Chasseur de têtes : Spencer Stuart, africain malgré lui

Rétive à travailler sur le continent, la société américaine y a néanmoins réalisé deux importants recrutements pour Ecobank et Kenya Airways.

Le cabinet est intervenu pour la nomination du Niegrian Ade Ayeyemi à la tête d’Ecobank. © Eric Larrayadieu/Africa CEO Forum/JA.

Le cabinet est intervenu pour la nomination du Niegrian Ade Ayeyemi à la tête d’Ecobank. © Eric Larrayadieu/Africa CEO Forum/JA.

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Publié le 18 avril 2018 Lecture : 3 minutes.

Photo d’une route et d’un pont en construction à Ndende dans la Ngounié au Sud du Gabon, en décembre 2011. © Tiphaine Saint-Criq pour Jeune Afrique
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Portées par d’ambitieux projets, de nouvelles filières apparaissent en Afrique de l’Ouest. Certaines recruteront à moyen et long terme, encore faut-il que les candidats soient au rendez-vous. En Guinée, cet objectif semble s’éloigner à mesure que l’État freine ses financements aux établissements privés. Sur les postes à très haut niveau en revanche, la question ne se pose pas puisque des cabinets comme Spencer Stuart s’occupent de chasser les talents.

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Il fait partie des cinq plus grands cabinets de chasseurs de têtes au monde. Rompu au secret – de mise dans la profession –, il a logiquement refusé de répondre aux questions de Jeune Afrique. Son nom : Spencer Stuart. Créée en 1956, la société, dont le siège social se trouve à Chicago, est présente dans une trentaine de pays à travers le monde. Sur le continent, elle ne possède qu’une implantation, à Johannesburg, où, depuis 2002, cinq de ses consultants travaillent en permanence à identifier les futurs grands patrons africains.

Une présence timide pour une multinationale qui compte en tout 57 bureaux et qui pesait plus de 400 millions de dollars (325 millions d’euros) en 2013. Cette discrétion sur le continent africain est en réalité volontaire. Non coté en Bourse, contrairement à ses concurrents américains Korn Ferry et Heidrick & Struggles, le cabinet Spencer Stuart est réputé pour cultiver une liberté et un snobisme certains.

Il y a de beaux marchés en Afrique de l’Ouest, mais les conjonctures politiques sont compliquées

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Ainsi, il parie peu sur les potentialités que pourrait représenter le continent pour ses activités : « Une stratégie en Afrique pourrait intéresser Spencer Stuart. Mais comme tous les cabinets de cette envergure, celui-ci évolue dans un marché où les clients potentiels sont des entreprises internationales », confirme subtilement un ancien consultant qui a passé près de quinze ans chez Spencer Stuart avant d’intégrer le rival Korn Ferry. « Il y a de beaux marchés en Afrique de l’Ouest, mais les conjonctures politiques sont compliquées », ajoute un consultant de Spencer Stuart basé à Singapour.

La dernière fois qu’un chasseur de têtes du cabinet a daigné s’intéresser à l’Afrique, c’était en 2017, lorsque Kenya Airways, troisième compagnie aérienne du continent, a chargé Spencer Stuart de trouver son prochain directeur général. Le cabinet a fini par dénicher Sebastian Mikosz, un Polonais à la réputation d’homme à poigne mais peu renseigné sur l’Afrique. En coulisses, le contrat avait été apporté par Thierry Lindenau, responsable de l’activité aviation du cabinet, basé à Singapour, qui se distingue par son réseau et sa fine connaissance du secteur.

Une implantation à Nairobi en discussion depuis des années

Deux ans plus tôt, Spencer Stuart était intervenu dans la nomination du Nigérian Ade Ayeyemi à la tête d’Ecobank. Là encore, l’affaire avait été apportée et gérée par l’activité « finance » et non par le bureau de Johannesburg, ce dernier étant en réalité missionné pour repérer les talents africains en vue de les placer en dehors du continent.

Pour certains, le cabinet se détourne de l’Afrique en raison d’une culture d’entreprise très chauvine, encline aux préjugés et qui déterminerait ses choix stratégiques. « Aux États-Unis, le cabinet est composé à quasi 100 % de républicains pro-Trump », confirme un ancien cadre du bureau français de Spencer Stuart. En interne, « on souligne au contraire qu’une implantation à Nairobi, au Kenya, est en discussion depuis des années, sans résultat concret pour le moment », explique le consultant basé à Singapour.

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Le Maghreb pourrait également représenter une porte d’entrée. Entre 2006 et 2012, les allers-retours des responsables du bureau français au Maroc étaient ainsi monnaie courante. À l’époque, des discussions avaient été entamées avec la Société nationale d’investissement (SNI), dont l’actionnaire principal n’est autre que Mohammed VI. Mais pour l’instant, Spencer Stuart considère comme trop risqué tout investissement dans une implantation locale.

Angeles Garcia-Poveda, « Madame Afrique »

Cette Madrilène de 47 ans, formée à la Neoma Business School de Reims (France) et passée par l’Université pontificale de Comillas (Espagne), a fait ses armes durant plus de quinze ans au sein du Boston Consulting Group (BCG), avant de prendre les rênes, en 2008, du bureau français de Spencer Stuart. Cinq ans plus tard, le cabinet américain lui confie l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, qu’elle pilote toujours depuis Paris.

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