Guinée – Tourisme : balade à Bel-Air
À seulement 200 km de la capitale, en passant par Boffa et le lac de Koba, échappée belle jusqu’à la plus longue et la plus emblématique plage de sable blanc du pays.
La Guinée face au choc social
La croissance est forte et soutenue. Les revendications sociales le sont aussi en matière de pouvoir d’achat, d’accès aux services de base et, surtout, d’emploi des jeunes. Les Guinéens veulent du changement. Et ils le font savoir.
Sur le littoral de la Guinée maritime, les belles plages sont nombreuses, mais elles se méritent. Il faut d’abord franchir le mur de klaxons, de gaz d’échappement et de poussière à la sortie nord de Conakry pour rejoindre la célèbre RN3. Actuellement en réaménagement, ce tronçon en forme de goulot d’étranglement sera heureusement bientôt métamorphosé en 2×2 voies. Mais jusqu’à ce que les travaux s’achèvent, il faut affronter d’interminables embouteillages, pare-chocs contre pare-chocs avec les taxis et les camions débordants de marchandises.
Passé la rudesse de cette urbanité conakryka, la RN3 est l’une des plus jolies routes du continent. Depuis la capitale jusqu’à Bel-Air en passant par Boffa, sur un axe de 200 km parfaitement goudronné, on découvre un étonnant décor où se succèdent à peu près tous les paysages d’Afrique de l’Ouest, voire de la planète… À l’imposante silhouette hollywoodienne du mont Kakoulima succèdent les tumultueuses rivières et leurs chutes d’eau amazoniennes, telles les cascades de la Soumba, où les enfants viennent se baigner.
On peut se contenter de juste passer par Boffa pour filer vers le nord-ouest, mais la capitale régionale, lovée sur la rive droite du fleuve Fatala, à l’entrée de l’estuaire du Rio Pongo, vaut la peine qu’on y fasse étape – elle dispose d’ailleurs depuis 2016 d’une nouvelle gare routière, pour ceux qui souhaitent s’y rendre en car.
On visitera notamment son port et ses quelques villas coloniales, ses vestiges de la traite négrière, sans oublier l’église Saint-Joseph, la plus ancienne du pays. Toute en brique rouge, elle fut érigée sous les ordres de Faidherbe sur un terrain que lui avaient cédé les fils de Coulon Katty, le roi du Rio Pongo, après sa mort. Alors qu’ils vivaient au Sénégal, ceux-ci avaient été converti par le général français à la demande de leur père. Inaugurée en 1877, maintes fois incendiée et reconstruite à l’identique, elle accueille chaque année, en mai, l’un des plus grands pèlerinages marials d’Afrique de l’Ouest.
Eau calme et cristalline
La RN3 longe ensuite d’immenses palmeraies, traversées par les méandres des rivières et quelques rizières comme autant de traits d’union avec le littoral. À mesure que les embruns marins se font sentir, la végétation, elle, se fait luxuriante. Des femmes marchent le long du ruban de bitume, s’abritant du soleil sous des parapluies. Des carcasses de véhicules renversés sur les bas-côtés rappellent que, lorsque la route est en bon état, nombre d’automobilistes abusent malheureusement de la vitesse… Au bout d’une heure trente et 70 km d’une route presque toute droite, on arrive à la plage de Bel-Air, l’une des plus étendues et fréquentées du pays : une bande de sable fin et blanc de 7 km de long, bordée de cocotiers et de quelques dunes et, côté mer, d’une eau calme et cristalline aux courants chauds, idéale pour la baignade.
Au bout de la route, l’Hôtel Bel-Air a été réquisitionné pour y loger les ingénieurs et ouvriers qui travaillent depuis un an près du village de Khoundidé, à seulement 2 km, pour construire la toute nouvelle mine de bauxite de Bel Air Mining (BAM), du britannique Alufer. Mais à proximité, Daniel, un enfant du pays, loue des chambres d’hôtes qu’il a aménagées dans de petites cases sommaires, installées face à l’océan. Il vous met à l’aise et en appétit, en cuisinant un poisson braisé ou un commando (petite langouste) fraîchement péchés. À l’autre extrémité de la plage, un nouvel hôtel vient d’ouvrir, qui loue des bungalows.
Escale à l’Auberge du lac
Reprendre la direction de la capitale lorsque le soleil doucement décline est un moment extatique. À mi-chemin entre Boffa et Conakry, lorsque les pêcheurs rentrent de leur journée en chantant, on aperçoit la forêt de mangrove qui, déjà, annonce la baie de Sangareyah. Au passage d’un véhicule, des visages souriants s’illuminent. Dans l’atmosphère douce et bleutée, le tracé orangé des chemins en latérite qui croisent la RN3 devient rouge sang.
Il faut alors absolument quitter la nationale et s’accorder un petit détour de 30 km pour une escale à l’Auberge du lac de Koba. Une quinzaine de bungalows tout confort (avec climatisation et télévision), en dur et en forme de case, se succèdent le long de la rive. Construit il y a une dizaine d’années sur un domaine de 4 hectares au bord d’un lac artificiel d’eau douce et à 5 km du littoral, ce complexe touristique est un véritable havre de paix à moins de 2 heures de Conakry. Le matin, on y petit déjeune sous les premiers rayons du soleil.
On y « farniente » en chaise longue en regardant ceux qui sont déjà partis en pédalo sur le vaste plan d’eau fraîche, propre et limpide. Le soir, au bord du lac, au son du croassement des grenouilles, on y dîne au restaurant de la Paillotte. François Kaboré, son chef cuisinier depuis huit ans, vaut à lui seul le détour. Proche cousin de l’actuel président burkinabè, ce chef a été formé en Côte d’Ivoire et aurait servi Henri Konan Bédié avant de devenir le cuisinier de l’ancien Premier ministre guinéen, Jean Marie Doré, en 2010, pendant la transition.
À goûter absolument : son excellent calamar à la sauce provençale et relevé de saveurs guinéennes, accompagné du « peps » d’un jus de gingembre. Une (très) bonne adresse, où l’on côtoit des familles conakrykas, sierra-léonaises ou même américaines.
Cette échappée belle peut s’achever en apothéose si, avant de rejoindre la RN3, vous emprunter la petite route de Moussaya, qui contourne le lac pour se perdre dans les palmeraies. Vous y croiserez « le goudron » (la route bitumée) qui mène à l’ancienne demeure, désormais en ruine, de l’ancien président Lansana Conté, ainsi que le terrain de football où l’hélicoptère transportant sa dépouille avait atterri le jour de ses grandioses funérailles.
Plus loin, la route suit une voie ferrée, qui elle-même longe le lit d’une rivière, au bord de laquelle, les dimanches ensoleillés, les familles viennent déjeuner, les jeunes laver les motos, les couples s’asseoir pour sceller leurs amours… Loin de l’agitation de la semaine et de Conakry, le temps, ici, suspend son vol.
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