Éthiopie : qui est Abiy Ahmed, le nouveau Premier ministre ?

Le nouveau Premier ministre éthiopien promet une ouverture politique et de réformer l’appareil sécuritaire. Y parviendra-t-il ?

Abiy Ahmed, le nouveau Premier ministre éthiopien, en novembre 2017. © STR/EPA/MAXPPP

Abiy Ahmed, le nouveau Premier ministre éthiopien, en novembre 2017. © STR/EPA/MAXPPP

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Publié le 5 avril 2018 Lecture : 3 minutes.

Abiy Ahmed © Lee Jin-man/AP/SIPA
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Éthiopie : Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019

Le prix Nobel de la paix 2019 a été attribué au Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, « pour ses efforts en faveur de la paix et de la coopération internationale, et en particulier pour son initiative décisive visant à résoudre le conflit frontalier avec l’Érythrée voisin ». Retrouvez tous nos articles sur l’homme qui a changé l’Éthiopie.

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Voilà un mois et demi que l’Éthiopie attendait de connaître le nom de son prochain Premier ministre. Ce 27 mars, à l’issue d’une interminable réunion de son conseil exécutif, le Front démocratique révolutionnaire des peuples éthiopiens (EPRDF) s’est choisi un nouveau président et, partant, le futur chef du gouvernement en la personne d’Abiy Ahmed, patron de l’Organisation démocratique des peuples oromos (OPDO), l’un des quatre partis de la coalition au pouvoir.

Son élection, qui met un terme à six semaines de négociations, doit encore être entérinée par la chambre basse du Parlement. Ce devrait être une formalité, la totalité des sièges étant occupée par des membres de l’EPRDF.

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Formé aux Etats-Unis

Premier membre de la communauté oromo – majoritaire dans le pays – à parvenir à la tête de l’exécutif depuis le renversement du régime communiste en 1991, Abiy Ahmed succède au très contesté Hailemariam Desalegn, dont la démission surprise, le 15 février dernier, avait été suivie par l’instauration de l’état d’urgence.

Fils d’un musulman oromo et d’une chrétienne issue de l’ethnie amhara (un quart de la population), Abiy Ahmed, 41 ans, a été formé aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Titulaire d’un doctorat de l’université d’Addis-Abeba, il parle couramment l’oromo, l’amharique et le tigréen. Des atouts et un profil consensuel qui expliquent que le choix de l’EPRDF se soit porté sur lui.

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Si on se fie au décompte des voix, son élection (108 voix sur 169) ne souffre aucune contestation. Dans un pays exsangue et au sein d’une coalition rongée par des luttes intestines, elle répond pourtant à des impératifs variés.

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« Abiy Ahmed prend la tête d’une formation qui vit une période de transition. Son élection confirme la fin de l’hégémonie du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF, ancien socle de l’EPRDF), amorcée il y a trois ans avec le début des manifestations antigouvernementales », souligne le politologue Awol Allo.

Etat d’urgence

Dans les rangs de l’EPRDF, Abiy Ahmed jouit d’une image de bon communicant. Certes, il prône des changements. Mais il privilégie la concertation, ce qui séduit la frange réformatrice de la coalition, lasse de l’omnipotence du TPLF.

Fils d’un musulman oromo et d’une chrétienne amhara, il était le candidat idéal

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Sa nomination à la tête de l’OPDO, en février, ainsi que ses promesses d’ouverture politique et de réforme du système sécuritaire ont fait de lui le candidat idéal pour apaiser les tensions dans la région de l’Oromia, en première ligne des manifestations antigouvernementales depuis novembre 2015.

La fronde des Oromos, qui s’estiment marginalisés politiquement et économiquement par les Tigréens (6 % de la population), a fait près d’un millier de morts entre 2015 et 2016, selon les chiffres officiels.

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La nomination d’Abiy Ahmed suscite bien sûr de fortes attentes. « Il devra très vite lever l’état d’urgence, que les responsables publics ont présenté comme indispensable au moment de la démission de Desalegn, et libérer les prisonniers politiques. Puis, il devra prendre clairement ses distances avec la frange la plus radicale de la coalition et engager des réformes, faute de quoi l’enthousiasme retombera rapidement », poursuit Awol Allo.

Surveillance de masse

Sa marge de manœuvre reste étroite. S’il bénéficie du soutien du Parlement, et notamment des Amharas, il devra manœuvrer avec un TPLF vexé de sa perte d’influence au sein de la coalition. Le parti du Tigré (région du Nord) garde toutefois la haute main sur l’appareil militaro-sécuritaire, sans lequel le Premier ministre ne pourra faire aboutir ses réformes.

Un lieutenant-colonel, issu de l’armée

Certains observateurs s’interrogent donc sur sa capacité à imposer de réels changements à cet appareil. Car, lui-même issu de l’armée, le lieutenant-colonel Abiy Ahmed a participé à la création de l’Agence nationale du renseignement informatique, un outil de surveillance de masse, et a été ministre des Sciences et de la Technologie en 2016-2017.

Pour l’assister dans sa tâche, il pourra néanmoins compter sur le très populaire Lemma Megersa, président de la région de l’Oromia et ancien leader de l’OPDO. N’étant pas député, ce dernier ne pouvait prétendre à la primature, mais a favorisé l’ascension politique de son cadet.

En février, après la démission de Desalegn, le même Megersa avait prévenu : « L’Éthiopie ne pourra continuer à exister si les Oromos ne sont pas pleinement associés au pouvoir. »

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