Le match de la semaine : Pascal Tsaty Mabiala vs Guy-Brice Parfait Kolélas au Congo
Un mal pour un bien : c’est finalement ce que doit penser Guy-Brice Parfait Kolélas près de six mois après être passé à côté du statut de chef de file de l’opposition. Une innovation introduite par la Constitution de 2015 et qui, loin d’être une ligne droite pour la présidence, s’est révélée être un cadeau empoisonné pour Pascal Tsaty Mabiala.
À 68 ans, le leader de l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (Upads, le parti de l’ancien président Pascal Lissouba), s’est vu attribuer ce titre, fin décembre 2017, par le Conseil des ministres. Il s’est alors retrouvé complètement isolé dans son camp. Non seulement les autres factions de l’opposition ne reconnaissent pas son leadership, mais on le soupçonne désormais d’être conciliant avec le pouvoir. Celui que l’on décrit comme hédoniste et bon vivant est chahuté au sein même de son parti, où on lui reproche d’avoir différé la tenue du congrès : prévu pour juin 2017, il a été reporté sine die, officiellement pour des questions de budget.
Et si le statut d’« opposant officiel» était un cadeau empoissonné ?
Guy-Brice Parfait Kolélas, 58 ans, arrivé en deuxième position à la présidentielle de mars 2016 avec 15 % des suffrages, aurait pu prétendre au statut d’« opposant officiel ». Car, à l’Assemblée nationale, l’UDH-Yuki, qu’il a lancé en mars 2017 à la suite d’une scission du Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral (fondé par son père, Bernard Kolélas), fait jeu égal avec l’Upads.
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Depuis les législatives de 2017, l’un comme l’autre comptent 8 députés. Toutefois, l’UDH-Yuki ayant disputé ces élections sous la forme d’une association et non sous celle d’un parti, ses députés, considérés comme des indépendants, ne disposent pas d’un groupe parlementaire. Cette situation a empêché Kolélas de briguer le fameux statut, mais lui vaut d’échapper aux remarques acerbes qui s’abattent sur Mabiala.
Fibre mystico-messianique
Depuis, l’Upads cherche à exister en surfant sur la lutte contre les « délinquants économiques ». Un thème auquel les Congolais sont sensibles, si l’on en croit les critiques que vient d’essuyer Denis Christel Sassou Nguesso, fils et dauphin putatif du président, après avoir tenu des propos semblant prôner le rejet des poursuites à l’encontre des auteurs de détournements de fonds publics.
Pas sûr que cela suffira à l’Upads pour élargir son audience. Au Congo-Brazzaville, où les partis ont avant tout une assise régionale, Guy-Brice Parfait Kolélas et Pascal Tsaty Mabiala souffrent tous deux d’un gros handicap : ils ne sont connus que dans leur fief familial et dans les grandes villes. Ni l’un ni l’autre ne peut donc accéder au pouvoir sans un jeu d’alliance. Tsaty Mabiala, député de Loudima depuis vingt-six ans, peine à s’imposer au-delà des régions de la Bouenza, du Niari et de la Lékoumou, dans le sud-ouest du pays (Niboland).
Quant à Guy-Brice Parfait Kolélas, élu de Kinkala préfecture, il jouit de l’aura de son défunt père, encore intacte dans le département du Pool, et a su habilement jouer sur la fibre mystico-messianique de ses habitants. Si la popularité de cet officier de l’Armée du salut a dépassé celle de Pascal Tsaty Mabiala, elle reste limitée à ce département, à Brazzaville et à Pointe-Noire, la capitale économique.
En vue de la présidentielle de 2021, l’un ou l’autre parviendra-t-il à prendre l’ascendant et à unifier une opposition rongée par ses divisions ? Rien n’est moins sûr, tant elle souffre d’un mal typiquement congolais : tout le monde veut être chef.
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