Qatar-Arabie Saoudite : d’un wahhabisme à l’autre

Le Qatar est le seul autre État wahhabite similaire à l’Arabie Saoudite. Cependant, le premier a suivi une voie moins conservatrice que le second qui entend bien réformer la place du religieux dans la société.

Manifestation anti-américaine en 2014 à Doha. © Osama Faisal/AP/SIPA

Manifestation anti-américaine en 2014 à Doha. © Osama Faisal/AP/SIPA

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 22 mars 2018 Lecture : 2 minutes.

Tamin Ibn Hamad Al Thani (g.) et Mohammed Ibn Salman Al Saoud (d.). © Images SIPA / AP / Montage JA
Issu du dossier

Crise du golfe : Qatar-Arabie saoudite, la guerre fraticide

Voisins, jeunes et wahhabites l’un et l’autre, ils auraient pu être complices. Mais, depuis neuf mois, le prince héritier saoudien, Mohamed Ibn Salman veut faire rendre gorge à l’émir du Qatar, Tamim Ibn Hamad Al Thani, coupable de ne pas se soumettre à ses diktats.

Sommaire

En guerre politique contre l’émir Tamim, le prince héritier saoudien pourrait paradoxalement trouver à Doha l’inspiration pour l’avènement d’un wahhabisme ouvert et tolérant qu’il a appelé de ses vœux dans son pays, en octobre 2017.

Seul autre État wahhabite, d’essence conservatrice, le Qatar permet néanmoins la mixité, le travail des femmes, la construction de lieux de culte non musulmans, les spectacles et la consommation d’alcool, et ses villes ne connaissent pas les patrouilles d’une police religieuse à la saoudienne.

la suite après cette publicité

Comme pour rattraper son retard en la matière, Mohamed Ibn Salman (MBS) a retiré en 2016 le droit à cette dernière de procéder à des arrestations, levé l’interdiction de conduire faite aux femmes, ouvert les entreprises et même l’armée à celles-ci, autorisé les spectacles et planifié la création de cités de loisirs plus permissives.

Monopole du Wahhabisme

Mais le renouveau religieux que MBS veut imposer en Arabie saoudite, comme celui qu’a accompli le Qatar dans les années 1990, court le risque de mécontenter un clergé puissant et organisé auquel la couronne est liée par un pacte fondateur de trois siècles qui accorde aux religieux le contrôle de la vie sociale et à la famille Saoud la charge du domaine politique.

« Les gouvernants du Qatar ne sont pas liés par un tel pacte, explique l’historien Nabil Mouline, et l’émir Hamad, pour sortir en 1995 le pays de son ultraconservatisme, a pu faire sans problème appel aux Frères musulmans, comme d’ailleurs aux panarabistes laïcs, pour créer la marque Qatar et répandre son influence. Ils auraient bien aimé utiliser le wahhabisme, mais les Saoudiens en ont le monopole sur le plan international. »

Depuis octobre 2017, Mohamed Ibn Salman entend réformer la voie du wahhabisme

Soucieux de donner quelques gages aux religieux qataris, l’émir Hamad a inauguré en 2011 une mosquée monumentale à la gloire du fondateur du wahhabisme, Mohamed Ibn Abdelwahhab. Fin mai 2017, alors qu’éclatait la crise entre Riyad et Doha, deux cents descendants saoudiens de l’imam exigeaient que la mosquée soit renommée, arguant que la famille royale qatarie avait dévié de la voie wahhabite. Voie que MBS entend depuis octobre dernier réformer.

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image