Niger : Mawli Dayak, au nom du père et de l’Aïr
Fils de l’un des plus emblématiques chefs touaregs, Mawli Dayak s’évertue à mettre en lumière la culture et la région d’Agadez pour y relancer le tourisme.
Niger : et pourtant, il tient bon
En première ligne contre le terrorisme, le pays parvient à maintenir son économie à flot. Difficile, en revanche, de progresser sur le front du développement social. De Niamey à Agadez, il avance, mais à petits pas.
Cherche-t-il à être digne d’un père élevé au rang d’icône dans la région et la ville d’Agadez – dont l’aéroport porte d’ailleurs le nom ? Sans doute. Fils aîné de Mano Dayak, décédé en 1995 dans un accident d’avion, Mawli Dayak ne peut y échapper.
Émissions de radio, danses et chants traditionnels… Comme chaque année depuis vingt-deux ans, les Agadéziens ont célébré le 15 décembre 2017 la mort de celui qui reste l’un des principaux chefs de la rébellion du début des années 1990 et, plus largement, l’une des personnalités touarègues les plus charismatiques.
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Son fils en est bien conscient. « Beaucoup ont gardé de mon père l’image d’un rebelle, mais cette rébellion a fait moins de 150 morts en cinq ans. Le message de Mano Dayak, explique-t-il, c’était avant tout le vivre-ensemble. »
Le message de Mano Dayak c’était avant tout le vivre-ensemble
C’est d’ailleurs tout l’objet de la Fondation Mano Dayak, pour la paix, le dialogue interculturel et interreligieux, le rapprochement des peuples et des cultures, qu’il a créée à la fin de 2016. À 40 ans, Mawli a pris le relais de Mano pour replacer sa ville et sa région au centre d’un cercle vertueux fondé sur le tourisme.
Patrimoine naturel et culturel
Sillonnant le désert avec l’agence qu’il avait créée, Temet Voyages, son père a participé, entre autres, à l’organisation du Paris-Dakar et au tournage d’Un Thé au Sahara, de Bertolucci. Des milliers de touristes venaient découvrir l’Aïr et le Ténéré, les locaux se partageant les emplois de chauffeurs, de guides, de cuisiniers. Les souvenirs de cet âge d’or ne l’ont jamais quitté.
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À 15 ans, alors que les rébellions agitent la région, Mawli est envoyé en France, le pays de sa mère, Odile. Il passe avec succès un baccalauréat économique et social en région parisienne. En 1997, il entre dans la vie professionnelle, dans le secteur du prêt-à-porter, puis au sein d’une société gestionnaire de patrimoine.
À la fin de 2011, Mawli Dayak rentre au Niger. Il y intègre les services du Premier ministre, Brigi Rafini (lui aussi originaire de la région d’Agadez), auprès duquel il est chargé de mission sur le tourisme et l’artisanat. Son patronyme lui ouvre des portes. Il en profite pour créer son agence, Temet Événements.
Faire rayonner Agadez
Son objectif : mettre en lumière la culture de la région d’Agadez pour y faciliter le retour du tourisme. En 2013, l’agence organise un festival de musique, Le Chant des dunes, réunissant à Niamey des artistes nigériens, maliens, mauritaniens, algériens, belges et français.
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En 2015, elle met à l’honneur la culture touboue en orchestrant Agadez, capitale de la paix, une semaine consacrée aux arts et à l’artisanat. Temet Événements travaille actuellement sur la tenue à Agadez d’un forum pour le tourisme en Afrique de l’Ouest afin de motiver des politiques nationales et sous-régionales.
« On ne relancera pas le tourisme en ne nous intéressant qu’aux Européens, il faut d’abord attirer la clientèle régionale, notamment algérienne, explique Mawli Dayak. La région d’Agadez dispose d’un patrimoine naturel et culturel énorme, comme le festival La Cure salée, à Iferouane. »
Il faut prendre au budget de la défense pour investir dans le développement. C’est une autre forme de pacification
Cette transhumance des éleveurs nomades pendant et après l’hivernage (juillet à décembre) doit son nom aux sels minéraux dont les pâturages regorgent durant cette période grâce aux eaux de ruissellement des montagnes de l’Aïr, et donne lieu à de grandes fêtes.
« Il faut que nous relancions un cercle vertueux à partir des activités touristiques et culturelles, poursuit-il. L’important, c’est de rendre à nouveau les gens autonomes. Aujourd’hui, ils sont dans l’attente des subventions [de l’État] et de l’aide extérieure. Il faut de la volonté politique, prendre au budget de la Défense pour investir dans le tourisme et le développement. C’est une autre forme de pacification… »
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