Maroc : BCP s’apprête à acquérir les actifs africains de BPCE
Après avoir acheté la filiale mauricienne du groupe français, le numéro deux de la finance marocaine s’apprête à faire de même avec celles du Congo, du Cameroun, de la Tunisie et de Madagascar.
Mise à jour le 25 septembre 2018 :
La banque marocaine Banque centrale populaire (BCP) a indiqué le 25 septembre être entrée en négociations exclusives avec le groupe français BPCE, qui a retenu son offre pour l’achat de ses participations dans quatre banques sur le continent. Cette acquisition s’inscrit dans la stratégie d’expansion de la BCP au Maghreb et en Afrique subsaharienne.
Les parts concernées se composent de 68 % de la Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit (Bicec), 71 % de la Banque malgache de l’océan Indien (BMOI), 100 % de la Banque commerciale internationale (BCI) de la République du Congo et 60 % de la Banque tuniso-koweïtienne (BTK), précise le communiqué de BCP.
L’ambition panafricaine de la Banque centrale populaire (BCP) se précise. Pour rattraper son retard sur ses concurrents, BMCE et Attijariwafa Bank, son président, Mohamed Benchaâboun, a jeté son dévolu sur le portefeuille du français Banque populaire-Caisse d’épargne (BPCE), qui a annoncé en décembre 2017 son départ du continent.
« Nous sommes clairement intéressés par l’ensemble des banques africaines du groupe BPCE », révèle en exclusivité à JA Kamal Mokdad, le directeur général de BCP chargé de l’international, qui a rejoint le groupe il y a un peu plus d’un an après avoir quitté la filiale marocaine du cabinet Mazars.
Entamé par François Pérol avant son départ, le désengagement du groupe français est désormais supervisé par son nouveau directeur général, Laurent Mignon. « Le processus de cession des différentes filiales bancaires de la BPCE en Afrique suit son cours, dans le cadre d’un appel à candidatures piloté par une banque d’affaires internationale », ajoute Kamal Mokdad.
Selon nos informations, le groupe présidé par Mohamed Benchaâboun a commencé à recueillir des informations sur les différentes filiales, que convoitent également les autres banques marocaines.
Portefeuille africain
Le portefeuille africain de BPCE est constitué par la Banque commerciale internationale (BCI) au Congo, que la BPCE contrôle à 100 %, la Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit (Bicec), détenue par l’établissement français à 68,5 %, et la Banque tuniso-koweïtienne (BKB) en Tunisie, dans laquelle sa participation est de 60 %.
Plusieurs observateurs estiment que la filiale tunisienne de BPCE pourrait être la première cible de BCP. Sans vouloir confirmer cette information, Kamal Mokdad a reconnu le grand intérêt que porte sa banque au Maghreb, dont elle est pour l’heure absente en dehors du royaume.
« Le groupe ne peut pas se permettre de snober cette région, qui fait les beaux jours de sa concurrente première, Attijariwafa Bank. C’est un marché similaire à celui du Maroc qui présente une rentabilité importante et qui est facilement maîtrisable grâce à une population réduite », estime un banquier d’affaires qui suit l’internationalisation des établissements marocains.
Pour rappel, la filiale tunisienne de la banque présidée par Mohamed el-Kettani est le quatrième contributeur dans le revenu net part du groupe, avec un taux de 4,9 % en 2017.
« Doublement gagnant »
Peu séduisante jusqu’en 2016, BKB a depuis transformé son modèle. « L’établissement présente actuellement un profil assez intéressant, avec un portefeuille assaini et un coût du risque réduit de 60 % en une année. Une amélioration de ses comptes, qui présage une probable mise sur le marché à court terme », conclut le financier, qui a obtenu des informations de Tunis.
Le tour de table de BKB, composé des deux États, tunisien et koweïtien, ne déplaît pas à la banque marocaine, dont une part du capital est contrôlée par Rabat.
Si beaucoup parient déjà sur un accord entre les deux groupes, c’est parce que BPCE et BCP se connaissent bien. Depuis 2012, le groupe français détient une participation de 4,5 % dans le capital de BCP, qu’il souhaite conserver. « En vendant ses participations au groupe marocain, BPCE peut être doublement gagnant en récoltant dans un premier temps le produit des cessions, puis chaque année des dividendes », explique notre banquier.
Autre indice plaidant pour un accord, le rachat en février par BCP de la Banque des Mascareignes, filiale du groupe français basée à Maurice. L’établissement marocain est ainsi devenu le premier investisseur du royaume à s’implanter sur l’île.
Maurice est une place financière qui peut nous permettre de toucher des marchés sans y être présents pour autant
« C’est une place financière qui peut nous permettre de toucher des marchés sans y être présents pour autant », résume le directeur général de BCP. Grâce à cette filiale, le groupe entend capter des flux financiers en provenance d’Inde, d’Afrique du Sud ou encore de Chine. La transaction est en cours de finalisation, BCP n’ayant pas encore reçu le feu vert des autorités mauriciennes.
L’offensive africaine de BCP s’inscrit dans le cadre de son plan Élan 2020, qui doit lui permettre de doubler ses revenus à l’international. L’objectif est d’augmenter la contribution des activités africaines (hors Maroc) pour la porter à au moins 25 % du produit net bancaire du groupe (contre 18 % en 2017).
Banquier d’affaires depuis le Moyen-Orient
« L’Afrique, on peut la servir à travers trois corridors complémentaires : le premier, c’est Casablanca Finance City ; le deuxième, l’île Maurice ; et le troisième, c’est le Moyen-Orient. »
Le Moyen-Orient constitue un axe stratégique, mais nous n’avons pas la prétention d’y lancer une offre bancaire universelle
C’est ainsi que Kamal Mokdad trace sa feuille de route et choisit ses futures destinations. « Le Moyen-Orient constitue un axe stratégique, mais nous n’avons pas la prétention d’y lancer une offre bancaire universelle », précise le directeur général chargé des activités internationales.
Autrement dit, BCP souhaite davantage se positionner en intermédiaire pour accompagner les gros porteurs de projets à destination du Maroc. « Nous souhaitons capter les flux venant d’Asie, notamment via Dubaï », ajoute-t-il.
Changement d’identité visuelle au Sud comme au Nord
Depuis le 25 avril, les filiales de groupe Atlantique, qui regroupent les opérations de BCP en Afrique de l’Ouest, ont adopté le logo de leur maison mère. Un cheval au galop, redessiné pour l’occasion, figure désormais sur la devanture de toutes les agences.
Ce changement va nous permettre d’harmoniser notre communication
« Il y avait quelques difficultés à les associer avec le groupe quand le visuel était encore celui de la Banque Atlantique (dont le nom a été conservé). Ce changement va nous permettre d’harmoniser notre communication », justifie Kamal Mokdad, directeur général chargé de l’international.
Pour le dirigeant, c’est l’incarnation de l’ambition de BCP dans le monde. À travers le holding Atlantic Business International (ABI), la banque détient 16 filiales réparties dans 9 pays. Dans les prochaines semaines, les agences marocaines adopteront aussi le nouveau logo.
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