Le Maroc, futur leader du paiement mobile ?

La banque centrale Bank Al-Maghrib et l’Agence nationale de régulation des télécommunications (ANRT) ont annoncé le 13 novembre le lancement officiel des solutions de paiement mobile au Maroc. Mais les banques et les opérateurs doivent encore convaincre les commerçants.

La solution de paiement mobile de Visa, ici lors du Mobile World Congress à Barcelone le 4 mars 2015. © Manu Fernandez/AP/SIPA

La solution de paiement mobile de Visa, ici lors du Mobile World Congress à Barcelone le 4 mars 2015. © Manu Fernandez/AP/SIPA

Publié le 14 novembre 2018 Lecture : 3 minutes.

Un homme surfe sur Internet dans un cyber-café de Cotonou, au Bénin, le 24 février 2016. © Gwenn Dubourthoumieu pour Jeune Afrique
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Focus : monétique, quel développement en Afrique ?

Dans une Afrique encore faiblement bancarisée, les acteurs se bousculent dans le secteur de la monétique, un marché naissant mais prometteur.

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À l’occasion de la validation par la banque centrale Bank Al-Maghrib et l’Agence nationale de régulation des télécommunications (ANRT), le 13 novembre, du portefeuille électronique baptisé M-wallet premmetant d’effectuer des transactions grâce à un mobile au Maroc, Jeune Afrique republie cet article issu du Focus monétique : quel développement en Afrique (Jeune Afrique n°2997, du 17 juin 2018).

« Les monopoles des banques sautent les uns après les autres. Avec cette nouvelle activité, elles perdent la collecte du dépôt et la distribution des moyens de paiement universels », explique Ahmed Rahhou, président de la banque CIH, qui vient de lancer son application WePay.

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La BCP l’avait devancée de quelques jours avec son offre BPay, la BMCE a récemment levé le voile sur DabaPay, et d’autres devraient leur emboîter le pas. Au mois de février, la banque centrale a accordé son agrément à cinq autres établissements qui pourront exercer cette activité : Wafacash (filiale d’Attijariwafa Bank), Cash Plus, M2T, Naps (filiale de M2M) et Maymouna services financiers (filiale de Saraya Holding).

Une dizaine d’agréments ont d’ores et déjà été accordés à des opérateurs téléphoniques et entreprises de transfert d’argent.

Des paiements électroniques plutôt que du cash

Cette révolution vise à encourager les paiements électroniques au détriment du cash, dont la valeur totale d’échange représente 400 milliards de dirhams (environ 35 milliards d’euros) par an. Cela fait un peu plus de trois ans que la banque centrale, en partenariat avec l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT), dessine les grandes lignes de ce marché. Le Maroc a déjà connu deux expériences malheureuses de faible ampleur au début des années 2000, mais cette fois semble être la bonne. Et le royaume entend bien talonner d’autres pays africains comme le Kenya.

« Il faut que cela devienne un instrument de paiement généralisé pour payer l’épicier du coin, le taxi ou les factures et toute autre petite transaction », espère Ahmed Rahhou. Car le panier moyen des Marocains auprès des commerçants de proximité représenterait 35 dirhams par course, pour presque 300 milliards de dirhams de transactions par an. Mais le facteur manquant, et le plus important, reste le recrutement des commerçants.

 La clé de la réussite, c’est que les transactions soient gratuites, contrairement à ce qui se fait avec les TPE, où une commission est prélevée

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« Il ne faut pas se concentrer sur l’axe Casa-Rabat. Les porteurs de la stratégie doivent vulgariser le système pour les rassurer », estime Hazim Sebbata, directeur général de Cash Plus, spécialisé dans le transfert de fonds avec ses 1 300 agences. Selon plusieurs observateurs, les commerçants craignent que la solution soit payante.

« La clé de la réussite, c’est que les transactions soient gratuites, contrairement à ce qui se fait avec les TPE, où une commission est prélevée », recommande Ahmed Rahhou. Selon nos informations, les transactions inférieures à 50 dirhams seront sans frais, et une petite commission sera appliquée pour le reste, en fonction du montant.

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Pour Hazim Sebbata, il faut proposer des incitations aux 400 000 commerçants du Maroc. Une solution leur permettant de recruter des clients et même de leur ouvrir un compte contre une rémunération serait à l’étude.

Une exception africaine

L’interopérabilité, qui devrait être mise en place d’ici au mois de septembre, sera aussi l’un des points forts de cette stratégie. Un élément rassurant pour convaincre commerçants et particuliers. « Cette technologie fait du marché marocain une exception à l’échelle de l’Afrique », commente le président de CIH.

Les observateurs prévoient un début d’opérationnalisation chez les commerçants avant la fin de l’année. « Le basculement ne se fera pas rapidement. Cela prendra du temps et les Marocains n’abandonneront pas facilement le cash », estime Hazim Sebbata, qui reste toutefois très optimiste. Les sondages auprès des particuliers lui donnent d’ailleurs raison.

Des opérateurs sur la brèche

D’ici à la fin de l’année, le nombre d’acteurs sur le marché du paiement digital est appelé à croître. Selon nos informations, dans quelques semaines, la banque centrale accordera son agrément aux filiales des trois opérateurs de téléphonie Maroc Telecom, Orange et Inwi. Ces derniers disposent d’une force de frappe très importante grâce aux 44 millions de clients qu’ils cumulent. In fine, une douzaine d’acteurs proposeront le paiement mobile.

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