la chefferie traditionnelle, qui travaille avec l’administration pour retrouver nos valeurs – qui ne sont pas féodales.

Autres défis : la démographie, dont la hausse doit être en phase avec notre croissance, et le changement climatique, qui pèse sur notre économie – d’où notre engagement dans la COP21 [Conférence de Paris de 2015 sur le climat].

Nos défis : la démographie, le dérèglement climatique et la consolidation de la démocratie

Il nous faut aussi modifier nos mentalités et consolider la démocratie à notre manière. La cellule familiale doit être centrale afin que notre développement mette en valeur le groupe plutôt que l’individu.

Quels sont les objectifs du PDES ?

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Il met l’accent sur la dynamisation de notre croissance économique, que nous voulons faire passer de 5 % à 7 % par an d’ici à 2021. Nous tablons sur une réduction du taux de pauvreté, de 45 % à 41 %, et une baisse de la natalité, de 7,6 à 5,06 enfants par femme.

En outre, notre PDES ne se contentera plus de gérer les urgences, comme l’immigration ou les inondations, ce qui avait tendance à reléguer le développement au second plan. Nous anticiperons mieux.

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Comment y parvenir ?

Par la transformation du monde rural, qui assure 40 % de notre PIB et où vivent 80 % de la population. Pour cela, nous accélérerons le développement des villages, conforterons l’agriculture pluviale et électrifierons au moins 1 000 villages pour leur permettre d’accéder aux nouvelles technologies. Nous avons libéralisé le secteur de l’électricité, donc n’importe quel investisseur peut la produire dans un village et la revendre à notre société nationale.

>>> À LIRE – Emploi rural, financements innovants et développement agricole pour une croissance durable en Afrique

Mais mobiliser les ressources en eau, distribuer des semences adaptées et désenclaver les villages avec de nouvelles pistes ne suffiront pas : il nous faudra transformer la production et privilégier l’agro-industrie pour créer le maximum de valeur chez nous.

Enfin, pour disposer d’une main-d’œuvre de qualité, nous faisons passer la part consacrée à la formation professionnelle et technique dans notre budget de l’éducation nationale à 40 %, contre 25 % en 2015.

Quelle place réservez-vous au secteur privé ?

Il est le moteur incontournable de notre développement. Et le second pilier, après la transformation du monde rural, sur lequel s’appuie notre PDES.

Nous avons désormais plus d’une centaine de projets auxquels nous souhaitons l’associer, nous avons créé un guichet unique pour les investisseurs étrangers, et nous avons modernisé nos codes minier et de l’investissement.

>>> À LIRE – Économie : comment Niamey résiste aux chocs

Cela nous a valu de progresser de 32 places en cinq ans dans le classement « Doing Business » de la Banque mondiale [144e sur 190 pays classés en 2018]. Investir au Niger n’est plus risqué comme par le passé.

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